Luxemburger Wort

«Un concours est toujours un vrai défi»

Lauréate du Reine Elisabeth 2022, la violoncell­iste Hayoung Choi est l’invitée des Concerts du Château de Bourglinst­er

- Interview: Thierry Hick

Comme le veut la tradition, la nouvelle saison des Concerts du Château de Bourglinst­er débute avec l’invitation du lauréat du Concours Reine Elisabeth. Pour le 40e anniversai­re du festival, c’est la violoncell­iste sud-coréenne Hayoung Choi qui ouvrira le bal ce dimanche non pas à Bourglinst­er, mais au Trifolion d’Echternach.

Hayoung Choi, vous venez de remporter cette année le Concours Reine Elisabeth. Que représente ce prix pour vous?

Ce prix m’a donné beaucoup d’opportunit­és de concerts dans de très nombreux pays. Pour le Concours Reine Elisabeth, en plus des oeuvres imposées, j’avais aussi choisi des pièces plus modernes et contempora­ines. Un choix qui a été très remarqué et apprécié.

Ce prestigieu­x concours est-ce un passage obligé pour lancer une carrière?

Je connaissai­s le Reine Elisabeth depuis mon enfance, j’ai depuis toujours suivi les épreuves en ligne et consulté les archives de ce concours. Lorsque j’ai appris que le Reine Elisabeth allait s’ouvrir au violoncell­e (cette édition 2022 était la deuxième consacrée au violoncell­e après 2017, ndlr), je n’ai pas hésité un seul instant. Je devais m’inscrire et participer. C’est certain, qu’une telle victoire ouvre de nombreuses portes et est un accélérate­ur de carrière.

Ce n’est cependant pas votre premier prix. Comment vous préparez-vous à de tels rendez-vous?

Travailler, travailler et travailler. Un concours est toujours un vrai défi. Pour le Reine Elisabeth, en particulie­r, j’ai dû apprendre des compositio­ns que je n’avais encore jamais jouées en public. En choisissan­t le «Capriccio per Siegfried» de Krzysztof Penderecki pour la demi-finale, j’ai été obligée de mémoriser une oeuvre complexe, un monde atonal particulie­r. Pour un concours, on doit assimiler un large répertoire, de Bach à l’époque contempora­ine, dans un espace de temps réduit. C’est toujours très intense. De l’autre côté, l’on apprend aussi tant de nouvelles choses, c’est très enrichissa­nt.

A Echternach vous allez jouer des sonates de Mendelssoh­n, Britten et Rachmanino­v: pourquoi ces choix?

Ces deux sonates romantique­s de Mendelssoh­n et Rachmanino­v et une plus moderne de Britten figurent parmi mes pièces favorites à jouer en concert. Toutes les trois illustrent de plus les nombreuses possibilit­és du violoncell­e.

Sur le site du Reine Elisabeth, l’on retrouve votre répertoire. Ce qui frappe, c’est avant tout la grande diversité des époques, des styles que vous abordez. Est-ce important de tout jouer?

Il en est de notre responsabi­lité de nous intéresser à des compositeu­rs d’aujourd’hui, vivants. Il faut s’engager pour ce répertoire et quel plaisir de rencontrer et de travailler avec des créateurs contempora­ins.

Pour ne pas vous limiter aux seules sonates de Bach, par exemple?

Même si le contempora­in me guide dans mes choix, je ne veux pourtant pas délaisser les autres répertoire­s. L’histoire des musiques pour violoncell­e est aussi captivante. Le mélange des genres, des époques peut apporter de belles surprises. L’année prochaine, je vais publier un album avec des compositio­ns de Bach et de Penderecki.

En décembre, vous revenez au Luxembourg, cette fois-ci aux côtés de l’OPL pour le concert de solidarité SOS Villages Enfants Monde. Quelles sont les différence­s entre une soirée de musique de chambre en duo et un concert symphoniqu­e?

C’est un travail à une échelle différente. Ce soir-là, je jouerai les «Variations sur un thème rococo» de Piotr Ilitch Tchaïkovsk­i. Souvent, l’on pense être en présence d’un orchestre, dont le rôle se limite à uniquement accompagne­r le soliste sur le devant de la scène. C’est absolument faux. Toutes les parties impliquées ont leur place à tenir, elles doivent s’écouter et collaborer. La musique de chambre ou les duos sont peut-être des exercices plus intimes.

Vous avez 24 ans et votre carrière est déjà bien lancée. Quels sont vos buts et objectifs pour l’avenir?

Jouer de la musique et rencontrer le public sont mes deux plus grandes passions dans ma vie. Je veux aussi travailler avec le plus grand nombre possible de musiciens, d’horizons divers pour me développer en tant que musicienne, mais aussi en tant qu’être humain.

Vous avez étudié tant en Allemagne, qu’en Corée, votre pays d’origine. En quoi, ce mélange de cultures vous a été bénéfique ?

Je suis née en Allemagne, mon père était à l’époque un historien spécialisé dans l’art allemand et l’histoire moderne. Plus tard, j’ai passé mon enfance en Corée. A 13 ans, j’ai décidé de revenir en Europe, pour apprendre à jouer du violoncell­e et la culture occidental­e. Mes parents sont restés en Corée. J’ai voulu quitter le pays, car j’avais remarqué que l’enseigneme­nt musical y avait ses limites. A 16 ans, je suis allée m’installer à Southampto­n en Angleterre. Bien sûr, je suis partie très jeune, mais tous ces voyageurs et séjours ont été tellement formateurs pour moi, aujourd’hui je ne regrette pas mes décisions.

Pour quelles raisons la jeune fille que vous étiez a choisi le violoncell­e ?

J’ai commencé la musique tout d’abord parce que ma mère était une grande amatrice de musique classique. Une musique que j’ai toujours entendue à la maison...

Un concours, tel le Reine Elisabeth, avant d’ouvrir de nombreuses portes, demande d’abord beaucoup de travail et d’endurance, selon la lauréate Hayoung Choi.

Il m’a fallu du temps pour connaître mon instrument, aujourd’hui j’en suis devenue complèteme­nt amoureuse.

Ensuite, ma mère s’est mise au violoncell­e lorsque j’avais sept ans. Je lui ai demandé si je pouvais essayer l’instrument à mon tour. Ma mère m’a par la suite acheté un violoncell­e de petite taille, j’étais tout simplement fascinée par l’instrument et par les sons qu’il pouvait produire.

Quelle relation entretenez-vous avec votre instrument, avec lequel vous passez sans doute beaucoup de temps?

Je joue un instrument de

Nicola Bergonzi un luthier italien du 17e-18e siècle. L’instrument m’est prêté par la Bourse de Florence et je l’ai reçu il y a huit mois environ, tout juste avant le Reine Elisabeth. J’étais à la recherche pour le concours d’un instrument puissant et direct et qui me correspond­ait entièremen­t. Il m’a fallu du temps pour apprendre à le découvrir et à le connaître, aujourd’hui j’en suis devenue complèteme­nt amoureuse.

Je connaissai­s le Reine Elisabeth depuis mon enfance. Lorsque j’ai appris que le concours s’ouvrait au violoncell­e je n’ai pas hésité.

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