Nice: ans de prison à une automobiliste « meurtrière»
Une commerciale de 35 ans qui boit trop a tué un homme, l’été dernier à La Trinité, au volant de sa Fiat 500, et blessé deux autres personnes. C’est aussi l’histoire d’une autodestruction
Je suis une meurtrière. Je sais ce que mes excuses ne valent rien mais sincèrement, je m’excuse… » Aurélia Giglione, commerciale de 35 ans, est incarcérée depuis le 29 juin 2016. Ce jour-là, vers 23 heures, complètement ivre au volant de sa Fiat 500, elle a zigzagué tous feux éteints avant de percuter de plein fouet le pilote d’un scooter sur la Pénétrante du Paillon.
« Elle n’a pas détruit qu’une vie »
Christophe Parnet, un ingénieur de 53 ans, rentrait chez lui à Sclosde-Contes. Il a été tué sur le coup. Son corps s’est retrouvé sous la voiture d’une autre conductrice Michèle. Elle aussi blessée, comme sa fille de 8 ans, dans cette effroyable collision. Aurélia, 2 g d’alcool dans le sang, était sous le coup d’une annulation de son permis de conduire. Elle roulait trop vite, sans assurance. La présidente Laurie Duca remarque, sobrement: « Vous n’avez pas laissé à Christophe Parnet la moindre chance .» Larmes aux yeux, mouchoir serré, cette petite blonde, dans un élégant tailleur, sanglote : « J’ai détruit une famille. Je ne voulais pas… » Les témoins du drame décrivent une femme sentant l’alcool, hystérique, insultante envers des gendarmes exemplaires de sang-froid. Rien à voir avec cette femme dans le box visiblement rongée par les remords.
Roulette russe
Mathieu, 23 ans, le fils unique de la victime, évoque avec pudeur un père formidable, « un épicurien, apprécié de tous ». « Elle n’a pas détruit qu’une vie…», ajoute le jeune homme encore étudiant. Michèle, l’automobiliste qui s’est retrouvée impliquée malgré elle dans la tragédie, soutenue par Me Ribeiro de Carvalho, souligne, d’une voix tremblante les dégâts psychologiques qu’elle supporte au quotidien. Sa fille, âgée de 10 ans, victime récemment d’un accident vasculaire cérébral. Comme si cet accident de la route produisait des malheurs en cascade. Dans une ambiance lugubre, Me Christophe Petit, l’avocat de la famille Parnet, s’interroge sur la qualification juridique d’homicide involontaire : «N’est-on pas entre le volontaire et l’involontaire ? Elle a joué à la roulette russe et c’est tombé sur Christophe Parnet, un citoyen ordinaire condamné à mort. » Le procureur Marie-Eve Parant note que « toutes les circonstances aggravantes sont réunies même si les conséquences dramatiques de l’accident n’ont pas été souhaitées par Mme Giglione. » La voix de l’accusation requiert sept ans de prison dont trois ans ferme. En défense, Me Thierry Fradet ne peut se raccrocher «qu’au parcours de vie très compliqué » d’Aurélia Giglione. Sa dépendance à l’alcool est née avec le décès de son père adoptif, il y a quatre ans. La conductrice sera condamnée à cinq ans de prison dont deux ans avec sursis et trois ans de mise à l’épreuve. Une peine qu’accepte sans broncher Aurélia Giglione, Madame Tout-le-monde devenue « meurtrière », illustration insupportable de la violence routière ordinaire.