Accueil des migrants : le maire menacé de mort
En quelques mois, Enrico Ioculano, maire de Vintimille, a reçu plusieurs menaces de mort en lien avec la complexe situation migratoire dans sa commune. Il a réagi publiquement cette semaine
Pas moins de trois lettres de menaces de mort. Le 26 mai, le 25 août et le 2 novembre. Des insultes sur les réseaux sociaux. Un paquet « cadeau » contenant quatre bouquins d’influences nazie et fasciste dans lesquels la purification ethnique est évoquée et où la mort est souhaitée pour ceux favorables à l’arrivée des réfugiés. À la répétition de ces cadeaux empoisonnés, Enrico Ioculano ne pouvait plus rester silencieux. Alors, le maire de Vintimille a pris la parole ce lundi. Publiquement. Pour dénoncer ces menaces intimidantes contre lui et sa famille, pour qui il se dit « désolé et inquiet ». Dans ces missives tapées à la machine à écrire, on lui reproche à lui, mais aussi à Antonio Suetta, évêque de Vintimille-San Remo, la gestion de la crise migratoire dans la commune frontalière avec Menton.
« Une attitude dangereuse »
« Je trouve que le climat qui a été créé est intolérable. Si je comprends qu’un citoyen ordinaire puisse m’attribuer la responsabilité de la situation migratoire puisque je représente l’institution la plus proche, je ne peux en aucun cas justifier la manipulation politique, a-t-il souligné devant bon nombre de médias italiens. C’est une attitude dangereuse qui peut favoriser un comportement insensé chez les personnes ayant Enrico Ioculano, en juillet , lors d’une manifestation de migrants qui protestaient contre la fermeture de la frontière franco-italienne à Menton.
des problèmes ». Dès le jour où il a reçu les premières menaces, Enrico Ioculano a bénéficié d’une surveillance rapprochée. Mesure immédiatement renforcée lors de la réception de la seconde lettre. Selon l’édition d’Imperia du quotidien italien Il Secolo XIX, les enquêteurs «porteraient une attention
toute particulière à l’affaire et seraient enclins à croire qu’il s’agit d’un mythomane motivé par les critiques générées depuis trois ans sur l’accueil des migrants à Vintimille. »
De nombreux soutiens
Un accueil qu’Enrico Ioculano juge bien au-delà de ses simples compétences
de maire. Lors de la conférence de presse, le maire de Vintimille a d’ailleurs réitéré les difficultés rencontrées par son administration dans la gestion d’un phénomène aussi complexe que celui des flux migratoires s’écrasant à la frontière. « Je ne cesse de répéter qu’une municipalité ne possède pas les compétences, ni les outils nécessaires pour traiter un phénomène de ce genre, a-t-il expliqué. Ces trois ans ont été longs pour tout le monde. Nous connaîtrons probablement encore des situations intenses, mais il est juste que chacun sache quels sont les pouvoirs et les devoirs de chacun. »
« Qui est responsable d’un tel climat ? »
Après cette dénonciation publique, le maire de Vintimille a reçu une vague de soutiens. De tous bords associatifs et politiques. Du sien, le parti démocrate. Mais aussi de La Ligue du Nord, pourtant critique et virulent à l’égard des migrants. De Giovanni Toti, le président de la région ligure. De la sénatrice, Donatella Albano. Et, bien sûr, des maires voisins. « À sa place, il pourrait y avoir chacun d’entre nous, quelle que soit la couleur politique, ont-ils réagi dans une récente conférence de presse. Nous n’avons pas de pouvoirs illimités et sommes en première ligne sur tous les fronts. Face aux difficultés, il peut y avoir des critiques, des propositions, des opinions divergentes mais personne ne doit tolérer ou justifier cette attitude. Tout maire souhaite pour sa ville un climat de paix et d’équilibre social (...) Une réflexion est obligatoire : qui est responsable d’un tel climat ? »