La diagonaledu fou
L’Argentin Marcelo Bielsa sera l’entraîneur de Lille à partir du 1er juillet prochain
Il était un roi dans le sud, le serat-il dans le nord? Moins de deux ans après son départ fracassant de l’OM, l’iconique entraîneur argentin Marcelo Bielsa (61 ans) va faire son retour en Ligue 1 cet été, mais à l’autre bout de la France, à Lille. Officialisée hier, l’arrivée d’El Loco (Le fou) est un gros coup pour la nouvelle équipe dirigeante du Losc, racheté il yaquelques semaines par l’homme d’affaires hispanoluxembourgeois GérardLopez. « Le club lillois et l’entraîneur argentin ont paraphé un accord portant sur une collaboration de deux ans et qui prendra effet le 1er juillet » , a écrit le Losc dans un communiqué. « C’était quelque chose dont j’avais envie dès le départ. C’est un entraîneur qui a sa place dans n’importe quel club au monde, donc, qu’il ait choisi le Losc permet au projet de changer de dimension », s’est félicité Gérard Lopez.
Respecté, adulé
Lopez avait un temps été sur les rangs pour le rachat de l’OM, mais c’est finalement Lille qu’il a repris avant d’y attirer Bielsa, hissé au rang d’idole par le Vélodrome en l’espace d’une saison (2014-15). L’hypothèse de l’arrivée de l’Argentin sur le banc lillois, inimiginable pour certains observateurs au départ, était devenue de plus en plus crédible ces derniers jours. Mardi, Franck Passi, l’ancien adjoint de BielsaàMarseille, a été nommé entraîneur pour la saison en cours, une manière de préparer le terrain à l’Argentin. Lequel a assisté vendredi et samedi à des matches de l’équipe des moins de 19 ans et de la réserve évoluant en CFA. L’officialisation est survenue au lendemain d’une victoire à Caen (1-0). Malgré un palmarès maigre, Bielsa est un tacticien respecté par ses pairs pour son jeu flamboyant et adulé par les supporters partout où il est passé, des Newell Old Boy’s (1990-92) où le stade de Rosario porte son nom, à l’OM, en passant par à l’Athletic Bilbao (2011-13). C’est donc une prise de choix non seulement pour Lille mais aussi pour la L1, décidée à devenir un championnat de plus en plus compétitif face à ses voisins européens. « Il est connu pour aimer la formation et il va faire progresser les jeunes, qui seront formés aussi par les cadres, espère de son côté l’ancien président des Dogues Devils Nicolas Gallois. Je ne m’enflamme pas non plus car son départ a laissé des tracesàMarseille. Il ne faudrait pas qu’il fasse la même chose à Lille...»
Deux facettes
De fait, les volte-face et les ruptures passées de l’imprévisible et pointilleux Argentin incitent à la prudence. Il avait ainsi donné son accord aux dirigeants de la Lazio Rome en juillet 2016 avant de démis- sionner deux jours plus tard. De quoi redouter un revirement de dernièreminute ? « Du tout ! Je connais Marcelo depuis un moment et s’il a claqué des portes ou qu’il n’est pas allé à des endroits, c’est qu’il avait des raisons » , assure Lopez. Pas sûr que les supporters de l’OM soient dumêmeavis. Bielsa les avait stupéfaits en démissionnant en août 2015 après le premier match de la saison, pour des désaccords avec les dirigeants d’alors. Toujours les deux facettes de Bielsa. D’un côté, le football séduisant, les joueurs transcendés et les supporters enthousiastes. De l’autre, les résultats pas toujours au rendezvous, à commencer par une retentissante élimination dès la phase de groupes de la Coupe du monde 2002 pour «son» Argentine, pourtant emmenée par Veron, Crespo ou Batistuta. Résultat, le palmarèsdece fils d’une riche famille d’intellectuels et d’hommes politiques se réduit à trois championnats d’Argentine (1991, 1992, 1998), une médaille d’or aux JO (2004) et quatre finales, toutes perdues, en Copa Libertadores avec Newell’s (1992), enCopa America avec l’Argentine (2004), en Ligue Europa et Coupe d’Espagne avec Bilbao (2012). Un piètre CV qui lui vaut d’être souvent critiqué. Il peut toutefois se targuer d’avoir inspiré des entraîneurs qui ont, eux, atteint des sommets: Jorge Sampaoli, Diego Simeone, Mauricio Pochettino et surtout Pep Guardiola. Qui, en 2012, avait assuréque Bielsa était tout simplement le « meilleur entraîneur de la planète » . Car chez ses confrères aussi, l’Argentin déchaîne les passions.