Monaco-Matin

L’agresseur à la clé à molette relaxé

- JEAN-MARIE FIORUCCI

On a eu beau rappeler l’affaire à peu de jours d’intervalle ! L’agresseur, jugé pour avoir frappé le directeur du restaurant « Bagatelle » à coups de clé à molette, a été reconnu irresponsa­ble de ses actes. Sur la base d’un rapport d’expertise psychiatri­que, les juges du tribunal correction­nel ont relaxé cet Antibois, célibatair­e et sans profession. En état de démence au moment des faits, il ne pouvait pas être déclaré pénalement responsabl­e. À l’issue de la décision, il devrait faire rapidement l’objet d’une hospitalis­ation d’office dans un service spécialisé du CHPG. Brièvement, cet homme de trentedeux ans était interpellé par les policiers devant « Le Métropole », le mardi 4 juillet, vers 14 h 15. À la suite d’une remarque obligée sur l’interdicti­on de fumer son cigare à l’intérieur du restaurant, il avait frappé le responsabl­e de l’établissem­ent situé dans la galerie Charles-III avec la fameuse clé qu’il aurait trouvé entre le coussin et la banquette. Placé en garde à vue, l’agresseur comparaiss­ait une première fois, menotté, vendredi dernier selon la procédure de flagrant délit. Il restait incarcéré à la maison d’arrêt, le temps que soit pratiquée l’expertise (voir MonacoMati­n du lundi 10 juillet 2017). Il n’aurait pas pu s’opposer à une « irrésistib­le pulsion » ?

La partie civile n’y croit pas

Hier après-midi, dès le début de l’audience, la partie civile, représenté­e par Me Thomas Giaccardi, n’y croit pas et s’étonne de la décision médicale. « Nous ne sommes pas convaincus du résultat. En adoptant un tel comporteme­nt, ce personnage n’essaiet-il pas d’éviter une condamnati­on ? De s’en tirer à bon compte ? Il ne reconnaît pas l’acte de préméditat­ion ! Il est souhaitabl­e d’engager une contre-expertise avec un collège d’experts? La victime, conduite au centre hospitalie­r Princesse-Grace en urgence, s’est vue attribuer trente jours d’ITT ! » Ces arguments ne feront pas vaciller la conception du président Florestan Bellinzona sur les circonstan­ces retenues. Il se livre alors à un interrogat­oire ne laissant aucunement le temps de la réflexion au détenu dans le box. Question de vérité ! Rien ne variera des précédente­s réponses… « La clé à molette ? – Je l’ai trouvée sur place ! – La victime assure qu’il n’y avait rien. Vous êtes venu avec ? – Vous savez, il n’y a pas grande monde qui se balade avec un tel outil. – La partie civile considère que vous vouliez en découdre avec le directeur. – Non, je n’ai pas le même sentiment… – Pourquoi le plaignant pouvait-il vous en vouloir ? – J’ai imaginé le pire et ressenti que quelque chose allait m’arriver. – Vous êtes médecin ? – Non ! Cet homme me voulait du mal! J’arrive à lire dans les intentions des gens… »

Manipulate­ur ou malade ?

Du côté du demandeur, on repart alors à la charge en affirmant qu’une photo d’un établissem­ent, où travaillai­t la victime avait été postée sur Instagram le jour de l’agression. Suivi d’un rappel des faits sans lâcher la préméditat­ion ! La nuance est importante… « A-t-il réussi à abuser le psychiatre ? s’interroge l’avocat. S’il est véritablem­ent schizophrè­ne, avec un collège d’experts, on saura la vérité. » Côté ministère public, on n’apprécie pas trop la façon de douter d’une décision d’expert de confiance. « Ai-je en face un grand manipulate­ur ? Aucun élément objectif le prouve et je ne vois pas l’intérêt de faire un autre examen. Déclarez le prévenu irresponsa­ble et procédez à son internemen­t. » Si la défense reconnaît des conséquenc­es dramatique­s, elle estime que «son client n’est pas un démon, assure l’avocat Thomas Brezzo. Ou alors, ces diables sont plutôt dans sa tête. On ne saura jamais si la clé était là! Aujourd’hui, ce malade est soulagé de pouvoir se soigner afin d’arrêter d’obéir à des forces surnaturel­les… Prononcez son irresponsa­bilité.» Le tribunal suivra les réquisitio­ns du ministère public et ordonnera la relaxe.

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(Archive photo N.-M.)

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