Département et Métropole : un avenir sous haute tension
Emmanuel Macron souhaite que ces entités fusionnent là où elles partagent un même territoire. Dans les Alpes-Maritimes, cette volonté va se heurter pour l’instant à la rivalité Estrosi - Ciotti
C’est l’un des objectifs d’Emmanuel Macron: diminuer le nombre d’élus locaux, en allégeant le millefeuille territorial. Dès avant la présidentielle, il avait assumé ce choix face aux grands élus départementaux : la réduction « du nombre de Départements d’un quart à l’horizon 2022 » .En les conservant dans les zones rurales, mais en les supprimant là où ils doublonnent avec des Métropoles, « vrais pôles de croissance » de demain. Le chef de l’Etat ne veut toutefois pas d’un «big-bang territorial» et préfère laisser les collectivités avancer elles-mêmes leurs pions. Il les a ainsi encouragées, lundi, «à supprimer les niveaux inutiles sur la base du volontariat ». Lors de son discours de politique générale, le Premier ministre Edouard Philippe avait de son côté posé le principe de ne conserver que deux échelons en dessous de la Région. Dans cette perspective, les AlpesMaritimes constituent un cas d’école : le Département et la métropole Nice Côte d’Azur y cohabitent entre la Région et les communes.
Le modèle lyonnais
L’idée serait donc que la Métropole absorbe le Département, ce dernier ne subsistant qu’hors des territoires sous la coupe de la Métropole. Cette dernière regroupe environ 50 % de la population maralpine, soit quelque 550 000 habitants sur près de 1,1 million. Ce modèle est celui testé depuis deux ans et demi dans le Rhône où la métropole du Grand Lyon, qui était jusqu’il y a peu présidée par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, a hérité des pouvoirs du Département sur un périmètre de cinquante-neuf communes. Christian Estrosi, président de la métropole NCA, verrait évidemment d’un bon oeil un tel schéma se dupliquer dans les Alpes-Maritimes. « Nous avons été la première Métropole créée et nous avons déjà récupéré la responsabilité des routes et du transport scolaire sur notre territoire. Ce serait la suite logique », souligne-t-il. L’enthousiasme est naturellement bien moindre dans les couloirs du conseil départemental. Un proche d’Eric Ciotti jauge ainsi «qu’une fois les charges transférées, une fusion ne générerait pas des économies significatives. Pour cela, il faudrait aller au bout de la logique et supprimer carrément le Département. Mais les intercommunalités de l’ouest, Casa et Pays de Lérins, ne paraissent pas encore assez fortes pour s’y substituer, sauf à fusionner entre elles ». Au Grand Lyon, le chef de file de l’opposition LR, FrançoisNoël Buffet, estime pour sa part l’expérience au milieu du gué, évoquant une continuité territoriale parfois bancale et une capacité d’investissement encore restreinte.
Une affaire d’hommes
Dans les Alpes-Maritimes, une éventuelle fusion est aujourd’hui compliquée par la guerre plus que larvée entre Christian Estrosi et Eric Ciotti. Dans la mesure où Emmanuel Macron tient à une réforme qui ne soit « ni mécanique ni unilatérale, qui ne réponde pas à une logique administrative mais à des projets territoriaux», rien ne pourra s’ébaucher tant que le climat entre les deux hommes ne sera pas apaisé. Et ça n’en prend pas le chemin puisqu’ils s’écharpent allégrement par presse interposée, cette semaine encore. Et même lorsque CharlesAnge Ginésy, son successeur potentiel, lui aura succédé, Eric Ciotti gardera les rênes du groupe majoritaire à l’assemblée départementale C’est dire si la refonte territoriale s’annonce, ici, comme une sacrée gageure. 1. Touché par la loi sur le non-cumul des mandats, Eric Ciotti peut pour l’instant continuer à présider le Département, tant que deux recours déposés contre son élection de député n’auront pas été tranchés.