Les experts se rendent coup pour coup
Alors que paraît aujourd’hui un fac-similé de 65 dessins attribués à Van Gogh par deux experts reconnus, la “contre-expertise” du Van Gogh Museumdémonte point par point toute authenticité
Voilà le trouble semé. Au lendemain du coup de théâtre lors de la conférence de presse de présentation de 65 dessins inédits de Vincent Van Gogh (lire notre édition d’hier), pendant laquelle le Van Gogh Museum d’Amsterdamavait affirméparcommuniqué que les oeuvres n’étaient que des « imitations » , les experts de l’institution hollandaise ont enfoncé le clou, hierdans les colonnes duFigaro, en diffusant l’intégralité de leurargumentaire. Undésaveutotal. « Parce que notre avis antérieur sur le Brouillard n’est pas inclus dans l’étude, le musée Van Gogh a choisi de divulguer ces informations » , peuton lire au terme d’un exposé de deuxpagesrépondant au fac-similé de 288 pagesde l’experte Bogomila Welsh-Ovcharov, associée au spécialiste de la période arlésiennedeVan Gogh, le Britannique Ronald Pickvance. « Après avoir examiné un certain nombre d’originaux en 2013 et lu la publication, nos experts, dont l’opinion est fondée sur des années de recherche dans la collection maison et ailleurs, n’ont donc pas changé d’avis. Ce carnet de croquis d’Arles est une imitation tant du point de vue du style, de la technique, des matériaux et de l’iconographie. Il contient également des erreurs topographiques. » Quant à la concomitance établie par Bogomila Welsh entre des tableaux existants et ses esquisses, elle laisse pantois les experts hollandais. « Contrairement aux peintures, le style est monotone, maladroit et sans esprit. » Peu importe l’artiste, le voilà donc rhabillé pour l’hiver.
« Les attributions se font souvent au forceps »
La « pierre angulaire » des conclusions des auteurs du Brouillard d’Arles, repose sur un petit carnet de bordduCafé de la gare d’Arles. Il mentionne le dépôt des dessins « de la part de Van Goghe (sic) » . De son côté, leVan GoghMuseum évoque « deux pages manquantes » àce carnet tel qu’il leur avait été présenté. Maisaussi deuxnotessimilai- res, concernant Van Gogh, à deux dates différentes ... « Nulle autre personne, aujourd’hui, que les deux experts historiens de l’art associés, n’a pu travailler avec les originaux conservés par Franck Baille, mandataire de la famille propriétaire. Personne d’autre n’a pu procéder à l’analyse scientifique et à la recherche documentée effectuées par eux sur ce trésor. Le Van Gogh Museum, par exemple, autre fois alerté, n’a eu entre les mains que des photographies qui ne représentaient pas l’ensemble », avait déjà ré- torqué l’éditeur du Seuil, Bernard Comment, cemardi. Jetant lui aussi le discrédit sur l’institution. « Les attributions d’oeuvre se font souvent au forceps, ce fut le cas d’un tableau de Van Gogh déjà, Coucher de soleil à Montmajour, longtemps contesté, longtemps déclaré comme faux et qui, finalement a été reconnu en 2013 comme vrai. Reconnu par tout le mondeet souvent par les mêmes experts qui l’avaient déclaré comme faux au préalable. Ce fut aussi lecas des Tournesols d’une compagnie d’assurance japonaise… » Et l’imbroglio n’est pas près de se tarir. « On a connu des vicissitudes pendant des années, je ne vais pas m’étendre mais il y aura peut-être un buzz, notamment avec les musées français » , mumure l’auteur de la découverte, le président de l’Hôtel des ventes de Monte-Carlo, Franck Baille.