Français d’Algérie : nouvelle demande de réparation
Cinquante-cinq ans plus tard, une seconde famille du sud de la France réclame une forte indemnité à l’Etat en réparation des préjudices subis du fait de son rapatriement
C’est la deuxième fois, en cinquante-cinq ans, que le conseil d’Etat est saisi d’un pourvoi d’une famille rapatriée d’Algérie en 1962, en vue d’indemnisation de l’Etat pour réparer le préjudice subi. Et pour la deuxième fois, c’est encore deux membres d’une famille du sud de la France qui montent au créneau, avec les mêmes arguments que leurs prédécesseurs. Mais depuis juin 2016, date du premier pourvoi, il existe une jurisprudence, défavorable aux requérants. HieràParis, le rapporteur public du conseil d’Etat s’est logiquement appuyé sur l’arrêt de juin 2016 pour demander le rejet de ce nouveau pourvoi. Avant les « événements », comme on les nomme toujours devant les tribunaux de la République, ceux qui allaient devenir montpelliérains par la force des choses, possédaient plusieurs biens immobiliers à Oran. Ils en ont été dépossédés. Raison pour laquelle ils réclament aujourd’hui à l’Etat la somme de 1 750 000 au titre du préjudice matériel et 100 000 par personne au titre du préjudice moral. Les requérants estiment ainsi que compte tenu de la défaillance de l’Etat algériendans l’indemnisation des ressortissants français rapatriés d’Algérie, il incombait à l’Etat d’indemniser lui-même intégrale- « Le droit ne prévoit pas de réparer une promesse non tenue », prévient un magistrat du Conseil d’Etat.
ment les rapatriés. Autre moyen avancé par la famille « la faute de l’Etat qui n’a pas prévu, lors des accords d’Evian, une période de transition suffisante pour leur permettre de préparer leur retour dans des conditions acceptables ». Enfin, les requérants dénoncent une parole non tenue en décembre 1961, à savoir « la promesse qu’une loi distincte
qui devait fixer, en fonction des circonstances, le montant et les modalités d’une indemnisation en cas de spoliation et de perte définitivement établies des biens appartenant aux Français ayant dû quitter l’Algérie ». Se référant à l’arrêt pris l’an passé, le rapporteur public a au contraire estimé que ces préjudices, que les requérants imputent au contenu des « accords d’Evian », se rattachent à « la conduite des relations entre la France et l’Algérie et ne sauraient, par suite, engager la responsabilité de l’Etat sur le fondement de la faute ». Le magistrat de la haute juridiction a, par ailleurs, indiqué que « les préjudices allégués ne trouvaient pas, en l’espèce, leur origine directe dans le fait de l’Etat français, et que ces accords avaient prévu des mesures de protection de la personne et des biens des ressortissants français installés en Algérie ».
Réparer une promesse non tenue ?
Quant à l’argument faisant état d’une promessenon tenue de l’Etat, en l’occurrence la non-adoption d’une loi de décembre 1961, pourtant prévue, relative à l’accueil et à la réinstallation des français d’outre-mer, le rapporteur public a rappelé « qu’une disposition législative posant le principe de l’intervention d’une loi ultérieure ne saurait constituer une promesse dont le nonrespect constituerait une faute susceptible d’engager la responsabilité de l’Etat ». Comme l’avait subtilement fait remarquer un magistrat l’an passé, « le droit ne prévoit pas de réparer une promesse non tenue » . Décision dans les semaines à venir.