Mediator: vers un grand procès pour Servier et l’Agence du médicament
Après plus de six ans de bras de fer judiciaire, le grand procès du Mediator devrait bien avoir lieu: le parquet a demandé hier le renvoi en correctionnelle des laboratoires Servier pour «tromperie aggravée, escroquerie, blessures et homicides involontaires et trafic d’influence», et de l’Agence du médicament pour «blessures et homicides involontaires ». S’il a lieu, il se tiendra toutefois en l’absence du principal protagoniste, Jacques Servier, fondateur des laboratoires, mort en 2014 à 92 ans. Si les juges d’instruction, qui enquêtent depuis février 2011 sur ce dossier tentaculaire, devaient suivre les réquisitions du parquet, dix autres personnes morales (essentiellement des sociétés de la galaxie Servier) ainsi que quatorze personnes physiques seront renvoyées en correctionnelle. Parmi ces dernières, l’ancien numéro deux du groupe Jean-Philippe Seta, des fonctionnaires, des médecins ou encore l’ex-sénatrice Marie-Thérèse Hermange (UMP), soupçonnée d’avoir rédigé en 2011 un rapport favorable à Servier.
Dissimulation
Consommé pendant plus de 30 ans par cinq millions de personnes en France, le Mediator, un antidiabétique largement détourné comme coupe-faim, a été retiré du marché en novembre 2009. Il pourrait être responsable sur le long terme de 500 à 2 100 décès. Au terme de son réquisitoire de 597 pages, le parquet estime que les laboratoires ont dissimulé son caractère anorexigène et n’ont pas signalé les risques d’hypertension artérielle pulmonaire, une pathologie rare incurable, et ceux de graves lésions des valves cardiaques (valvulopathies) qui lui étaient imputables. « C’est un immense soulagement », a réagi Irène Frachon, la pneumologue qui a révélé le scandale.