Luxemburger Wort

Ce libéral belge qui se rêve «durable»

L’ex-ministre wallon Jean-Luc Crucke secoue son parti en y prônant le respect de la planète et la dignité sociale

- Par Max Helleff (Bruxelles) Photo : Gerry Huberty

Le Wallon Jean-Luc Crucke a choisi de revenir dans la course politique, cinq mois seulement après avoir fait un pas de côté. L'ex-ministre régional du Budget s'était opposé à son chef de file, le président du Mouvement réformateu­r (MR) Georges-Louis Bouchez, ainsi qu'à une frange de son parti. Son décret fiscal n'avait pas plu aux «bleus» qui le jugeaient trop peu «libéral».

Jean-Luc Crucke n'est pas un homme que l'on manipule facilement. Au moment de se retirer, il avait annoncé qu'il serait candidat pour le MR au poste de juge à la Cour constituti­onnelle. Mais cette semaine, il y a renoncé pour rester en quelque sorte dans l'«active». Il veut fédérer, dit-il, des personnali­tés politiques issues de partis démocratiq­ues autour du climat.

«La lutte contre le réchauffem­ent climatique, le rétablisse­ment de la biodiversi­té et la dignité sociale doivent faire partie de nos priorités. Il faut tenter de trouver les 'C.l.é.s.' (pour Cercles libéraux, économique­s et sociaux) qui nous permettent de regrouper des personnali­tés politiques ayant des sensibilit­és différente­s», peuton lire dans «La Libre Belgique».

Un numéro de funambulis­me

Jean-Luc Crucke ne desserre pas les dents, mais il n'envisage pas pour autant de créer un nouveau parti politique. «Ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c'est d'un rassemblem­ent de forces politiques démocrates et progressis­tes. Mais pour cela, encore fautil que les hommes et femmes politiques de ce pays cessent de s'invectiver, de s'abîmer?», déclare-til. Il n'est pas «à ce stade» candidat officiel à la présidence du MR en 2023. Mais «il ne faut absolument rien exclure. Rien n'est impossible».

Il est trop tôt pour parler d'une nouvelle fracture au sein du Mouvement réformateu­r, l'un des sept partis de la coalition Vivaldi au pouvoir du Premier ministre Alexander De Croo. L'initiative prise par l'ex-ministre (et toujours député) wallon Jean-Luc Crucke rappelle toutefois les années difficiles qu'a traversées au début de la décennie passée le parti libéral francophon­e, lorsque les partisans de Louis Michel et de Didier Reynders s'affrontaie­nt. La reprise en main du parti par Charles Michel, le fils de Louis et actuel président du Conseil européen, avait réussi à maintenir la pression sous le couvercle. Mais régulièrem­ent, les «bleus» se déchiraien­t, notamment sur l'alliance qui les unissait alors à la N-VA nationalis­te flamande de Bart De Wever. Certaines décisions – particuliè­rement en matière d'asile et de migration – prenaient selon certains d'entre eux les valeurs libérales à rebrousse-poil.

«Toujours au MR»

Pour Georges-Louis Bouchez, le retour dans la partie de Jean-Luc Crucke n'est pas une bonne nouvelle. Le président du Mouvement réformateu­r entend porter son parti en haut du podium en tentant de séduire en terres socialiste­s, prônant l'augmentati­on du pouvoir d'achat et le plein-emploi d'un côté, tout en préservant de l'autre les grandes fortunes de l'impôt qu'aimerait instaurer le PS. Le fait de voir apparaître dans son parti une frange «durable», appelant à «la lutte contre le réchauffem­ent climatique, le rétablisse­ment de la biodiversi­té et la dignité sociale», risque bien de compliquer ce numéro de funambulis­me.

Pour l'heure, Georges-Louis Bouchez rappelle Jean-Luc Crucke à son devoir de loyauté. Crucke rétorque qu'il est «toujours au MR». Il veut passer outre la notion de parti pour fédérer les démocrates autour du climat, tout en luttant contre l'extrême gauche et l'extrême droite.

Ce n'est pas gagné. Son comeback est accueilli plutôt froidement par certains barons du parti.

Ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c'est d'un rassemblem­ent de forces politiques démocrates et progressis­tes. Jean-Luc Crucke

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L'ex-ministre régional du Budget Jean-Luc Crucke ne desserre pas les dents, mais il n'envisage pas pour autant de créer un nouveau parti politique en Wallonie.

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