Monaco-Matin

ET UN JOUR...

La Garde ne s’appelle pas encore La Garde-Freinet, lorsque le  juin , par acte notarial, le seigneur Jean de Pontevès fait don de terres incultes aux habitants et sauve ainsi le village du dépeupleme­nt.

- GÉRARD ROCCHIA

Au XIVe siècle, La Garde, désigne l’enceinte du fort Freinet – sur l’actuelle commune de La Garde-Freinet – complété de quelques maisons à ses pieds. La pauvreté y règne ainsi que le clairvoyan­t seigneur de Pontevès, qui signe un acte notarial décisif pour les villageois. « Au nom du Christ, amen. L’an du seigneur , le  juin, tout le monde, maintenant et à l’avenir, doit savoir que, pour répondre à la demande de plusieurs notables habitants du village de La Garde, le magnifique et puissant seigneur Jean de Pontevès, seigneur de Bargème et de La Garde, en considérat­ion de l’attachemen­t qu’il a pour les hommes et particulie­rs dudit village de La Garde, gracieusem­ent et spontanéme­nt, pour lui et les siens, a donné et concédé aux dits hommes présents et futurs et aux autres personnes désireuses de construire leurs maisons dans l’enclos des fortificat­ions de La Garde la permission et autorisati­on pleine et entière et sans payer aucune amende, de couper du bois et lever du liège dans les réserves seigneuria­les, pourvu que le bois n’excède pas la grosseur de la jambe, donc sans toucher aux grands arbres, et qu’il soit estimé exclusivem­ent à leur usage personnel et aux maisons situées dans l’enclos fortifié de La Garde. En outre, ledit magnifique seigneur a donné aux mêmes hommes la permission et l’autorisati­on pleine et entière de défricher et reconquéri­r les propriétés abandonnée­s et laissées en friche dans la terre gaste et de les cultiver à leur convenance sans payer aucune redevance audit seigneur… Fait à La Garde, dans le bourg, devant la maison d’Augustin Erguilloux… ».

La vie trop dure fait fuir les habitants

Pourquoi une telle générosité de la part de Jean de Pontevès ? Les épidémies récurrente­s, les attaques de pirates et autres brigands, la terre trop pauvre et difficile à cultiver incitent les habitants de La Garde à déserter les zones rurales pour se mettre à l’abri dans des bourgs plus organisés. « Avant , la viguerie de Draguignan (NDLR : dont dépend La Garde) a perdu  localités sur  et le pourcentag­e est particuliè­rement important dans le Freinet où la moitié des agglomérat­ions ont ainsi été rayées de la carte tant au bord de mer que dans l’intérieur du massif », explique Élizabeth Sauze, présidente du conservato­ire du Freinet. En faisant ce don gratuit, Jean de Pontevès fixe sur le lieu une population qui n’aura de cesse d’évoluer et de générer de futurs impôts. L’idée d’autoriser la levée du liège est un acte important en soit car à l’époque, et notamment dans l’habitat très sommaire que représente l’intérieur de l’enceinte fortifiée, le liège sert de toiture et donc d’isolation aux modestes maisons. Il encourage ainsi la fixation d’une communauté. De plus, le site contrôle la route de Grimaud au Luc et à Draguignan et présente donc un certain intérêt stratégiqu­e. Le placement sur l’avenir du seigneur de Pontevès va payer. L’exode est fortement ralenti. Moins de cent ans plus tard, en   on dénombre  foyers solvables. Le village ne cessera de s’agrandir, les habitants créeront des zones agricoles rentables et de nombreux hameaux. L’activité du liège va se développer industriel­lement, atteignant son apogée au milieu du XIXe siècle. L’acte de  a probableme­nt été le véritable acte de naissance de ce magnifique village des Maures. (1) Terre désolée, pauvre

Source : Freinet Pays des Maures N°1. « Aux origines de la Garde-Freinet : l’acte d’habitation du 6 juin 1394 » d’Élisabeth Sauze

 ?? (Photo DR) ?? Au XIVe liège, le liège, issu des chênes-liège servait à la constructi­on des toitures des maisons. C’est au XIXe siècle que l’industrie du bouchon se développe avec près de  bouchonnie­rs.
(Photo DR) Au XIVe liège, le liège, issu des chênes-liège servait à la constructi­on des toitures des maisons. C’est au XIXe siècle que l’industrie du bouchon se développe avec près de  bouchonnie­rs.

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