Renault conçoit à Sophia le véhicule de demain
Renault Software Labs inaugure demain son centre de R&D en logiciel embarqué sur le véhicule connecté. Dès 2019, le grand public pourra bénéficier du fruit de ses recherches
Pratiquement deux mois jour pour jour après son annonce de rachat des activités R&D d’Intel à Sophia Antipolis et Toulouse, Renault inaugurera demain sur la technopole les nouveaux bureaux de Renault Software Labs. Quelque 421 emplois sur les deux sites (dont 162 à Sophia Antipolis) menacés de fermeture par lntel ont ainsi été maintenus. Ce rapprochement entre le constructeur automobile et le spécialiste américain du processeur et des semi-conducteurs fait sens. Dans ce nouveau centre de recherche et de développement, Renault qui souhaite renforcer son implication dans le domaine des véhicules connectés, utilisera le savoir-faire des salariés d’Intel en logiciel embarqué et connectivité. Les explications d’Alexandre Corjon, président de Renault Software Labs et vice-président d’Alliance Global (Renault-Nissan-Mitsubishi).
Deux mois entre le rachat et l’inauguration des locaux, c’est une affaire rondement menée… Oui, nous avons signé la transaction finale avec Intel le 30 juin et dès le 3 juillet, les deux sites Intel de Sophia et de Toulouse étaient intégrés dans notre Intranet. Le personnel est très intéressé de rejoindre le Groupe Renault et l’Alliance pour participer à l’aventure automobile.
Pour Renault et les autres constructeurs automobiles, le futur passe par la voiture connectée, électrique et autonome… Oui, bien évidemment. L’acquisition des activités d’Intel s’est faite dans cet esprit-là. Les équipes vont participer au développement de ces véhicules. Il faut savoir que l’électronique représente près de 40 % du coût du véhicule et cela ira en s’amplifiant. Sur les modèles les plus avancés technologiquement, on dépense davantage en électronique que pour la motorisation.
Quels sont les axes de travail de Renault Software Labs ? Nous avons créé des pôles de développement autour de quatre axes : le logiciel dans les véhicules ; le véhicule connecté ; le véhicule autonome et les process de développement logiciel. L’entité de Sophia Antipolis sera davantage spécialisée sur le véhicule autonome en raison de ses compétences poussées en traitement du signal et d’algorithmie. Elle travaillera également sur la connectivité. Elle se focalisera sur l’ADAS (Advanced Driver Assistance System) et sera en relation avec les autres unités de Renault Software Labs. C’est un développement mondial que nous réalisons là. En deux mois à peine, l’équipe de Sophia Antipolis a déjà bien avancé. J’ai pu assister il y a quelques jours à une démonstration d’ouverture d’un véhicule à distance, via un
smartphone. D’autres ingénieurs ont analysé la consommation énergétique de l’électronique et déjà formulé des suggestions. Dès la nouvelle génération de véhicules qui sortira en 2019. La prochaine Clio aura déjà été influencée par le travail de l’équipe de Sophia Antipolis. Chez Renault, notre credo est de démocratiser la technologie : toute la gamme de modèles sera concernée.
Par exemple… C’est surtout dans la partie télématique, donc de connectivité, que se trouveront les avancées. La connexion G dans la voiture, par exemple. Ou bien la mise à jour à distance les logiciels présents dans le véhicule, sans avoir à le ramener au garage. Cela concerne notamment le multimédia (musique, navigation…), le pilotage automatique du véhicule.
Mais le véhicule autonome n’est pas encore au point... En 2019, les premiers modèles Renault disposeront d’une
conduite autonome. Il s’agira d’un Traffic Jam Pilot, avec une conduite assistée en cas d’embouteillage sur autoroute permettant de maintenir le véhicule sur sa voie. Il sera utilisable sur autoroute en toutes conditions de trafic. Le conducteur conservera les yeux sur la route, les mains sur le volant, et restera totalement responsable de toutes les phases de conduite.
À quelle échéance prévoyez-vous un véhicule autonome à 100 % ? Cela dépend ce que l’on entend par véhicule complètement autonome. Pour ceux destinés à la production de masse, ce sera autour de 2019/21. Le véhicule pourra doubler en changeant de voie sans l’intervention du conducteur. Ce dernier sera toujours présent pour en reprendre le contrôle en cas de situation imprévue. Une nouvelle étape devrait être franchie en 2023 lorsque le conducteur pourra faire autre chose au volant : lire, dormir… Concernant les véhicules dédiés, c’est-à-dire les navettes pouvant transporter jusqu’à une dizaine de passagers, l’Alliance et ses partenaires, Transdev notamment, oeuvrent pour développer des robotsvéhicules qui circuleront sur une zone géographique définie. On espère avoir des flottes expérimentales en .
L’acquisition d’Intel vous fait donc gagner du temps…
À peu près trois ans sur le plan de développement que nous avions envisagé. Pour ce qui est de l’avance de l’Alliance – qui est leader mondial – sur ses compétiteurs, nous avons démontré que nous étions très bien placés sur ces domaines de connectivité et véhicule autonome. L’apport des ressources d’Intel nous permettra de sécuriser notre position. C’est un monde qui évolue très rapidement et on ne peut pas se reposer sur nos lauriers. Nous devons continuer à investir. L’autre apport, très important de cette acquisition, est notre capacité à nouer des partenariats, à adresser des domaines que nous n’étions pas capables d’aborder par manque de compétences. Le savoir-faire et l’expérience des salariés d’Intel nous permettront d’appréhender différemment le métier automobile. Cela va-t-il nous permettre de prendre de l’avance sur nos compétiteurs ? Nous l’espérons.
Outre Intel, pourquoi vous être installé dans la région ? L’écosystème dans la région est très favorable pour y travailler et nouer des partenariats. À Sophia Antipolis, j’ai déjà pu rencontrer des laboratoires, des écoles, des startups, certains de nos fournisseurs comme Bosch, Magneti Marelli…). Renault soutient l’innovation et le développement économique en France.
Prévoyez-vous d’embaucher ? On cherche à intégrer les équipes d’abord mais je pense que nous embaucherons dans un second temps. Nous nous engageons dans la durée.
« L’écosystème dans la région est très favorable.» Alexandre Corjon