Monaco-Matin

Jazz à Juan: un sacré final!

- LIONEL PAOLI lpaoli@nicematin.fr

Conduits par Jimmy Carter (debout), membre du groupe depuis… , les Blind Boys of Alabama ont offert un superbe concert de clôture à l’édition  de

Mais enfin, Georges, c’est quoi ce binz ? C’est qui, ces trois Stooges ? Où qu’ils sont, les chanteurs ? » Georges ne répond rien. Il observe les trois silhouette­s juvéniles qui expriment leur foi sur la scène de Jazz à Juan. La lèvre tombante, mains croisées sur le ventre qui déborde de son short, il borborygme entre ses dents : « J’sais pas, Émilie. J’entrave que dalle ! » Georges et Émilie n’étaient sans doute pas les seuls, hier soir dans la Pinède-Gould, à ignorer que le concert gratuit de clôture du festival est toujours précédé d’une célébratio­n oecuméniqu­e. Trente minutes de lectures et de témoignage­s chrétiens («Nous nous sommes mariés en avril dernier, avec la certitude qu’il y aurait toujours un berger pour nous guider sur le chemin... ») Entre chaque prise de parole, les Blind Boys of Alabama offrent un gospel. Les chanteurs aveugles sont dirigés par Jimmy Carter, membre fondateur du groupe créé en... 1939. Il chevrote un peu, mais sa voix reste puissante et son enthousias­me intact. Georges apprécie en se grattant les cuisses : «Ils ne sont pas de toute jeunesse, mais ils balancent encore du lourd, les papys ! » It’s Praying Time Again, puis Down By The Riverside lui arrachent des sifflement­s admiratifs. Puis les quatre interprète­s s’éclipsent. Entracte. Un garçonnet s’étonne : « Où ils vont, les messieurs ? » Georges le toise avec mépris : « Ben, à ton avis ? Ils vont se coucher. Ce sont des vieux, ils sont fatigués. Maintenant, j’espère qu’on va avoir quelques matrones qui vont nous chanter “Happy Days”... » Raté. Un quart d’heure plus tard, le même quatuor reprend sa place. Et dès lors, pendant plus d’une heure, effectivem­ent, ils « balancent du lourd ». Un chapelet de titres imparables (Higher Ground, There Will Be A Light...) qui flirtent parfois avec le rock et même – sacrilège ! – avec le rythm n’ blues. Le public adore. Georges aussi. Même s’il ne comprend pas tout. Mais c’est sans importance; la musique, heureuseme­nt, ne s’adresse pas seulement à l’esprit. Elle parle d’abord au coeur.

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(Photo Sébastien Botella) Jazz à Juan.

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