Cancer etmolécule onéreuse: la situation va se débloquer Actu
L’Agence régionale de santé réagit à notre article alertant sur la situation de malades du cancer dont on arrête le traitement pour des motifs financiers
Hier, nous vous présentions la situation dramatique de Nathalie, une Varoise de 48 ans, atteinte d’un cancer du poumon métastasé et menacée de voir son traitement interrompu, l’établissement ne pouvant plus en assumer le coût. Depuis plusieurs mois, la Polyclinique Saint-Jean de Cagnes-sur-Mer, commeplusieurs autres hôpitaux de la région Paca, attend en effet que les frais engagés pour soigner des malades dans une situation critique lui soient remboursés. Soit, pour cet établissement de taille moyenne, quelque 600000 euros, correspondant au traitement pendant une année de 10 patients par le nivolumab, une immunothérapie dont le prix actuel est aussi exorbitant que ses effetssont spectaculaires chezcertains patients. Quidoit payer la note? Situation quelque peu ubuesque, cette molécule qui a obtenu son autorisationdemisesur le marché n’a toujours pas vu son prix définitif arrêté, celui-ci continuant de faire l’objet de négociations entre l’industriel et le Comité économique des produits de santé (CEPS). En attendant qu’elles aboutissent, le laboratoire est libre d’en fixer le montant, et notre système de santé, basé sur la solidarité, règle la note, après que les établissements ont fait l’avance des frais. Ou plutôt devrait régler la note. Car aujourd’hui, ce règlement traîne dangereusement, accroissant la tension budgétairedans laquelleces établissements se trouvent. Aupoint que certains ont jeté l’éponge et affirment, à l’instar de la Polyclinique SaintJean, ne plus êtreenmesure de traiter leurs malades.
Paiement avant la fin de l’année
Pour comprendre les raisons de ce retard, et les perspectives, nous nous sommestournés vers le débiteur, en l’occurrence l’Agence régionale de santé Paca. Son directeur adjoint, Norbert Nabet, ne nie pas lecaractèretardif des remboursementsmais refuse d’en endosser laresponsabilité. « Pour ces médicaments innovants, la réglementation prévoit effectivement que l’ARS reçoive de l’argent de l’État, grâce aux fameuses “Merri” [dotations budgétaires spécifiques au titre de missions d’intérêt général, Ndlr] qui arrivent par les circulaires budgétaires, deux fois par an, et cette année, elles sont extrêmement tardives. » En cause : la réforme territoriale, les lois de finances et un budget difficilesàboucler… « Nous sommes simplement un tuyau dans ces affaires. On sert juste à faire passer l’argent du budget de l’État à l’établissement, on n’apas l’argent en caisse. On est tous en situation d’attente. Et on ne peut avancer cet argent, même si on sait que ça crée une tension sur la trésorerie des établissements obligés d’avancer l’achat de ces molécules. » Mais il se veut aussi rassurant: « Avant la fin de l’année, ces sommes seront payées aux établissements. » Et il en appelleàl’éthique médicale: « Il n’est pas envisageable une seconde que ça se termine par : “Monsieur, Madame, je ne peuxpas vous donner le traitement, faute de trésorerie.” Tous lesmalades qui peuvent bénéficier de ces molécules innovantes doivent être pris en charge dans un établissement ou un autre en Paca. » Il reste que l’État, qui garde les stigmates de l’affaire Sovaldi– cenouveau traitement contre l’hépatite C que le laboratoire facture 41000 euros (!) – a très peur de lâcher du lest. « Pour le Sovaldi, onaaccusé, en6mois, 1,5milliard de dépenses supplémentaires sur la Sécu, qui ont contraint à faire une loi de finances rectificative. » Concernant les molécules d’immunothérapie contre lecancer, trèsnombreusesàseprofiler, les enjeuxcommerciaux sont bien plus considérables. La santé s’éloigne, c’est le business qui entre en scène.