Vieux jetons de casinos: troisNiçois jouent et perdent
Ils ont misé dans des casinos avec d’anciens jetons démonétisés de Beaulieu-sur-Mer. Reconnus coupables d’escroquerie, ils ont été condamnés à de la prison hier à Grasse
Gilles, Frédéric et Brandonn’ont pas le profil des tricheurs professionnels qui écument les tables de jeu. Plutôt l’allure d’étudiants appâtés par la découverte fortuite, disentils, de jetons de casino du groupe Partouche. Des jetons gravés aunomde Beaulieu-sur-Mer, censés avoir été détruits lors de la liquidation judiciaireducasino en octobre 2010. Sauf qu’il y a un hic. Certains jetons ont encore été repérés en janvier dernieràLyon et Aix-en-Provence. Et les trois jeunes Niçois quicomparaissaient hier à Grasse auraient eu entre leurs mains l’équivalent de 127000 euros de ces jetons démonétisés (sur un total de 2,7 millions, selon l’inventaire de liquidateur). Gilles dit avoir acheté une mallette de jetons sur une brocante niçoise pour des soirées « poker » entreamis.
Dans trois casinos de la Côte
Le procureur Julien Pronier se demande encore comment des jetons remisés trois jours dans un coffre-fort, ont pu échapper à ladestruction et se retrouver sur les tapis verts. Gilles, fils de bonne famille, a d’abord contacté le groupe Partouche pour tenterde les échanger. Le casinotier a refusé et l’a invité à les ramener. Le jeune homme a alors tenté le diable en jouant dans un premier tempsdes jetons de petite valeur auPalais de la Méditerranée à Nice. « Vous vous apercevez que ça marche bien. Vous vous dites on va passer à lavitesse supérieure », résume Marc Joando, le président du tribunal correctionnel deGrasse. Aidé de deux copains, Gilles s’enhardit au Palm Beach à Cannes puis à l’Eden Beach à Juan-les-Pins. Il ne sait plus très bien combien il a joué: « Quand ce n’est pas son argent, onne se souvient jamais », ironise leprésident Joando. Le directeur des jeux à Juan repère le trio, intrigué par des jeunes pariant avec des jetons de 500 euros sans passer par la caisse. « Vous êtes interpellés par les policiers d’Antibes, rappelle Marc Joando. Ça se passe très bien, tellement bien que vous êtes remis en liberté. M. le procureur a dû féliciter l’officier de police judiciaire… », ironise le magistrat. Finalement, à la demandeduparquet, le service Courses et Jeux de la police judiciaire place en gardeàvue fin 2016 les trois apprentis flambeurs.
Libres sous caution
A la barre, Gilles fait profil bas, répond d’une voix à peine audible. Il est livreur, ses amis manutentionnaire et maçon. S’ils comparaissent libres, c’est qu’ils ont versé une caution de 3 000 euros. Le procureur Pronier qui lesarenvoyésencomparution immédiate pour escroquerie, fait un parallèle entre « délinquant » et « joueur » : « Même frénésie, même goût du risque... Ils avaient conscience qu’il s’agissait d’une escroquerie. Ils ont voulu jouer, ils ont perdu. » Le parquet requiert 18mois de prison dont 6 mois avec sursis contreGilles, un an de prison dont six mois avec sursis à l’encontre de Brandon, un an avecsursis contre Frédéric. Des peines aménageables qui tiennent compte de la situationdes prévenus qui ont chacun un travail et une adresse. Le tribunal suivra à la lettre les réquisitions, infligeant comme peine complémentaire deux ans de mise à l’épreuve et 3 000 euros d’amende. Me Olivier Bolla, avocat de Gilles, a rappelé que son client, tous comme ses acolytes, n’avaient rien gagné avec ces vrais-faux jetons. Difficile à Partouche, selon Me Revel, de justifier de son préjudice. « Ceux-là ne sont repartis ni avec de vrais jetons ni avec de l’argent. » Le tribunal a pourtant accédé à la demande du Me Sebag, l’avocat du casinotier, qui réclamait prèsde 22 000 euros.