Monaco-Matin

« Vous êtes des cheminots en robe noire ! »

Après un incident entre le président de la cour d’assises des Alpes-Maritimes et les avocats grévistes du barreau de Nice, la salle d’audience a été occupée tout l’après-midi. Ambiance

-

La pendule de la cour d’assises des Alpes-Maritimes, trônant imperturba­blement au-dessus de la porte d’entrée, vient à peine d’afficher 14 heures. Soudain, près de 80 avocats investisse­nt la salle d’audience. En rangs serrés, derrière leur bâtonnier, Valentin Cesari. Objectif : demander le renvoi du procès en appel d’un violeur. Le barreau niçois est en grève depuis cinq jours pour protester contre la réforme de la justice et fait renvoyer toutes les audiences. À la fin de la courte allocation du bâtonnier, le président de la cour d’assises, Patrick Véron, mâchoire serrée depuis le début, perd soudain ses nerfs : «Votre mouvement est stupide et ridicule. Vous êtes des cheminots en robe noire, vous trahissez votre devoir d’avocats, vous êtes la honte de la profession ! ».

Plus de deux heures d’occupation

Puis il refuse pêle-mêle le renvoi, menace de faire évacuer la salle et quitte l’audience furibard. Le tout dans le brouhaha réprobateu­r des avocats. Me Paul Sollacaro harangue ses confrères: «Voilà, mes chers confrères, voilà ce que sera le tribunal criminel !» Une allusion à la réforme de la justice en cours. Le tribunal criminel aurait vocation à remplacer le jury populaire des cours d’assises par des juges profession­nels pour les crimes punis de quinze ans ou de vingt ans de réclusion. S’ensuivront plus de deux heures d’occupation de la salle d’audience par les avocats, dans la confusion générale. Une situation totalement inédite. Les jurés sont perdus, ne savent plus à quel saint se vouer. La clim’ de la salle d’audience pointe aux abonnés absents. La rumeur court chez les avocats qu’elle a été coupée sciemment. Fake news ? L’ambiance devient suffocante au sens propre comme au figuré. « Ça sent le vestiaire de foot là-dedans », s’amuse en nage un avocat qui ressort prendre une bouffée (Photo G. L.) d’air frais. Puis la présence d’une commissair­e de police vient accréditer la thèse qu’une interventi­on des forces de l’ordre. Il n’y en aura point. Dans un coin, une femme pleure. Elle est l’une des deux victimes partie civile du procès du violeur. L’homme, détenu, avait été condamné à 13 ans de réclusion criminelle en première instance. « Je peux comprendre leur mouvement de grève, témoigne la jeune femme. Mais ce qui me dérange

 ??  ?? Les avocats ont occupé durant plus de deux heures la cour d’assises des AlpesMarit­imes à Nice.
Les avocats ont occupé durant plus de deux heures la cour d’assises des AlpesMarit­imes à Nice.

Newspapers in French

Newspapers from Monaco