Monaco-Matin

Une soirée caritative en faveur des réfugiés

Didier Super, Guillaume Meurice et Frédéric Fromet se sont produits sous le chapiteau de Breil, samedi, dans le cadre d’une soirée caritative dont les fonds seront reversés à l’aide aux migrants

- ALICE ROUSSELOT PHOTOS : MICHAEL ALESI

Je suis Breilloise pure souche, et je peux vous dire qu’il est rare qu’on soit aussi nombreux sous le chapiteau ! » Et pour cause, le spectacle organisé samedi par l’Associatio­n pour le maintien des alternativ­es en matière de culture et de création artistique (Amacca) de la Roya se tient à guichet fermé. 500 places. Pas une de plus, pas une de moins. Juste ce qu’il faut pour constituer un public résolument soudé dans l’envie de rire à un humour grinçant. Tout en soutenant les associatio­ns d’aide aux migrants, l’intégralit­é des recettes leur revenant. Les trois artistes programmés viennent eux-mêmes bénévoleme­nt – mais peu enclins à y aller avec le dos de la cuillère.

Humour « corrosif »

Nathalie Masseglia, gilet orange des organisate­urs sur le dos, engage les hostilités. Donnant d’emblée le ton d’une soirée résolument anticonfor­miste. «Merci à notre ministre de l’Intérieur, M. Collomb, grâce à qui nous sommes devenus des experts en organisati­on culturelle dans une zone transfront­alière. Merci, aussi, au préfet… pour avoir autorisé le débit de boisson. Ainsi qu’à Eric Ciotti, encore président du Départemen­t, qui finance l’Amacca à hauteur de 500€ par an. Et aux conseiller­s municipaux présents. Votre carrière politique est désormais terminée… » Vous avez dit caustique ? Comme c’est caustique. Le premier artiste à faire irruption sur les planches, Didier Super, dirait plus volontiers « cor rosif ». Du moins après avoir sorti un rouleau de scotch en vue d’en faire une sangle pour sa guitare, et éjecté un photograph­e un peu trop proche de lui. Après avoir, également, pesté contre une « organisati­on de gauche ». Car chez

Didier Super, habitué de Breil pour y avoir déjà tourné plusieurs vidéos, on n’hésite pas à jouer la tête à claques. Prête à couper les têtes. Toutes les têtes. Religion, politique, physique, profession, origine, personne n’y échappe. Pas même Cédric Herrou, devenu progressiv­ement l’emblème de l’aide aux migrants dans la Roya. « Je voudrais le remercier de s’être mis dans la merde jusqu’au cou. Sans quoi nous ne serions pas tous

réunis pour cette petite fête. » Pas même les réfugiés eux-mêmes. Auxquels il dédie une chanson, toujours aussi (délibéréme­nt) odieuse. À coup de « Moi si j’étais migrant, j’essaierais de moins faire la gueule (...) C’est grâce aux migrants qu’au FN on s’en branle un peu moins des SDF ». Pas de quoi faire bondir le public pour autant. Qui, bien au contraire, reprendrai­t bien une louche de millième degré. Par chance, voilà l’animateur

Guillaume Meurice qui prend le relais. Venu, assure-t-il, non pas en tant qu’humoriste, mais comme… conseiller. Au CV particuliè­rement nourri. Tous les hommes (et femmes) politiques du moment ayant vraisembla­blement eu recours à ses services. Et parmi ses clients, un certain… Cedric Herrou. Qui, une fois encore, ne s’en tirera pas indemne. «Je l’ai dépanné au niveau vestimenta­ire. Je me suis occupé de son look », tacle Guillaume Meurice. Qui l’avait cela dit soutenu – avec toute l’équipe de l’émission Si tu écoutes j’annule tout – à l’aune de son procès. Et d’apostrophe­r le public : « Nous sommes le pays de l’amour. Mais de quoi avez-vous besoin d’autre ? Je ferai remonter au ministère» . Les réponses ne tardent pas à fuser. «Liberté!» «Pas de souci, je t’en mets deux cartons. Tu veux de l’espoir avec ? » Viennent la sacrosaint­e « égalité », ainsi que la « fraternité », ou encore le « respect » et l’« abolition des frontières ». Aucun des spectateur­s ne cachant véritablem­ent la raison de sa venue sous le chapiteau de Breil: allier bon moment et soutien à une cause, préoccupan­te sur le secteur.

Tout, tout pour ma Syrie

Pour ceux qui auraient souhaité souffler un peu entre deux blagues assassines, l’arrivée du chansonnie­r Frédéric Fromet sur scène n’est pas franchemen­t synonyme de délivrance. Ce dernier affichant un soutien indéfectib­le à Bachar elAssad « qui fait beaucoup pour son pays… et notamment pour la natation ». Et d’entonner « Tout, tout, pour ma Syrie, ma Syrie… », un morceau chanté la première fois en 2015 sur France Inter. Face au succès de la manifestat­ion, certains rêvent désormais de voir les choses en (plus) grand. À l’instar du secrétaire départemen­tal des écologiste­s, Laurent Lanquar, qui souhaitera­it que « les autorités mettent le Palais Nikaia à dispositio­n des associatio­ns locales qui font preuve d’humanité ». Du côté de l’organisati­on, on rappelle à toutes fins utiles que « ce n’est pas parce qu’on récolte fonds que l’on est responsabl­e de la situation… »

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Le chanteur Didier Super, l’animateur radio Guillaume Meurice et le chansonnie­r Frédéric Fromet se sont succédé sous le chapiteau de Breil-sur-Roya. Rivalisant d’humour vénéneux.
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