Le droit à l’avortement dans la constitution luxembourgeoise!
Les droits sexuels et reproductifs des femmes ne sont jamais acquis. Surtout la montée de l'extrême droite doit pousser à la vigilance
Par 780 voix pour et 72 contre, les parlementaires français ont adopté lundi 4 mars une révision constitutionnelle visant à protéger la liberté d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. La France est ainsi devenue le premier pays à inscrire le droit à l'avortement dans sa Constitution.
Une bonne nouvelle pour les femmes et pour toutes les personnes pouvant tomber enceintes et un exemple à suivre pour le Luxembourg. Et pour cause, si l’histoire des droits fondamentaux est souvent présentée comme un progrès linéaire et irrémédiable, les droits sexuels et reproductifs des femmes ne sont jamais acquis. Le droit de recourir à l’avortement, premier de ces droits, est constamment menacé, justifiant son inscription dans la Constitution de notre pays. La montée de l’extrême droite et des conservateurs nous pousse à une extrême vigilance. Je rappelle que l’avortement est interdit en Pologne, qu’à Malte les femmes qui y ont recours peuvent être condamnées à la prison, qu’en Hongrie les femmes désirant avorter sont contraintes d'écouter les battements du coeur du foetus. En Suède et maintenant en Italie, l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite met en péril le droit à l'avortement.
Du jour au lendemain, à cause de lois restrictives, puis des fermetures d’établissements, des femmes se retrouvent sans accès à l’interruption volontaire de grossesse, dans des situations abominables et parfois en réel danger de mort. Une chose est certaine : cela ne fait pas baisser le nombre d’avortements ! Selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), chaque année, les avortements non sécurisés sont responsables de 39.000 décès dans le monde. À l'échelle mondiale, 60 % des femmes vivent dans des pays où l’avortement est légal, mais 40 % vivent encore sous des lois qui restreignent ou interdisent ce droit, selon le Center for Reproductive Rights.
Au Luxembourg le droit à l’IVG est déjà compromis
Et même au Luxembourg, ce droit est menacé : désinformation et intimidation sur les réseaux sociaux et dans la presse, difficultés à trouver un gynécologue pratiquant l’avortement… L’accès à ce droit, ainsi qu’à une information fiable et sécurisée, est déjà compromis. Récemment, une commune luxembourgeoise a voulu organiser une projection d’un film sur le droit à l’avortement et une association catholique et anti-avortement devait être en charge du débat ! La Constitution est la norme la plus importante, la norme suprême à laquelle toutes les autres doivent être conformes. Intégrer un droit fondamental dans la Constitution donne à celui-ci une plus grande valeur juridique et le rend plus difficile à modifier que lorsqu’il est garanti par la loi. En effet, la Chambre des députés vote des lois tous les jours et ce qu’une simple loi a fait, une simple loi peut le défaire. Or, l’extrême droite progresse partout, au Luxembourg aussi. N’attendons pas qu’il soit trop tard !
Le droit à l’avortement est en proie aux volontés politiques des majorités divergentes qui se succèdent. L’impact sur les droits des femmes et des minorités, comme le montrent les exemples de la Pologne, de la Hongrie, de l’Italie, de la Suède, du Portugal et des États-Unis, souligne la nécessité de prendre des précautions quant à la préservation supposée de ces droits, acquis après de longues luttes historiques susceptibles d’être rapidement érodés par l’évolution des circonstances.
L‘IVG dans la Constitution : après la France, maintenant le Luxembourg
Le droit des femmes à disposer de leur corps constitue la condition essentielle de la liberté des femmes et d’une égalité entre les femmes et les hommes. Sans maîtrise de leur fécondité, il ne peut y avoir d’égalité. L’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution est donc à la fois une nécessité et une consécration des droits des femmes et de l’égalité. L’IVG n’est pas un droit comme un autre. Être libre est une condition de l’égalité, et décider pour son propre corps, une condition de la démocratie. Pour les femmes, ce droit est le préalable à toute liberté. Le droit à l’avortement est un droit fondamental, il a donc toute sa place dans la Constitution. C’est une garantie supplémentaire pour toutes les femmes. Une garantie de protection.
Faire du Luxembourg le deuxième pays après la France à inscrire ce droit fondamental dans sa Constitution enverrait un message d’espoir pour les femmes et les minorités du monde entier qui luttent constamment pour leurs droits, pour le respect de leur corps et de leur santé. Les entraves à l’autonomie sexuelle et reproductive des femmes sont l’expression d’un sexisme institutionnalisé et doivent être combattues. Éloignons les rosaires de nos ovaires et inscrivons le droit à l’IVG dans la Constitution luxembourgeoise !