Monaco-Matin

L’Amiral de Grasse et Washington ensemble pour l’Indépendan­ce

- ANDRÉ PEYREGNE

Lorsqu’eut lieu, le 13 mars 1634, l’électionde­s membres de la future Académie française – laquelle devait officielle­ment ouvrir l’année suivante - il n’y eut que vingt-sept écrivains retenus. Lechiffred­equarante n’a été atteint qu’en 1636. Parmi ces vingt-sept premiers élus figurait un écrivain varois, à qui on peut donc attribuer le titrede « premier académicie­n français de notre région » : François d’Arbaud de Porchères. Il est né à Brignoles le 20 décembre15­90. Un autreacadé­micien attachéàno­tre région fit partie de ce premier lot d’élus mais, à la différence d’Arbaud de Porchères, n’yest pasné. Il s’agit d’Antoine Godeau, évêque de Grasse, né à Dreux en 1605, mort à Vence en 1672.

Installé au fauteuil numéro 

François d’Arbaud de Porchères fut installé au fauteuil numéro 19 qui serait par la suite celui de Boileau et de Chateaubri­and et, aujourd’hui, de Jean- Loup Dabadie. Son discours d’intronisat­ion porta sur l’« Amour des sciences ». Il était un homme d’avenir, notre académicie­n brignolais! Brignolais? Cette affirmatio­n est contestée par certains historiens qui le prétendent natif de SaintMaxim­in, toujours dans le Var. La confusion vient du fait que de nombreux membres de la famille

d’Arbaud de Porchères ont vécu à Saint-Maximin. L’un d’eux en a même été maire. La plupart des historiens, cependant, le font naître à Brignoles.

Une amitié avec Richelieu

On sait peu de choses sur sa vie. Ce qui est sûr c’est que, s’étant renduàPari­s, il devint élève du célèbrepoè­teMalherbe - lequel avait également accueilli en 1572 l’écrivain grassois Bellaud de la Bellaudièr­e. Malherbe était si attaché à

ArbauddePo­rchères qu’à sa mort, en 1628, il lui légua la moitié de sa bibliothèq­ue, l’autre moitié allant au poète Racan. Autre personnali­té parisienne à laquelle Arbaud de Porchères fut lié: le cardinal Richelieu, premier ministrede­Louis XIII, fondateur de l’Académie française, qui fit beaucoup pour l’élection d’Arbaud de Porchères et en l’honneur de qui celui-ci écrivit une ode célèbre. On attribue à Porchères l’un des plus célèbres sonnets de l’époque, écrit sur lesyeux de Gabrielle d’Es-

trée – la femmedont le roi Henri IV était amoureux, dont un fameux tableau la montre seins nus avec sa soeur: « Ce ne sont point des yeux, ce sont plutôt des dieux./ Ils ont dessus les rois la puissance absolue./ Dieux ! non, ce sont des cieux ; ils ont la couleur bleue/ Et le mouvement prompt comme celui des cieux./ Cieux ! non, mais deux soleils clairement radieux,/ Des foudres de l’amour signes présagieux… » Est-ce bien lui quiaécrit ce sonnet galant? Làencore ilyades doutes. On ne prête qu’aux riches…Le restede laproducti­on d’Arbaud de Porchères est d’un tout autrestyle, composé de poésies religieuse­s et de la traduction en vers des « Psaumes » de David. Arbaudde Porchères épousa une demoiselle de la Chapelle-Senevoy, dont onne sait si elleavait les yeux de Gabrielle d’Estrée. Il se retira dans ses terres à Senevoy, ancienne seigneurie de l’évêché de Bourgogne, où il mourut à l’âge de 49 ans, fermant ainsi ses yeux au soleil qui l’avait si joliment inspiré: « Flambeau de l’univers, charmant père du jour/ Globe d’or et de feu, centre de la lumière,/ Admirable portrait de la cause première, / Tu fais de la nature et la joie et l’amour ».

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(Photos DR) En , les premiers élus à l’Académie Française rendent hommage à Richelieu, fondateur de l’institutio­n: d’Arbaud est peut- être parmi eux…
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Dans ce tableau célèbre, Gabrielle d’Estrée ( à droite), dont le regard a séduit d’Arbaud, ne montre pas que ses yeux... Le Varois lui a dédié un sonnet.

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