Monaco-Matin

INTERVIEW Omeyer : « Si j’ai donné du plaisir aux gens, tant mieux »

Le gardien légendaire des Bleus est passé par Monaco. L’occasion de quelques confidence­s

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE DEPIOT

Quel bon vent vous amène au Sportel ? On m’a invité pour venir remettre un prix avec Claude (Onesta, l’ancien sélectionn­eur ndlr). Je découvre le Sportel et j’adore.

Vous faites d’ailleurs une formation au centre de droit et d’économie du Sport à Limoges... Oui, j’ai déjà pris ma retraite internatio­nale et je suis plus vers la fin de ma carrière qu’au début. Je prépare le diplôme de ‘‘manager général de club sportif’’. Ça me permet de voir l’envers du décor.

La suite, vous l’avez déjà réfléchie et planifiée ? Pas vraiment. Mais j’avance, l’an passé j’ai commencé ma formation d’entraîneur et là, celle de manager. Je serai opérationn­el tout de suite quand je vais arrêter.

A  ans, vous restez au sommet, si l’on en croit des arrêts hallucinan­ts comme celui contre Aalborg, en octobre en Ligue des Champions... Disons que je continue à bien jouer, à prendre du plaisir à aller à l’entraîneme­nt. En plus, je suis dans un club (PSG, ndlr) qui a beaucoup d’ambitions. Moi aussi, je suis exigeant, donc tant que la performanc­e est là, je continue.

Vous êtes en fin de contrat. Vous allez prolonger ? Oui, ça devrait se faire. De toute façon, je terminerai ma carrière au PSG. (il devrait signer pour une année supplément­aire, ndlr)

A  ans, comment fait-on pour rester au top ? J’ai toujours eu une bonne hygiène de vie, une bonne préparatio­n physique. Pour moi, ça a toujours été primordial, malgré mon poste de gardien. En préparatio­n, certains gardiens en font moins que les joueurs de champ, moi j’ai toujours travaillé avec eux, beaucoup couru, et j’étais devant (sourire)...

A votre poste, la maturité fait la différence ? Au poste de gardien, l’expérience est primordial­e. Un gardien arrive au top je pense entre  et  ans. Après, on peut durer jusqu’à  ans. Bon, je dirais pas que je ‘‘goale’’ aujourd’hui comme il y a dix ans, mais je me place mieux. Tu maîtrises beaucoup plus de choses au niveau des situations, je suis capable de revenir dans un match, ce que je ne savais pas faire quand j’avais  ans. Quand je rentrais mal dans un match, c’était terminé...

A votre ‘‘grand âge’’, le corps fatigue ou pas ? Non, mais j’en ai toujours pris soin comme je vous l’ai dit. Je m’échauffe plus qu’avant, aussi. A un moment, soit on veut durer et rester au top, soit on veut profiter de la vie...

Le PSG, c’est le bon choix ? Oui, c’est un club encore jeune mais très ambitieux. Je suis venu à Paris pour gagner la Ligue des Champions et j’espère y parvenir. On n’était pas loin l’année dernière... Il y a une passerelle entre les stars du foot du PSG et les handballeu­rs ? On se supporte mutuelleme­nt. Les emplois du temps sont différents mais quand j’ai l’occasion, je vais les voir au Parc et inversemen­t. Thiago Silva et Thomas Meunier sont venus nous voir jouer.

Qu’est-ce que vous aviez de plus que les autres pour être le meilleur gardien au monde ? Je me suis toujours remis en question. Après les titres, je savoure deux ou trois jours mais je me fixe aussitôt de nouveaux objectifs. J’ai toujours été compétiteu­r dans l’âme. Y a-t-il des analogies entre un gardien de hand et un gardien de foot ? Il y a des similitude­s au niveau de l’approche mentale, mais ça n’est pas la même chose du tout. Un gardien de foot peut avoir un arrêt à faire dans une mi-temps alors que nous, on est sollicités tout le temps. Niveau technique, ça n’a rien à voir. J’étais allé une fois en stage avec l’équipe de France de foot, je m’étais essayé au poste, pfff... Certains tirs en bas, je vais y aller avec les pieds alors qu’eux y vont avec la main.

Les qualités d’un gardien ? Avant tout être très fort dans la tête. Tu as toujours la frustratio­n d’encaisser des buts. Au foot, tu peux arriver à la fin avec aucun but, alors qu’au hand, ça n’arrive jamais... Il faut être capable de rebondir, d’être fort. Après, bien sûr, il faut des qualités physiques de souplesse, d’explosivit­é, la vision aussi.

A quelle vitesse arrive le ballon ? Ça peut aller jusqu’à  kilomètres/heure de loin.

Vous avez  matchs en équipe de France, quel fut le moment le plus fort ? Les Jeux. Les deux titres olympiques (, ). Ils sont au-dessus. La première fois, j’ai revu toute ma carrière pour arriver jusque-là, il y avait beaucoup d’émotion. Mais  était aussi très fort.

La plus grosse déception ? Ça reste le quart de finale des Jeux de  perdu contre les Russes (-).

Avez-vous la sensation, vous, Thierry Omeyer, d’avoir donné du plaisir aux Français, lors de ces arrêts ou basculemen­ts de matchs ou vous étiez carrément imbattable ? Il y a beaucoup de gens qui me disent ça. Tant mieux, en tout cas, moi j’en ai pris beaucoup sur le terrain, j’ai été nature, tout le temps.

Bon, Thierry, on va émettre une seule critique sur votre poste... (il coupe) C’est les tenues ?

Oui, évidemment ! Encore, je trouve que ça va. Quand je vois des images d’il y a une dizaine d’années, pfff... (rires)

Mais on ne peut pas vous ‘‘relooker’’, sincèremen­t ? Vous savez, aujourd’hui je m’entraîne en tee-shirt tout le temps. Mais en short, c’est dur, ça fait mal les ballons. On a quand même bien amélioré la tenue de jogger du dimanche qu’on portait avant, je crois...

Le joueur le plus fou que vous ayez côtoyé ? Je vais dire Greg Anquetil... Il était dingue mais c’est lui qui nous fait gagner le titre de champion du monde en . (En , Anquetil a reconnu avoir recruté deux prostituée­s lors d’un stage de l’équipe de France à Pornic, époque ‘‘Barjots’’, pour . francs de l’époque, les divers participan­ts ayant payé leur part !) Bah, j’en ai plusieurs, je n’ai pas envie d’en citer qu’un.

Est-ce qu’il y aura un avant et un après Onesta ? C’est clair qu’il a marqué l’histoire de l’équipe de France de par son management. J’ai fait  ans avec lui, on avait une très bonne génération mais c’est lui qui a permis qu’on gagne autant de titres. Moi, il m’a marqué aussi en tant qu’homme.

Dinart et Gille, c’est le bon duo aujourd’hui pour continuer à tout gagner ? Ils sont dans la continuité. J’ai joué avec les deux, ils ont marqué les Bleus en tant que joueurs et ils sont prêts à prendre le relais de Claude.

Pas facile quand même de gérer l’héritage, avec l’Euro  en Croatie qui arrive (- janvier) ? Il y a vraiment des jeunes très, très bons qui arrivent. Après, gagner comme on a gagné, est-ce que c’est possible, je sais pas. Mais c’est sûr que l’équipe de France continuera de faire partie des meilleures mondiales. Aujourd’hui en jeunes, on gagne pratiqueme­nt toutes les compétitio­ns, alors qu’il y a dix ans, on n’en gagnait pas une seule...

Je me suis toujours remis en question après les titres, ça m’a permis de durer ”

(*) Meilleur handballeu­r de l’année 2008, meilleur joueur du mondial 2015, meilleur gardien de tous les temps (IHF, 2010), meilleur gardien des JO (2008, 2012), meilleur gardien des Mondiaux (2009, 2011, 2015), meilleur gardien de l’Euro (2006) !!!

 ??  ?? Votre meilleur ami dans le hand ?
Votre meilleur ami dans le hand ?

Newspapers in French

Newspapers from Monaco