Monaco-Matin

Le rideau se lève sur les bases du surréalism­e

Jusqu’en mai, le musée Cocteau accueille le 2e acte de l’exposition Démarche d’un poète, dédiée aux liens passionnel­s entre Jean Cocteau et la scène, ce «mal rouge et or»

- GRÉGOIRE BOSC-BIERNE gbosc-bierne@nicematin.fr

Au coeur des dédales du musée se dresse une autruche empaillée qui en surprendra plus d’un. Véritable poète aux multiples langages artistique­s, Jean Cocteau a légué à la mise en scène, qu’elle soit théâtrale ou cinématogr­aphique, un ensemble de techniques et de partis pris qui ont révolution­né les genres et posé les bases d’un nouveau courant artistique : le surréalism­e, mouvement bafouant la frontière symbolique entre le réel et l’imaginaire. Plusieurs séquences composent l’acte II de « La démarche d’un poète ». La première plonge directemen­t le visiteur dans l’univers multidisci­plinaire de Cocteau, à travers la découverte des « monstres sacrés » du poète.

Des démons jaillissen­t le génie

« Cocteau était rongé par ce qu’il appelait le ”mal rouge et or ”, cet irascible besoin de créer qui le rongeait. Dans cette première séquence, on plonge dans son enfance à la découverte de ses monstres sacrés », explique Françoise Leonelli, la conservatr­ice du musée. Créer, un acte douloureux pour Jean Cocteau qui s’est donc appuyé sur ses contempora­ins pour faire jaillir son génie. C’est le cas de l’acteur Jean Marais, du scénograph­e et créateur de costumes Christian Bérard ou encore de l’inimitable actrice Sarah Bernhardt, l’une des premières actrices à atteindre le statut d’icône interconti­nentale.

L’indomptabl­e «Madame quand même »

« Sarah Bernhardt fut pour le jeune Cocteau une immense source d’inspiratio­n et l’un des principaux monstres sacrés », rappelle encore Françoise Leonelli. À travers d’innombrabl­es caricature­s, portraits, lettres manuscrite­s et cartes postales, une immense vitrine permet de découvrir l’impact qu’a eu « l’impératric­e du théâtre » sur la carrière artistique de Cocteau. Au musée du Bastion, une exposition d’une Cette imposante autruche empaillée, déconcerta­nte de réalisme, marque symbolique­ment le passage d’un théâtre traditionn­el et lisse à la folie souhaitée du théâtre surréalist­e.

soixantain­e d’oeuvres retrace également la prolifique vie de celle qu’on surnommait « Madame quand même ». Un surnom en référence à son audace et son mépris des convention­s. Après la mise en bouche, on chemine jusqu’à la séquence suivante : « Farce et surréalism­e ». «Cette partie traite de l’émergence du ballet Parade, qui concentra des grands noms. Cette période marqua un véritable bouleverse­ment pour le monde du théâtre », insiste la conservatr­ice avec passion. Créé en 1917, ce ballet sacralise une véritable rupture avec le théâtre traditionn­el en y intégrant une dimension surréalist­e via des personnage­s à contre-courant des normes en vigueur. « Cocteau avait fait appel à ceux qu’on appelait ”le Groupe des six ”, des compositeu­rs qui s’intégraien­t parfaiteme­nt au théâtre burlesque », souligne Françoise Leonelli. Soudain, on croise une autruche, empaillée certes, mais terrifiant­e de réalisme. Comme si l’oiseau était prêt à nous courir après façon Vaudeville.

Du rideau rouge à la projection sur toile

Vient ensuite la troisième séquence de cette exposition : « Retendre la peau de mythes » où l’espace dédié fait la part belle aux nombreuses collaborat­ions de Cocteau avec des acteurs, costumiers et metteur en scène d’influence, qui donnèrent vie à des pièces comme « Les chevaliers de la Table ronde ». La quatrième séquence, « Les nouveaux monstres sacrés », boucle la visite du premier étage en rappelant au visiteur que Cocteau restait un être vulnérable, hypersensi­ble, et terribleme­nt admiratif et dépendant des acteurs qu’il recrutait pour ses pièces. Le curieux finira sa visite au sous-sol, à la découverte de monuments du cinéma comme « La belle et la bête », « L’aigle à deux têtes » ou encore « Les parents terribles ». De quoi se repaître avant le vernissage de cette nouvelle exposition, samedi 2 décembre, à 11 heures. Inspirés du travail de Vincenzo Coronelli, trois globes seront exposés par Caroline Challan Belval.

 ?? (Photos Cyril Dodergny) ?? Au Bastion, une soixantain­e d’oeuvres retracent la folle vie de Sarah Bernhardt, l’une des actrices les plus importante­s du début du XXe siècle. Cyrano de Bergerac, Cléopâtre, Hamlet… « L’impératric­e du théâtre » interpréta des centaines de rôles...
(Photos Cyril Dodergny) Au Bastion, une soixantain­e d’oeuvres retracent la folle vie de Sarah Bernhardt, l’une des actrices les plus importante­s du début du XXe siècle. Cyrano de Bergerac, Cléopâtre, Hamlet… « L’impératric­e du théâtre » interpréta des centaines de rôles...

Newspapers in French

Newspapers from Monaco