Monaco-Matin

VENDÉE GLOBE Destremau : jour de gloire

Après avoir bouclé son tour du monde dans la nuit de vendredi à samedi en plus de 124 jours, le Toulonnais, 18e et dernier de la course, a été accueilli aux Sables-d’Olonne en héros

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Ah, ça valait le coup d’attendre ! Après 124 jours, 12 heures, 38 minutes et 18 secondes, Sébastien Destremau en a terminé avec son premier Vendée Globe. 50 jours après le grand vainqueur Armel Le Cleac’h, qui a pulvérisé, en 74 jours, 3 heures et 35 minutes, le record jusque-là détenu par François Gabart. Mais hier, la foule, qui a déferlé en moins d’une heure sur les digues du fameux chenal des Sables, a réservé au 18e et dernier de ce 8e tour du monde en solitaire un accueil aussi impression­nant, aussi émouvant, qu’à celui qui avait franchi la ligne le 19 janvier dernier. De l’aveu de tous les observateu­rs, de la presse à l’organisati­on. Sous un fabuleux soleil printanier, le Toulonnais a même squatté, en direct, l’ouverture de quasiment tous les journaux télévisés ! Et, en excellent showman qu’il est, n’a pas raté l’occasion de faire grimper encore sa popularité. Sébastien Destremau a fermé le bureau des océans. Non sans avoir pleuré. À chaudes larmes. Quand le vent soufflera, il repartira. En attendant, il raconte...

Avez-vous le sentiment d’être un miraculé ? Quand même pas. Mais c’est malgré tout un petit miracle d’avoir terminé. En même temps, j’ai juste emmené mon bateau d’un point A à un point B. En fait, ça doit être plus compliqué de le gagner, ce Vendée. Votre dernière nuit à bord? Elle s’est super bien passée. Je n’ai juste pas dormi une seconde et je n’avais déjà pas dormi la nuit précédente. J’ai comme un petit déficit de sommeil... Votre arrivée a traîné en longueur, ce fut dur à gérer ? Pas vraiment. Couper la ligne de nuit, c’est magique, ça rajoute de la beauté au truc. Et ça m’a permis d’avoir un break avant la remontée du chenal. Mais je me serais bien passé, si près des Sables, de me prendre un filet. Un filet ? Oui. Je marchais super bien et d’un coup, le bateau a ralenti. J’entendais du bruit contre la coque. C’était un filet de pêche. Coup de chance, après quelques manoeuvres, il s’est détaché. Et ce fut la délivrance... Sauf que tu coupes la ligne et tu es happé par ton équipe et les médias qui montent à bord. Tu n’as pas le temps de te laisser happer par les émotions. Pas une larme ? Allez, je l’avoue : j’ai pleuré pas mal. Mais ça ne se voit pas la nuit... En revanche, de jour dans le chenal, c’est visible... Imaginez que tous ces gens étaient là pour moi. C’est pas mal, ça calme. J’avais bien envie de faire le con, mais non. J’ai savouré. Savouré cette place... Le nul, vous voulez dire (rires). Cette place, elle peut se transforme­r en victoire. Elle a du sens ! Pourtant, certains skippers ont été très critiques à votre égard... Ces messieurs ont tenu des propos déplacés. Ils auraient dû se retirer avec grâce bien avant. J’ai un avis sur eux, sur leurs propos, mais ne me le demandez pas... Vous avez en tout cas été fidèle à l’esprit du Vendée Globe... C’est une course, mais pas que. La bataille entre Armel et Alex (Le Cléac’h et Thompson, Ndlr) aété fabuleuse. Mais si le Vendée ce n’était que ça, ça se saurait. Et je vais plus loin : ce serait sa fin ! Alors qu’avec vous, le public a été servi. Surtout que vous êtes parti sans rien ! Pas de musique, pas de clopes, pas d’alcool, pas de bouquin et pas de femmes ! Je ne voulais pas être pollué par des trucs de terrien et je suis vachement content de l’avoir bouclé comme ça. Et puis, avec rien, tu es comme un enfant qui s’ennuie : il crée. Alors tu chantes, tu écris, tu inventes des vidéos, tu t’amuses, tu pleures... Et parfois, ‘’tu’’ as peur... Je ne parlerais pas de peur. Mais c’est vrai que dans l’océan Indien, j’en ai bavé. Le bateau s’est presque retourné. Je me suis cassé des côtes et j’en passe. C’est un océan de m... Ou peut-être que je ne sais pas y naviguer. C’est passé. Désormais, c’est le monde des terriens... On verra pour la réadaptati­on. Quatre mois sans portable, c’est pas mal. C’est même un bonheur. Je sais juste que Trump a été élu et que Fillon a des emmerdes. On continue avec TechnoFirs­t - faceOcean. C’est sûr. Avec l’objectif de gagner le Vendée Globe en . Il y a un projet. Je ne serai peut-être pas le skipper en revanche. Et  ? Je pense qu’il faudra faire cette édition. Avant, il y a la Jacques-Vabre aussi. Mais, là encore, ce ne sera pas forcément moi à la barre. Tout est possible. J’ai plein d’idées. Toujours en Imoca ? Peut-être pas. Un truc en Ultime me tente. J’aimerais bien aussi, pour , aider l’équipe de communicat­ion du Vendée ou une chaîne de télé à aller chercher les bonnes infos auprès des skippers. Pas celles qui concernent la course, les milles gagnés, mais celles propres aux humains. Moi, personne dans l’organisati­on ne m’a demandé combien de fois j’avais pleuré. Elle vous a changé, cette odyssée autour du monde ? J’ai découvert des ressources en moi que je n’imaginais pas. Je sais aujourd’hui que je peux me relever. Et enfin, c’est étrange, mais je n’ai pas l’impression de l’avoir fait. C’est comme si c’était un autre qui était sur le bateau. Qui a su bricoler, naviguer, étudier la météo. C’est un drôle de sentiment. Très fort.

Le classement 1 A. LE CLEAC’H (FRA) 74j 3h35’46’’ 2 A. THOMSON (GBR) 74j 19h35’15’’ 3 J. BEYOU (FRA) 78j 6h38’40’’ 4 J. DICK (FRA) 80j 1h45’45’’ 5 Y. ELIES (FRA) 80j 3h11’09’’ 6 J.LECAM(FRA) 80j 4h41’54’’ 7 L. BURTON (FRA) 87j 19h45’49’’ 8 N.FA (HON) 93j 22h52’09’’ 9 E. BELLION (FRA) 99j 4h56’20’’ 10 A. BOISSIERES (FRA) 102j 20h24’09’’ 11 F. AMEDEO (FRA) 103j 21h01’00’’ 12 A. ROURA (SUI) 105j 20h10’32’’ 13 R. WILSON (USA) 107j 0h48’18’’ 14 D. COSTA (ESP) 108j 19h50’45’’ 15 R.ATTANASIO (FRA) 109j 22h04’00’’ 16 C. COLMAN (NZL) 110j 1h58’41’’ 17 P. HEEREMA (HOL) 116j 9h24’12’’ 18 H.DESTREMAU(FRA) 124j12h38’18’’

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(Photo AFP) Sébastien Destremau a remercié la foule. Demain ?

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