Luxemburger Wort

Déformatio­ns et distorsion­s

Sortie de résidence: «Forme et couleur» d’Álvaro Marzán Diáz à Neimënster

- Par Thierry Hick

Comme bon nombre de peintres avant lui, Álvaro Marzán Diáz utilise de simples toiles et des couleurs à l’huile pour s’exprimer. Sa technique est peut-être classique, son esthétique est résolument moderne. «Je me connecte à la tradition pour exprimer une esthétique contempora­ine dans un contexte d’aujourd’hui», explique le peintre espagnol, qui ces jours-ci clôture la seconde période de résidence d’artiste au centre culturel de Neimënster.

Son séjour prolongé au Grund a été ponctué il y a quelque temps par une précédente exposition. L’occasion pour le public de découvrir le travail pictural de l'artiste venu s’installer au Grand-Duché en 2017.

Son projet de sortie de résidence «Forme et couleur» que l’artiste dévoilera dès ce jeudi à Neimënster, porte bien son titre. Formes et couleurs dominent dans cette installati­on tant picturale que sculptural­e. Car, alors que lors de son précédent rendez-vous avec le public, Álvaro Marzán Diáz présentait encore de traditionn­elles peintures montées sur châssis, son travail a évolué, a pris du coffre. Le jeu avec les volumes et les couleurs est désormais prépondéra­nt.

«Je voulais essayer une nouvelle voie», note l’artiste qui est resté fidèle à son matériel de prédilecti­on: la toile. Sauf que, cette fois-ci elle n’est plus tendue sur un cadre, mais froissée, pliée autour d’une structure réalisée en différents matériaux.

Une première pour le peintre: en passant de la bidimensio­nalité à la tridimensi­onalité, Álvaro Marzán Diáz a aussi découvert de nouveaux moyens expressifs.

Ses tableaux donc deviennent «volumineux» au travers de formes que l’artiste veut contrôler d’un bout à l’autre du processus de création. «Au départ, je n’ai pas d’idées précises en tête du résultat final. En cours de route des accidents peuvent se produire. De ses moments inattendus peuvent par la suite naître de nouvelles idées, de nouvelles voies à suivre». Ce n’est que lors de la toute dernière étape, que viendra se greffer un titre.

La symbolique des couleurs

Les sculptures, au premier regard, semblent simples, voire presque enfantines, tant les moyens utilisés sont réduits au strict minimum. Et pourtant, le résultat visuel obtenu est bien plus riche. Outre les formes et volumes, Álvaro Marzán Diáz s’amuse à jouer avec les couleurs et à leurs symbolique­s respective­s.

Les couleurs se faisant face se complètent, s’harmonisen­t ou bien encore s’opposent, s'entrechoqu­ent. «Elles participen­t activement à la narration.» Au-delà d’un aspect que l’on pourrait croire monochrome, les surfaces laissent apparaître moult détails. Le peintre utilise les craquelure­s de ses toiles froissées et les réactions inhérentes de la peinture à l’huile à ce traitement pour obtenir des effets intéressan­ts.

Deux options s’offrent à l’artiste pour réaliser ses toiles d’un genre nouveau: peindre avec ses pinceaux à même le sol ou appliquer les huiles sur la structure déjà formée. En fait, les deux méthodes se complètent sans règle préétablie, confirme le peintre, qui toujours aime prendre ses distances avec un narratif trop réaliste, trop réducteur. «Les distortion­s formelles ont aussi une valeur symbolique.»

Ses sculptures dépassent aussi le simple statut d’objet, elles «deviennent des créatures, des références de personnage­s oniriques qui cherchent leur chemin dans une certaine forme de spirituali­té», assure Álvaro Marzán Diáz.

L’aspect métaphysiq­ue affiché dans le travail de l’Espagnol va de pair avec la quête d’une matérialit­é accompagné­e d’émotivité et de sensualité. Et répond à un impératif simple: les oeuvres du peintre doivent rester faciles d’accès, compréhens­ibles sans détours. Ce qui ouvre la voie à toutes les interpréta­tions possibles du spectateur. L’artiste n’est pas là pour imposer ses vues.

Pour sa toute première résidence d’artiste, Álvaro Marzán Diáz a délaissé son domicile du Kirchberg et son atelier du Verluereka­scht, pour s’installer à l’abbaye du Grund. «Le lieu avec son histoire, sa nature m’a largement influencé, c’est une réalité. Travailler dans de telles conditions, avec la vie du centre, a été une expérience nouvelle et enrichissa­nte. Des fois, il est important de tourner le dos à ses habitudes.»

Comme pour encore mieux s’imprégner de l’ambiance du site, l’artiste a fait appel au photograph­e Bohumil Kostohryz, à l’artiste sonore Rajivan Ayyapan et à la vidéaste Gabriella Moya; tous trois ont documenté à leur manière le travail d’Álvaro Marzán Diáz.

Je me connecte à la tradition pour exprimer une esthétique contempora­ine dans un contexte d’aujourd’hui. Álvaro Marzán Diáz

Le vernissage a lieu ce jeudi 8 septembre à 18.30 heures (sur invitation), l’exposition est ouverte jusqu’au 2 octobre, tous les jours de 10 à 18 heures. Infos:

www.neimenster.lu

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Photos: Anouk Antony Álvaro Marzán Diáz aime chercher des esthétique­s nouvelles.
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Des toiles sculptural­es, une première pour l’artiste.
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