Le prince Albert II explorateur à Madère
Le souverain a passé trois jours sur le Yersin, à Madère, pour assister à la première mission des Explorations de Monaco. Il a même eu la chance inouïe de voir deux phoques moines…
La scène aura duré à peine quelques minutes. Mais elle restera longtemps dans les mémoires de tous ceux qui ont eu le bonheur d’y assister. Au premier rang desquels le prince Albert II, engagé depuis des années, au travers de sa fondation, dans la préservation d’une espèce en voie de disparition, le moine phoque de Méditerranée. Cela fait sept ans que le souverain milite pour sauver ce mammifère de l’extinction. Dans le monde, il en reste entre 500 et 1 000. À Madère et dans les îles Desertas, on en dénombre une quarantaine. Et pour la première fois, pour le souverain comme pour la plupart de ceux qui l’accompagnaient sur une falaise escarpée de l’île Deserta Grande, au large de Madère, il a pu observer deux phoques moines pendant quelques minutes. Rarissime.
Le prince bouscule le protocole
Sans un certain entêtement princier, cette rencontre n’aurait jamais eu lieu. Nous sommes le jeudi 7 septembre. Le Yersin a jeté l’ancre au bord de la plus grande île de l’archipel des Desertas, situé au sud-est de Madère. Les trois îles, comme leur nom l’indiquent, sont désertes, inhabitées. Le prince Albert II est à bord du navire scientifique depuis deux jours. Il a rejoint l’équipe de savants et techniciens participant à la première mission des Explorations de Monaco, menée en Macaronésie depuis deux semaines (nos éditions des 31 août et 7 septembre). Le matin, le souverain a chaussé ses palmes et enfilé sa combinaison de plongée pour aller visiter une grotte sous-marine dans laquelle les phoques moines qui résident dans ce secteur viennent se reposer et se reproduire (lire page suivante). Puis, l’après-midi, après avoir inauguré une exposition dédiée aux phoques moines, installée dans la station des rangers, le souverain a décidé de bousculer le protocole. « Les autorités de cette région autonome avaient estimé trop dangereuse l’ascension de la falaise que le prince Albert Ier avait gravie un siècle plus tôt, explique Robert Calcagno, le directeur de l’Institut océanographique de Monaco,
présent lors de cette mission. Le chemin est étroit, glissant et très escarpé. Mais le souverain a tout de même décidé d’y aller.» Contre l’avis général. « Il aime la nature, il est sportif, il a démontré le matin qu’il pouvait nager dans une mer démontée, il n’a pas le vertige», commente Robert Calcagno. Tout le monde suit alors le mouvement. L’ascension n’est pas simple. Certains marcheurs font demi-tour en cours de route. Le prince mène la marche, seul en tête, bien décidé à grimper tout en haut, comme l’avait fait son trisaïeul.
Moment fort
Soudain, un ranger aperçoit une tache sombre dans l’eau, 80 mètres plus bas. «Il alerte tout le monde en nous disant qu’il s’agit peut-être d’un phoque moine, raconte Robert Calcagno .Onsemet alors à scruter l’océan. On aperçoit effectivement une forme sombre qui disparaît aussitôt. On attend tous. Deux minutes plus tard, on voit remonter à la surface un phoque moine qui devait mesurer trois mètres de long et peser entre 200 et 300 kg. Et puis un second est arrivé. Ils étaient sans doute en train de chasser. On a vu le premier phoque moine secouer la tête comme s’il était en train de manger un poisson. C’était magnifique. Un moment très fort. » Une première pour le prince Albert II et ses accompagnateurs monégasques, mais également pour le président du gouvernement régional de Madère, Miguel Albuquerque, qui faisait partie de l’expédition. Sans l’obstination du souverain à vouloir à tout prix grimper sur la falaise, cette observation très rare n’aurait pu être effectuée. Ce fut la belle surprise de cette première mission des Explorations de Monaco. Dans les trois ans qui viennent, il y en aura forcément beaucoup d’autres.