Sur les chemins de l’exil
«Ecce Homo», les oeuvres de Bruce Clarke au Musée national de la Résistance et des Droits humains
Ses toiles racontent l’horreur et l’inadmissible. Et pourtant, Bruce Clarke se définit lui-même encore et toujours comme un «optimiste réaliste».
Découvrir les peintures de l’artiste britannique au Musée national de la Résistance et des Droits humains d’Esch-sur-Alzette, est tout d’abord un choc visuel. Cette confrontation est frontale, tant les thèmes abordés sont graves. Et pourtant, au-delà de cette première expérience, se dégage un langage d’une esthétique toute particulière. Les peintures à l’huile ou acryliques, mais aussi les aquarelles témoignent toutes d’une sensibilité à fleur de peau, combinée à une certaine forme de douleur maîtrisée. Sous ses airs apaisés, Bruce Clarke est et reste un esprit mouvementé, révolté. De quoi parle-til dans ses oeuvres?
Pour le comprendre, il faut connaître la biographie de l’artiste né en 1959. Ses grands-parents juifs ont quitté dans les années 1930 Kaunas et la Lituanie pour rejoindre l’Afrique du Sud. Un pays que ses parents ont déserté pour s’installer au Royaume-Uni, que Bruce Clarke délaissera par la suite pour venir s’installer plus tard en France. «Durant les trois dernières générations, notre famille a toujours connu l’exil ou le déplacement. Ceci a bien évidemment forgé mon regard sur le monde. En ce qui me concerne, je suis un privilégie, je n’ai pas été forcé à l’exil».
«Ecce Homo», le titre de l’exposition – au-delà de la connotation religieuse peu relevante dans ce cas présent – est à comprendre comme un hommage «aux exilés, réfugiés et déportés, donc de populations en mouvement», insiste Bruce Clarke.
Présenté par le Musée national de la Résistance et des Droits humains dans le cadre d’Esch2022, le projet «Ecce Homo» trouve son prolongement dans deux autres endroits significatifs. Bruce Clarke avec «Les limbes de Thil», a réalisé une fresque permanente à l’entrée de la mine de Tiercelet à Thil, près de Villerupt, tristement célèbre depuis la Seconde Guerre mondiale. Une suite de l’exposition eschoise est proposée au Fort IX de Kaunas, en Lituanie, l’autre Capitale européenne de la Culture. Pour Bruce Clarke, un retour aux sources familiales en quelque sorte.
Un autre événement aura marqué la vie de l’artiste sud-africain: sa rencontre avec Tebby W.T. Ramasike, danseur Buto, qui présente en parallèle de l’exposition sa performance «The Wreckage on my Flesh».
Des drames humains
La Shoah, l’Apartheid d’Afrique du Sud, mais aussi le génocide au Rwanda: les thématiques auxquelles s’intéresse Bruce Clarke sont autant de drames humains. Tout comme Tebby W.T. Ramasike, le Britannique met en lumière la guerre et ses conséquences, les crimes contre l’humanité, les génocides. Son travail est aussi un appel à la résistance et à la résilience.
Et pour atteindre son but, l’artiste a choisi une voie bien particulière: la peinture. «En fait, j’ai deux casquettes», indique Bruce Clarke, «la première est celle de mon engagement politique, de mon questionnement de la société. La seconde concerne mon travail d’artiste». Inutile de préciser que les imbrications sont nombreuses... et inévitables. «Mes toiles sont bien évidemment imprégnées du monde contemporain qui nous entoure. Ce sont des évocations subjectives.»
Avec une particularité à la clef: aucun noms propres de personnes, aucuns lieux ou événements particuliers ne sont évoqués. Cette universalité thématique recherchée se traduit par un travail assidu sur l’expressivité du corps humain. Comme cette photo retravaillée du corps d’un homme mort gisant à même le sol à Gaza. La ressemblance avec les photos du récent massacre de Butscha est glaçante.
Pour l’exposition à Esch, le Britannique s’est essayé une première fois à la sculpture. Ces personnages grandeur nature, ses «Survivors in Suspension», drapés dans des linceuls de tissus blancs, impressionnent et donnent du relief aux propos de cet artiste engagé.
Alors qu’aujourd’hui la place de l’image est prépondérante et obsessionnelle, Bruce Clarke désoriente le spectateur en brisant ses habitudes. L’aquarelle de cet homme décédé suggère d’autres associations d’idées que l’artiste vient balayer d’un coup de pinceau. Son regard, lucide et déterminé, au second degré et quelque peu distancié de la réalité brute, ne se limite pas à la seule narration d’événements, mais est le reflet d’une interprétation interrogative puissante.
Bruce Clarke travaille le plus souvent à partir d’éléments réels, qu’il affectionne de collectionner, regrouper et retravailler – aussi numériquement dans un premier temps – pour créer une première esquisse de ce qui deviendra par la suite une création picturale. Les lieux, mais surtout les personnages ainsi obtenus sont bien réels, mais deviennent des anonymes, des «acteurs de l’histoire».
Pour l’artiste, l’acte de peindre est aussi une source de plaisir jouissif. Ce qui ne l’empêche pas de recourir à la technique du collage. Nombreuses sont les huiles et aquarelles auxquelles il ajoute des bribes de phrases ou quelques mots. Non pas pour fournir une clef supplémentaire de lecture, voire de compréhension, mais pour le simple plaisir de jouer avec des mots «qui ne doivent pas forcément avoir un sens particulier». Alors qu’à la lecture d’un mot, d’une phrase, le spectateur cherche toujours un sens à donner à ces éléments écrits, l’artiste décontextualise ses dires. Tout en continuant de miser sur l’échange direct avec celui qui découvre le travail. Car, même s’il met en scène l’Holocauste ou tout autres cruautés dont est capable l’Homme, Bruce Clarke évite toute réaction répulsive du spectateur. L’interprétation du réel ne se limite pas à une unique lecture au premier degré. Pour l’artiste, il lui faut conquérir son public. Sa recherche esthétique est aussi en quelque sorte «un jeu de séduction», qui lui permet de partager ses vues. «La communication avec celui qui voit mes oeuvres est absolument primordiale.»
Cette approche lui permet-elle de porter un jugement? «Je suis passionné, certes, avec mes connaissances je peux dire des choses, relater des faits. Mais jamais, je ne juge. De quel droit? Je ne suis pas scientifique pour porter un jugement».
Vernissage demain à 18 heures, Ensuite jusqu’au 30 décembre. Infos:
www.mnr.lu
Mes toiles sont imprégnées du monde contemporain. Ce sont des évocations subjectives. Bruce Clarke, artiste plasticien
Jean-Philippe Schmit
Luxemburg. Am Sonntag, dem 30. August 1942, kam es zu später Stunde in einer Gaststätte in Wiltz zu einem konspirativen Treffen. Am Nachmittag hatte der Gauleiter Gustav Simon die Wehrpflicht für das besetzte Luxemburg verkündet. „Am Abend wurde besprochen, wie man darauf reagieren solle“, sagt der Historiker Paul Dostert. „Da gi mir net schaffen“, wurde beschlossen.
Rund zwei Wochen zuvor war es bereits zu einem anderen Treffen gekommen. Adolf Hitler hatte die Chefs der Zivilverwaltungen Luxemburg, Elsass und Lothringen zu sich gerufen. „Die Deutschen brauchten Soldaten“, erklärt Paul Dostert. Das Völkerrecht verbietet eigentlich, dass Einwohner aus besetzten Gebieten in die fremde Armee gezwungen werden. Also wurde den Luxemburgern, Elsässer und Lothringer die deutsche Staatsbürgerschaft zugesprochen. Sie unterlagen so – zumindest in der Logik der Nazis – der deutschen Wehrpflicht.
Am 23. August, eine Woche vor der Rede, verschickte das Reichsinnenministerium in Berlin Anweisungen, wie die Staatsbürgerschaft in den drei besetzten Gebieten zu handhaben sei. „In Wiltz wurde der Umschlag bereits geöffnet, ehe er in die Hände des Amtsbürgermeisters gelang“, sagt Paul Dostert. Die Gerüchte, dass bald eine Wehrpflicht eingeführt würde, erhielten neue Nahrung. Der Historiker spricht auch ein ungewöhnliches Flugblatt an. Eine Resistenzgruppe stellte einen Text zusammen, in dem sie zum Generalstreik aufrief. So zumindest der Plan. Die Gruppe schaffte es, einen Drucker in Brüssel davon zu überzeugen, das Flugblatt in tausendfacher Ausführung zu publizieren. Das Wort „Streik“sollte dabei in Großbuchstaben abgedruckt werden, es wurde mit maj, für majuscule gekennzeichnet. „Der Drucker hatte dies nicht verstanden und druckte Maj anstelle von Streik ab.“Der Inhalt des Flugzettels habe so „fast keinen Sinn“ergeben.
Der Streik war nicht geplant
Er war auch nicht der Ursprung des Streiks vom Montag, dem 31. August 1942. „Dieser fand spontan statt, er wurde nicht geplant oder vorbereitet“, erklärt Dostert. Es habe zwar Pläne gegeben, dass am Tag der Ausrufung der Wehrpflicht die Züge als Startzeichen für einen großangelegten Generalstreik nicht verkehren sollten. Da sich die Ereignisse überschlugen, konnten die Lokomotivführer aber nicht von diesen Plänen in Kenntnis gesetzt werden.
Die Arbeiter der Ideal-Lederfabrik in Wiltz hielten sich an das, was sie am Vorabend in der Wirtschaft beschlossen hatten. Als am Montagmorgen Punkt 7 Uhr die Schicht begann, nahm der Großteil der Belegschaft die Arbeit nicht auf. So wollten sie ein Zeichen des Protestes setzen. Die Nachricht verbreitete sich rasch und in der Folge traten viele andere Wiltzer in den Streik. Geschäfte blieben geschlossen, Schüler verweigerten den Unterricht, sogar die Angestellten der örtlichen Brauerei legten ihre Arbeit nieder.
Die Nachrichten aus dem Norden erreichten bald das ganze Land und die Wiltzer fanden immer mehr Nachahmer. Polizeibeamte nahmen das Zeichen der volksdeutschen Bewegung ab. Postbeamte legten die Arbeit nieder und Landwirte lieferten keine Milch ab. Am Gericht in Luxemburg sammelte der Greffier die VdB-Mitgliedskarten ein. In der Lehrerschule in Walferdingen sind die angehenden Lehrerinnen nicht aufgestanden, als der Professor den Raum betrat, es gab auch keinen Hitlergruß.
In Ettelbrück und in Diekirch sah sich die SA gezwungen, gegen Mittag mit Lautsprechern durch die Straßen zu fahren, um die Leu
Der Streik fand spontan statt, er wurde nicht geplant oder vorbereitet. Historiker Paul Dostert
Der Streik hatte am frühen Morgen des 31. August 1942 in Wiltz begonnen. te vom Streiken abzuhalten. „Wer bis heute Mittag 14 Uhr nicht arbeitet, wird festgenommen und vor der Kirche erschossen“, habe die Durchsage gelautet.
Streik überraschte die Besatzer
„Die Besatzer wurden vom Streik überrascht, sie hatten nicht mit einer solchen Reaktion gerechnet“, erklärt der Historiker. „Viele wichtige Personen befanden sich Ende August im Urlaub.“Der Gauleiter Gustav Simon etwa besuchte seine Heimatstadt Koblenz. „Davor machte er einen Abstecher zu seiner Freundin in Saarburg“, verrät Dostert.
Im Laufe des Tages kam der Chef der Gestapo nach Wiltz. Dort sei er nur beschäftigten Arbeitern begegnet. „Während er seinen Vorgesetzten durchtelefonierte, dass alles in Ordnung sei, kam die Nachricht, dass im Stahlwerk in Schifflingen gestreikt würde“, betont der Historiker. Der deutschstämmige Hans Adam hing gegen 18 Uhr im Walzwerk in Schifflingen einen Eisenhaken an die Sirene und gab so das Signal zur Arbeitsniederlegung.
Die Besatzer wurden immer nervöser. „Blitzfernschreiben“wurden an das Reichssicherheitshauptamt RSHA nach Berlin geschickt. „Zumindest Goebbels hat vom Streik erfahren“, weiß der
Historiker Dostert. In seinen Tagebüchern zeigte er sich erzürnt, dass das kleine Luxemburg dem Deutschen Reich derartig in den Rücken fallen würde.
Sofortiges Erschießen sei die einzige Lösung, hielt er fest. Die Antwort, die das RSHA nach Luxemburg zurückschickte, lautete dann auch „Standgericht“. Zudem wurde der Ausnahmezustand ausgerufen.
„Das Standgericht traf nachts zusammen“, erklärt Dostert. Die „Angeklagten“hatten keinen