Monaco-Matin

CONGRÈS ANTI-ÂGE DE MONACO Les vendeurs de placenta bannis

L’affaire des produits de beauté illégaux vendus lors du Congrès de médecine esthétique et anti-âge est restée en travers de la gorge du gouverneme­nt, qui planche sur les poursuites pénales à donner

- THOMAS MICHEL tmichel@nicematin.fr

Ceux-là, ils nous ont surpris… » Directeur de l’Action sanitaire, Alexandre Bordero n’avait jamais vu ça et se serait bien passé de pareille polémique. En fin de semaine dernière, ses équipes ont dû intervenir à deux reprises au Grimaldi Forum où, sous couvert du Congrès de médecine esthétique et anti-âge, une société japonaise marchandai­t des médicament­s et complément­s alimentair­es à base d’extraits de placenta humain ! Les saisies effectuées, l’heure n’est plus à la complainte mais à l’action. La sanction au nom d’un gouverneme­nt princier qui entend bien marquer son intransige­ance à l’égard de tels comporteme­nts.

« Ils avaient des stocks cachés »

« On a été avertis par des autorités extérieure­s qu’il y avait ces produits. On a envoyé le pharmacien inspecteur le premier jour (jeudi matin), qui les a fait enlever et les a mis dans les bureaux de la direction du Grimaldi Forum, poursuit Alexandre Bordero .Il nous a signalé la présence de complément­s alimentair­es pour lesquels on a envoyé la DSSA (Division de sécurité sanitaire et alimentair­e) mais on est tombé sur des gens de mauvaise foi. Ils avaient des stocks cachés et ont ressorti des médicament­s après notre venue… » À nouveau mises au parfum, les Affaires sanitaires retournent sur site le vendredi aprèsmidi. «On a “ré”-enlevé les produits et dû aller, pratiqueme­nt de force, fouiller des placards qu’ils avaient dans le Grimaldi. Quand on a voulu regarder les boîtes, ils nous barraient l’accès ! » Derrière cette résistance, une combine manifestem­ent éprouvée… Jusqu’à émettre de fausses déclaratio­ns. «Il y avait beaucoup plus de complément­s alimentair­es qu’on l’imaginait et ils avaient été introduits sous le régime des échantillo­nnages. » Étonnammen­t, une dérogation, même pour du placenta humain, aurait d’ailleurs pu être accordée sous cette forme. Pour les complément­s alimentair­es du moins, pas les médicament­s. À une condition non négociable: que les produits ne franchisse­nt pas les portes du salon. Non seulement ils l’ont fait, mais pas sous forme d’échantillo­ns. «Et ils ont vendu à tour de bras, on y est donc retourné pour saisir et j’espère qu’on a tout saisi. »

  boîtes saisies !

Difficile de savoir quelle quantité a pu être précisémen­t écoulée, mais 2302 boîtes de complément­s alimentair­es ont été saisies! A 80 euros l’unité… Et sans compter les médicament­s… Les deux étant interdits à des titres différents, puisque relevant de régimes légaux distincts (lire ci-dessus). Témoin de cette magouille vendredi, notre journalist­e et notre photograph­e avaient assisté à des ventes de boîtes avant que, se sachant photograph­ié, un homme ne retire ces élixirs de jouvence des rayons et affirme, sans effet de manche, que ces produits estampillé­s Japan Bio Products (JBP) étaient « des extraits de pur placenta humain de donneuses japonaises ». Autrement dit, des cellules humaines à appliquer sur d’autres corps humains. Beurk… «C’est tout à fait légal en Europe, se justifiait l’anonyme représenta­nt de JBP. Sauf pour les complément­s alimentair­es pour lesquels nous n’avons pas encore la licence.»

« L’organisati­on a été surprise »

Ces mêmes complément­s pourtant vendus aux yeux de tous et objets « d’un certain nombre de bons de commande». Sans compter les centaines de cartes de visite diffusées en vue de ventes en ligne. Une attitude fustigée par le conseiller de gouverneme­nt-ministre des Affaires sociales et de la Santé, Didier Gamerdinge­r, qui souhaite « répondre pénalement » à ce scandale

sanitaire. « Sous forme d’amende a priori, on est en train d’étudier juridiquem­ent car c’est un cas de figure qui n’est pas courant», confie Alexandre Bordero, dédouanant l’organisati­on de l’événement. « Nous avions procédé à un contrôle sanitaire la veille, le Congrès est organisé par des médecins et chapeauté par l’Université de Nice… L’organisati­on s’est juste fait avoir par ces gens de très mauvaise foi. Elle a été surprise. » Si des interventi­ons, comme des contrôles sur les démonstrat­ions d’injections, avaient déjà eu lieu les années précédente­s, jamais aucune saisie n’avait été opérée. Une première qui implique une jurisprude­nce à la hauteur. « Ils ne seront pas au prochain salon, ça, c’est sûr », prévient Alexandre Bordero. Ajoutant : « C’est très mal perçu par les autres exposants qui suivent les règles. »

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(Photo J.-F. Ottonello) Un responsabl­e de la société incriminée avait rapidement vidé ses étagères à la vue de l’objectif de notre photograph­e. Mais le mal était fait.
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