Monaco-Matin

Une villa troglodyte dans un rocher de Monaco

La Principaut­é aura bientôt sa première constructi­on troglodyte dans le Castellere­tto. Un chantier qui émeut les internaute­s, mais qui s’avère vertueux et inédit sur bien des points

- LUDOVIC MERCIER lmercier@nicematin.fr

Un des derniers rochers “d’origine” de Monaco – entre Les Ligures et l’Escorial – quelques mètres de large et ils vont construire un autre immeuble! Ça, c’est Monaco ! » C’est en ces termes qu’une photo du rocher du Castellere­tto a été postée sur la page Facebook de Monaco4eve­r le 23 août dernier. S’ensuit toute une série de commentair­es, dont certains très émus : « Vous avez dit patrimoine ? » s’interroge l’un. « C’est pas possible, ils vont détruire le rocher ? Mais qui autorise toutes ces mutilation­s?» questionne une autre, etc. Certains ont déjà de bonnes informatio­ns : c’est une villa troglodyte qui sera installée là, à l’angle de l’avenue Hector-Otto et de la rue Honoré-Labande. La toute première à Monaco.

Lieu pas tout à fait historique

Et si le rocher de Castellere­tto suscite tant d’émotions, c’est que c’est un site protohisto­rique. C’est-à-dire qu’il date du tout début de l’Histoire, à la période où l’écriture commence à apparaître. Une époque coincée entre la préhistoir­e et l’Histoire. Or, le 36e Bulletin du musée d’anthropolo­gie préhistori­que (1 993), nous apprend que sur ce relief, il y avait les vestiges d’un mur ligure cyclopéen composé de 251 énormes blocs rocheux. Lesquels ont été déménagés pour laisser place à l’immeuble «Les Ligures», en 1978 et 1979. «Ce lieu n’est pas particuliè­rement historique et ne bénéficie d’aucune protection spécifique, comme cela peut être le cas ailleurs. Toutefois, dans le dossier de la Villa troglodyte, tout l’enjeu est de conserver le

rocher. Il sera creusé par l’intérieur. Le rocher sera conservé quasiment intégralem­ent. Vu de la rue, cela ne changera pratiqueme­nt pas, à part les quelques ouvertures qui seront faites. C’est un projet respectueu­x qui a d’ailleurs obtenu un label environnem­ental », explique la direction de l’Urbanisme, sans pouvoir préciser de quel label il s’agit.

Figures connues

Sur le site officiel infochanti­ers.mc, qui reprend tous les travaux, chantier et grands projets de la Principaut­é, on peut consulter la fiche du chantier. On y voit même une

maquette représenta­nt ce qui ressemble bien à un caillou habité. Et l’on y apprend que le projet est signé des architecte­s Jean-Pierre Lott (à l’origine de la tour «Le Simona », boulevard du Jardin exotique) et Patrick Raymond (à qui l’on doit plusieurs services du Centre hospitalie­r Princesse-Grace et la résidence Le Cap fleuri, en cours de réalisatio­n). Le maître d’ouvrage est l’entreprene­ur monégasque Patrice Pastor. Contacté, l’homme d’affaires répond: «Nous n’avons pas l’intention de nous livrer à une interview sur ce sujet, bien que passionnan­t. Je ne peux que vous encourager

à vous rapprocher de la direction de l’Environnem­ent qui connaît bien le dossier pour l’avoir supporté, et qui pourra vous expliquer l’intérêt du concept puisque l’opération se veut conceptuel­le et à mon sens des plus vertueuses. Mais la vertu est discutable tout comme le côté historique de ce petit rocher qui n’a intéressé personne jusqu’à ce que notre projet soit développé. »

Certifiée durable

Valérie Davenet, directeur des services de l’Environnem­ent, se souvient très bien du dossier: « Nous avons commencé à travailler dessus avec Monsieur Pastor en septembre 2015. Nous avons accompagné ses services dans la présentati­on du projet à l’associatio­n des Bâtiments durables méditerran­éens (BDM). C’est un projet qui nous a intéressés parce qu’il est extrêmemen­t favorable à l’environnem­ent. La reconnaiss­ance BDM est d’ailleurs attribuée aux projets qui utilisent des outils de gestion favorables au bioclimati­sme, qui préservent les matériaux de constructi­on, qui présentent une réduction de la consommati­on d’eau et d’énergie, tout en assurant le confort et la santé des occupants. » Et le maître d’ouvrage s’est montré lui aussi vertueux : « Nous avons recommandé un inventaire de la faune et de la flore présentes, et les équipes se sont prêtées au jeu de façon tout à fait volontaire. »

Première à Monaco

De son côté, l’associatio­n BDM confirme les déclaratio­ns de la direction de l’environnem­ent : « La Villa troglodyte a obtenu la certificat­ion “or” dans sa phase de conception. C’est le maximum. C’est-à-dire que le projet a recueilli plus de 80 points sur 100. C’est le tout premier bâtiment monégasque à obtenir une reconnaiss­ance de nos services. Les phases suivantes seront aussi soumises à un examen. Nous accompagno­ns le projet dans sa conception, et jusqu’à deux ans après la livraison. Cela nous permet de nous assurer que tous les critères sont respectés, et que le bâtiment remplit bien les objectifs qui avaient été fixés. De cette façon, nous bénéficion­s d’un retour d’expérience, de façon à affiner notre cahier des charges au fil du temps. »

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(Photo Cyril Dodergny) D’après le site infochanti­ers.mc les travaux auraient dû démarrer en décembre . La semaine dernière, les palissades sont enfin apparues.
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(Photo Cyril Dodergny) Sur le rocher, une plaque témoigne de la présence, autrefois, de vestiges.
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Capture du site infochanti­ers.mc Le site infochanti­ers.mc montre une maquette de la future villa, et donne toutes les informatio­ns (ou presque) sur le chantier.

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