Monaco-Matin

La fin du cycle soixante-huitard

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La tempête Macron, qui souffle sur les élections législativ­es, confirme le séisme politique en cours depuis l’élection présidenti­elle. Elle jette à terre les partis traditionn­els et remet en cause le débat droite-gauche qui structure notre vie publique depuis la création de la Ve République. Sans pour autant, cependant, dessiner l’avenir politique du pays. Il est évident qu’au fil des mois se reconstrui­ront une ou plusieurs opposition­s qui finiront par incarner une alternance lorsque viendra le temps inévitable des difficulté­s gouverneme­ntales. Bref, le débat politique anesthésié par le succès d’« En marche ! » renaîtra un jour ou l’autre. Le terreau est, d’ailleurs, là : c’est le système électoral qui transforme la victoire macronienn­e en triomphe, pas la réalité des urnes ! « La République en marche ! » (REM) n’a rassemblé, en effet, au

er tour sur son seul nom que    électeurs sur    inscrits, soit , %. Quatre points de moins qu’Emmanuel Macron au er tour de la présidenti­elle. Nul doute, d’ailleurs, que le chef de l’État ait conscience de cette situation tant il a fait preuve de lucidité depuis qu’il s’est lancé à l’assaut de l’Élysée. Si ce scrutin ne referme donc pas de manière définitive le débat politique, en revanche, il clôt sans appel possible le cycle ouvert en . C’est toute la génération des baby-boomers qui quitte une scène publique qu’elle monopolise depuis bientôt un demi-siècle. Elle s’est accrochée au pouvoir, à l’image de Ségolène Royal ne comprenant pas qu’on ne la maintienne pas à la tête de son ministère lors de la formation du nouveau gouverneme­nt en mai ! Les soixante-huitards sont, aujourd’hui, priés de laisser la place. Ils ne reviendron­t plus jamais au pouvoir. Ils peuvent parler, commenter, s’indigner, pleurniche­r, en fait, pour tous ou presque, l’heure de la retraite a sonné. Cette vérité brutale va bien au-delà de la question de leur âge ou de leur usure politique. C’est tout ce qu’ils ont incarné qui est à présent remis en cause. Au premier chef, leur contestati­on du principe d’autorité et cette liberté absolue qu’ils revendiqua­ient avec le fameux slogan : « Il est interdit d’interdire. » Emmanuel Macron déchire cette page d’histoire en imposant une présidence jupitérien­ne, qui se moque des exigences de la presse, qui demande à ses députés d’être des godillots, qui fait passer dans le droit commun des mesures prévues jusque-là exclusivem­ent en période d’état d’urgence.  ans après mai , c’est une sorte de révolution conservatr­ice qui se met en marche, au nom du principe d’efficacité. Il est vrai que les soixante-huitards l’ont eux même bien préparée en reniant au fil des ans, pour se maintenir au pouvoir, toutes leurs conviction­s d’autrefois. Les voici sanctionné­s pour leurs excès de jadis et pour tous leurs reniements.

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Par DENIS JEAMBAR

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