La Roya redoute « lamort » de la ligne ferroviaire
La ligne Nice-Cuneo. Les touristes la connaissent sous l’appellation de Train des Merveilles. Les habitants des vallées, Roya et Bévéra en tête, eux, préfèrent la surnommer « ligne de vie » . Un trainde tous les jours, un tracé vital pour la survie de leur territoire. Depuis des décennies, des association défendent bec et ongles cette ligne, prise en étau entre la France et l’Italie et régie par une convention datant de 1970. Multipliant manifestations et réunions publiques pour informer la population de son devenir, encore flou à l’heure actuelle. Samedi à Breil-sur-Roya, celle du comité de défense francoitalien de la ligne de vie Nice-Cuneo-Vintimille a longtemps tourné autour d’un seul et mêmemot: substitution. Un termeemployé par Christian Estrosi, lors des assises régionales des transports le 2 février à Marseille, quiafait tiquer les défenseurs de la ligne et nourrit de vives inquiétudes.
« Complémentarité », pas « substitution »
Le président de la région Paca affirmait alors dans son discours que les habitants de la région « approuvent la proposition de substituer des cars aux trains. Six habitants sur dix sont prêtsàprivilégier le car au train si leur niveau de service montait en gamme. » Annonçant, dans ce sens, des études lancées pour quatre lignes, dont celle de Breil-Tende. Si le bus doit, logiquement, remplacer le train lors des travaux de sécurisation de ce tronçon (lire par ailleurs), le comité de défense craint que la situation ne se pérennise au-delà. Jusqu’àune suppression pure et simple des arrêts desservant la vallée de la Roya. « On vide les vallées de leurs services publiques, on va ouvrir le nouveau tunnel de Tende, et maintenant on touche au train… La vallée se désertifie, c’est une logique implacable », peste René Dahon, président de l’association, avouant bien volontiers prêcher une « vision paranoïaque » du problème. Dans l’assemblée, Laurence Boetti-Forestier, conseillère régionale élue sur la liste de Christian Estrosi, intervient longuement. « Je ne suis pas pessimiste, ni négative, annonce-t-elle d’emblée, contrastant ainsi avec l’état d’esprit de ses interlocuteurs. Usant d’une sémantique différente, ellepréfèreparlerde « complémentarité » plutôt que de « substitution » . « Cette ligne fait partie de ma vie. Cette étude parledemettre, enplus des créneaux de trains, des bus. Rien n’est arrêté. Je ne laisserai pas tomber cette ligne que je juge fondamentale et prioritaire. C’est un engagement politique. Je suis, pour vous, un atout et un allié. »
« J’ai écrit à maires »
Juste à côté, André Ipert, le maire de Breil-sur-Roya, se montre moins enthousiaste que son ancienne adjointe. « J’ai écrit à 14 maires de la Roya, de la Bévéra et des Paillons pour qu’ils signent une lettre que j’adresserai à Christian Estrosi dans laquelle nous faisons part de notre inquiétude quantàcette substitution. Cela signifie la mort de cette ligne! Les Italiens, qui investissent 29 millions d’euros pour sécuriser la ligne, et peut-être faire passer la vitesse à 80 km/h, ne seront pas d’accord. » « De l’autre côté de la frontière, c’est la révolution. Pour eux, la confiance est trahie, confirme Laurence Sarfati, du comité de soutien. On leur parle d’un bus pour remplacer le train quand eux imaginent la ligne comme un axe international. » Pour l’association, tous les espoirs reposent dans la commission intergouvernementale, où siège Patrick Cesari, qui se réunira en mars prochain afin de réviser une convention que les militants jugent « obsolète » et en défaveur de l’Italie. Et, pourquoi pas, opterpour un groupement européen de coopération territoriale. Qui redonneraitàcetteligne Nice-Cuneo-Vintimille, une stature internationale.