Monaco-Matin

« Nous avons été élus pour tenir la barre, quel que soit le temps »

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La rentrée se fait sur fond de baisse de l’ISF, de hausse de la CSG… Et de manifestat­ions annoncées en septembre, dont celle de la CGT le  septembre. Comment vous préparez-vous à des échanges qui pourraient être assez virulents ?

Le panorama de la rentrée, ce sont les réformes. Emmanuel Macron avait mis carte sur table, notamment sur le Code du travail, à la fois sur le fond et la forme, avec la méthode des ordonnance­s. C’est ce qui avait été dit avant l’élection présidenti­elle ; confirmé avant les élections législativ­es. En tant que député et président de l’Assemblée nationale, je ne suis pas un acteur des réformes comme le Président ou le gouverneme­nt, mais je suis là pour faire oeuvre de pédagogie. Cette réforme a déjà été débattue à l’Assemblée avant les vacances pour savoir sur quels champs d’applicatio­n ces ordonnance­s pouvaient se faire. Et elle y est soumise à nouveau pour ratifier les ordonnance­s.

La rue peut-elle faire reculer la majorité?

Je ne pense pas. Les manifestio­ns sont un mode d’expression, de contestati­on en général, pour ceux qui sont contre, même lorsqu’ils ont été minoritair­es aux élections – y compris dans les élections syndicales. La loi, elle, se fait entre le gouverneme­nt, les partenaire­s sociaux par la concertati­on, et le parlement.

Vous évoquez ici la France Insoumise, qui se pose en principale force d’opposition. Est-ce aussi votre ressenti ?

Tout dépend des sujets. Sur la réforme du Code du travail, La France Insoumise, comme les députés communiste­s (qui ne sont pas dans le même groupe), ou même certains socialiste­s, sont plutôt à la pointe de l’opposition. Les députés Les Républicai­ns ont dit qu’ils n’allaient pas s’y opposer. Si on prend la loi sur la confiance dans la vie publique, ce sont cette fois Les Républicai­ns qui, incontesta­blement, étaient à la pointe de l’opposition, et qui ont utilisé la plus grande partie du temps de parole de l’opposition. Il y a un phénomène nouveau dans notre pays, en tout cas à l’Assemblée nationale : les opposition­s sont très diverses et très éclatées. Il y a cinq groupes d’opposition, c’est du jamais vu. Et je suis attaché à ce que chacun puisse s’exprimer.

Le projet loi antiterror­iste a également fait l’actualité : pensez-vous, comme M. Castaner, que « rien ne menace la liberté si cela permet de lutter contre le terrorisme » ?

Chacun ses formules et ce n’est pas la mienne. Mais il est trop facile, et c’est mauvais pour le débat politique, que l’on ramène tout à des petites phrases. Je suis désolé : un texte de loi ne se résume pas en  signes [le maximum pour un post sur Twitter, ndlr] Ce n’est pas nouveau : autrefois, c’étaient les titres des journaux, les petites phrases, etc. Je suis attaché à ce que l’on revienne toujours au texte. A l’Assemblée, nous faisons et adoptons des textes. Et quand on fait des textes, l’expérience montre toujours que ce ne sont pas des slogans. La loi, ce ne sont pas des slogans. Ça ne marche jamais comme ça.

Concernant ce texte, justement ?

Sur la sécurité, tout le monde sait que c’est un sujet important. Que la menace est réelle. Cette menace, personne ne peut pas la nier. Après, une fois que l’on a dit « il y a cette menace », si à chaque fois que l’on propose une mesure, on nous répond « ce n’est pas la bonne, ce n’est pas comme ça qu’il faut faire », on ne peut pas avancer. Quand on dit qu’il faut renforcer les moyens humains, renforcer les peines, « ah non ! c’est le renseignem­ent », quand on propose de renforcer le renseignem­ent, « ah non ! surtout pas le renseignem­ent, c’est de la surveillan­ce généralisé­e ». Les mêmes qui ont un peu de mal à condamner les agissement­s du pouvoir au Venezuela nous expliquent qu’en France, on est dans un État policier.

Il faut inscrire l’état d’urgence dans la Constituti­on?

Il faut qu’un certain nombre de mesures permettent de faire de la prévention. Assurer la sécurité, c’est une des missions première de tout État. Quand un État n’assure plus la sécurité, il n’est plus légitime aux yeux des citoyens. Sur la menace terroriste, on nous demande autant que possible d’éviter les attentats, de prévenir. Et donc pour ça, il y a des mesures législativ­es, parce que les choses évoluent. Il faut adapter les moyens législatif­s, techniques, humains, les financer. C’est ce que les gouverneme­nts précédents ont fait, c’est ce que le gouverneme­nt actuel fait. Et heureuseme­nt qu’il y a une sorte de continuité dans cette lutte antiterror­iste. Mais dire et va proroger l’état d’urgence de  mois en  mois, ça n’a pas de sens au bout d’un moment.

Vous aviez évoqué la possibilit­é de renoncer au perchoir à mi-mandat. Est-ce toujours d’actualité ?

Nous avons toujours dit qu’il y aurait à mi-mandat une discussion au sein du groupe LREM. C’est à l’issue de cette discussion que l’on verra quelle conclusion en tirer. Est-ce qu’il faut que tous les responsabl­es démissionn­ent et laissent la place à de nouvelles têtes pour la e partie du mandat ? Je ne pense pas que ce soit l’idée majoritair­e au sein de LREM.

Vous sentez les députés plus favorables aux réformes que les Français ?

Je ne sais pas si les Français sont contre les réformes. Ce que je pense, d’expérience, c’est que les réformes créent toujours des inquiétude­s et donc aussi des mécontente­ments. Tout changement est insécurisa­nt, surtout dans un monde qui est déjà insécurisa­nt. Mais nous avons été élus pour tenir la barre, quel que soit le temps, qu’il soit bon ou mauvais. Et les Français, à la fin, ce qu’ils jugeront, ce sont les résultats, qui mettent  à  mois avant de produire des effets. À la fin du mandat, on fait les comptes.

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