On arrête ?
Le nouvel An, c’est aussi les bonnes résolutions. La plus populaire ? Arrêter de fumer. Le Centre hospitalier Princesse-Grace propose plusieurs outils pour cela, dont l’hypnose. J’ai testé pour vous
L’arrêt du tabac est chaque année en tête au « palmarès » des bonnes résolutions.
On a testé le sevrage par hypnose dispensé au CHPG.
Le témoignage d’un ancien fumeur, ou plutôt d’un « non-fumeur ».
J’ai décidé de réarrêter de fumer il y a longtemps. Quand j’ai repris en fait. En 2015. Comme beaucoup de fumeurs, j’ai arrêté souvent. De quelques heures, à quelques mois. Jusqu’à trois ans et demi. Et depuis que j’ai repris, à l’occasion d’un gros stress, à chaque clope allumée, j’étais terrifié par cet avertissement imprimé sur les paquets : « Fumer tue ». Le sevrage est une expérience très personnelle. Pour moi, chaque arrêt a été un peu plus difficile. J’étais sûr que cette fois, n’allait pas échapper à la règle. J’avais la sensation qu’il me fallait quelque chose qui relevait un peu du miracle. Il me fallait une baguette magique. Alors quand j’ai appris que le Centre hospitalier Princesse-Grace utilise l’hypnose, j’ai foncé. J’imaginais qu’au terme d’un rendez-vous, voire deux, le thérapeute allait régler tous mes problèmes de tabagisme. La vérité est un peu plus subtile que ça.
Pris en charge
En intégrant le parcours d’un patient de tabacologie du CHPG, on bénéficie d’un soutien pluridisciplinaire et, le tout, pris en charge par les Caisses sociales. Tout commence par une consultation avec les trois praticiens du service : le Dr Mohammed Moussine, pneumologue-tabacologue, Laurence Albertini, psychologue-addictologue, et Isabelle Russo, diététicienne. Rien n’est obligatoire, aussi je me passerai de la consultation diététique. Le pneumologue fait le bilan du petit questionnaire que j’ai rempli avant le début du rendez-vous : 36 ans, fumeur depuis l’âge de 25 ans, quasiment un paquet par jour ces derniers mois. La sentence tombe : je fume depuis moins longtemps que je ne crois. Grâce à toutes mes phases d’arrêt: «Chaque moment
où vous ne fumez pas vous est bénéfique», me dit le Dr Moussine. Une évidence qui prend ici tout son sens.
L’hypnose ne règle pas la dépendance physique
D’entrée, on m’explique qu’il faut mettre toutes les chances de mon côté. Alors je décide de suivre tous les conseils, y compris ceux avec lesquels je ne suis pas forcément d’accord. Je vais donc me mettre sous patch, et pastilles mentholées à la nicotine, même si je suis contre les substituts. Et parce que je suis un gros fumeur du matin, je serai patché aussi la nuit. « L’hypnose ne réglera pas la dépendance physique», m’explique Laurence Albertini. Là, je commence à douter. Mais j’ai le doigt dans l’engrenage, et je me suis engagé à fournir cet article, alors je prends l’ordonnance, je serre les dents, et je poursuis.
«Les personnes qui utilisent des substituts arrêtent plus durablement. Par contre, ça fait faire plus de rêves la nuit», m’explique le Dr Moussine. Lors de la première consultation en tête-à-tête avec Laurence Albertini, nous échangeons sur mon rapport à la cigarette, et sur la date à laquelle je décide que je vais arrêter. Autant être franc : c’est une période très difficile, pour des tas de raisons qui peuvent survenir dans la vie de chacun. Mon choix interpelle la thérapeute: « On recommande habituellement une période calme, et où ça va plutôt bien.» Même s’il y a un risque pour que ça n’aille pas, et que ce soit très difficile. Je n’ai pas envie d’attendre d’être sur un petit nuage rose pour m’amputer d’une habitude tenace. Pour moi, c’est le bon moment.
Coup d’essai
Première séance : assise face à moi, Laurence Albertini me fait faire un
exercice avec les mains, pour tester ma réceptivité. Pas de pendule, pas de «Dors! Je le veux», je suis assis les yeux ouverts. Elle me parle. Mais ça ne marche pas très bien. Elle ne se décourage pas. On passe à l’artillerie un peu plus lourde. Allongé, les yeux fermés, je suis dubitatif. Si ça n’a pas marché avant, ça ne marchera pas maintenant. Et pourtant. En écoutant sa voix, je sens qu’une partie de moi s’échappe. Je suis à la fois ici, et à la fois un peu ailleurs. En restant totalement libre. Tout dans sa formulation m’invite à la liberté: «Peut-être sentez-vous que votre esprit vagabonde, ou peut-être pas. » À la sortie de la séance, je suis déjà beaucoup plus détendu. Je n’ai pas encore défini de date, je n’ai pas encore arrêté.
Jour J
Une semaine plus tard je suis prêt. J’ai acheté les patchs (beaucoup trop cher en Principauté : 57 euros la boîte en ce mois de Novembre, dit mois sans tabac, contre une trentaine d’euros à Nice) et les pastilles. Le 1er décembre. La séance se déroule comme précédemment. Allongé, les yeux fermés, Laurence Albertini m’emmène, avec sa voix façon speakerine Arte, dans cet état de semi-conscience où elle me suggère tout ce que l’arrêt du tabac aura de bénéfique pour moi. Des suggestions affinées par les conversations que nous avons eues à chaque séance. Des suggestions sur-mesure. À l’issue de cette séance, Laurence Albertini m’invite à jeter mon paquet de cigarettes. Je ne l’avais pas prévu. Mais pourquoi pas. Je lâche. J’avais prévu d’arrêter au moment du coucher. Je m’accorde une ultime cigarette dans la soirée. Ce sera la dernière.
Non-fumeur
Je n’ai plus eu envie de fumer depuis. Dans les jours qui ont suivi, j’ai ressenti un vide dans la poitrine, malgré les patchs. Un classique du manque de nicotine, d’après Laurence Albertini. Je n’ai pas été irritable, j’ai juste récupéré l’énergie d’un gosse de 8 ans qui boit deux litres de Coca par jour. Depuis, ça s’est calmé. Très vite, j’ai arrêté les substituts qui m’empêchaient de dormir. Et ça s’est très bien passé. J’ai retrouvé le bonheur d’un bon petit-déjeuner et, déjà, je ne suis plus essoufflé quand je monte un escalier. J’ai refait deux séances avec Laurence Albertini. En fonction de nos entretiens, elle a affiné ses suggestions. À ce jour, aucune séance supplémentaire n’est prévue. La cigarette ne m’attire toujours pas, mais je m’en méfie. Et je suis non-fumeur.