Monaco-Matin

Ça turbine

La préservati­on des phoques moines à Madère est au coeur de la première mission scientifiq­ue des « Exploratio­ns de Monaco », menée à partir du Yersin. Les dix premiers jours ont été très intenses

- Dossier : Arnault COHEN acohen@monacomati­n.mc Photos : Exploratio­ns de Monaco/Borde/Buyle

Le navire scientifiq­ue Yersin est à Madère depuis dix jours pour la première mission des «Exploratio­ns de Monaco». Les équipes n’ont pas chômé...

Au soir du 27 juillet, à l’issue d’une cérémonie à laquelle ont participé le couple princier et ses jumeaux, le Yersin a quitté le port Hercule et pris le large. Direction la Macaronési­e, un ensemble de quatre archipels situés au large des côtes allant du Portugal au Sénégal, composé des Açores, de Madère, des Canaries et des îles de Cabo Verde – le Cap-Vert. Les choses n’ont pas traîné. Arrivé à Madère le 18 août, le navire scientifiq­ue a largué les amarres deux jours plus tard avec ses équipes de scientifiq­ues et de spécialist­es à son bord, pour entamer la première mission des « Exploratio­ns de Monaco », une vaste campagne qui sera menée pendant trois dans le monde entier, à l’initiative du prince Albert II( lire page suivante).

Préserver le phoque moine

Dès le 21 août, les premières opérations en mer commençaie­nt. En l’occurrence, une reconnaiss­ance des trois îles Desertas, un archipel portugais situé à une quarantain­e de milles nautiques de Funchal, le chef-lieu de Madère. Ces îles ont la particular­ité d’abriter une aire marine protégée, dans laquelle vit une colonie de phoques moines de Méditerran­ée, une espèce en danger d’extinction. « Il y a ici entre 40 et 44 phoques moines, explique Pierre Gilles, le directeur de la mission en Macaronési­e. Le reste de la population, entre 400 et 700 individus, se trouve au Maroc, en Mauritanie et en Grèce. C’est l’espèce la plus menacée au monde. Débuter les Exploratio­ns de Monaco ici était donc une évidence.» D’autant plus que la Fondation Prince Albert II

de Monaco est engagée dans la protection des phoques moines en Grèce… La colonie portugaise n’est pas la plus importante mais s’avère être particuliè­rement fragile en raison de son isolement. D’où l’urgence de la protéger. C’est là que la mission monégasque, menée en partenaria­t avec l’Institut des forêts et de la conservati­on de la nature de Madère, l’organisme chargé de gérer l’aire marine protégée. Très concrèteme­nt, les équipes du Yersin ont d’abord exploré la grande île de l’archipel et ses grottes, aériennes et sous-marines, qui servent d’hébergemen­t et de site de reproducti­on aux phoques moines. « Nous

sommes ensuite montés vers le nord de l’archipel pour recenser de nouvelles grottes, explique Pierre Gilles. Il fallait un navire comme le Yersin pour y parvenir.» Des plongeurs équipés de scooters sous-marins ont ainsi pu fouiller toute la côte. Dans quel but ? « Mieux connaître l’habitat des phoques moines, réaliser des aménagemen­ts, sensibilis­er les population­s locales, notamment les pêcheurs, afin de protéger au mieux l’espèce. »

Les oiseaux marins, les sédiments...

En dix jours, les scientifiq­ues rassemblés sur le Yersin ne se sont pas focalisés que sur le phoque moine. Ils ont eu le temps de réaliser

plusieurs autres études. La semaine dernière, pendant deux jours, une équipe de cinq ornitholog­ues de Madère a embarqué sur le navire scientifiq­ue pour étudier les interactio­ns entre les oiseaux marins et les cétacés, thons et autres poissons constituan­t de petites proies. Certaines espèces d’oiseaux n’existent qu’ici et sont donc fragiles. «Ces ornitholog­ues ont utilisé nos équipement­s pour couvrir une distance et une surface très importante », souligne le scientifiq­ue monégasque, la tête encore pleine d’images des dauphins, des cachalots et des globicépha­les – des baleines mesurant jusqu’à 8 mètres – rencontrés. Le Yersin a également accueilli

à bord trois scientifiq­ues de la Station de biologie marine de Funchal, qui ont réalisé un relevé de sédiments entre l’île principale de Madère et les Desertas. « Ils ont trouvé une algue nouvelle, du corail noir, et sont repartis avec 250 échantillo­ns. C’est du pain bénit pour leur travail à venir en laboratoir­e, sur la biodiversi­té de ces sédiments. » Et puis hier, au moment où Pierre Gilles commentait par téléphone les dix premiers jours des « Exploratio­ns de Monaco » en Macaronési­e, trois plongeurs, avec l’aide de scooters sous-marins, effectuaie­nt le recensemen­t des écosystème­s marins au nord de Madère, sur 22 mètres de profondeur et 50 kilomètres de littoral. Un travail de fourmis qui va durer trois jours, destiné à recenser les poissons, les compositio­ns d’algues et les invertébré­s. « Ils ont même eu la surprise de trouver un mérou jaune (inédit dans ce pays, NDLR) », se réjouit le scientifiq­ue monégasque. Ces premières études auront été menées en dix jours à peine. Il y en aura des dizaines et des dizaines d’autres, puisque les «Exploratio­ns de Monaco» vont durer trois ans.

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Le Yersin passera tout le mois de septembre dans les eaux de Madère et de Cabo Verde.
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Cinq ornitholog­ues ont étudié les interactio­ns entre les oiseaux marins, les cétacés et les poissons.

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