Le projet de loi polémique sur l’immigration à l’Assemblée
Débats enflammés en vue sur ce texte qui cristallise les tensions, chez les élus comme les ONG
Semaine tendue à l’Assemblée nationale. Majorité divisée, opposition remontée : la présentation du texte, hier soir, a donné le coup d’envoi des débats sur le controversé projet de loi « Asile et immigration ». Celuici prévoit notamment de réduire à six mois les délais d’instruction de la demande d’asile pour entamer rapidement le travail d’intégration des réfugiés et, à l’inverse, faciliter la reconduite à la frontière pour les déboutés. La France a enregistré plus de 100 000 demandes d’asile l’an dernier, en hausse de 17,5 % par rapport à 2016.
Un millier d’amendements
Manifestation de ces crispations, la porte du Palais-Bourbon a été taguée dans le week-end de l’inscription «Accueil de merde» (cinq personnes ont été interpellées). Et hier, plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés aux abords du bâtiment, emmenés notamment par la Cimade (qui a également mené d’autres actions à Paris et en régions) et la Ligue des droits de l’Homme, pour dénoncer une « loi liberticide». Chez les parlementaires, et malgré les efforts déployés depuis plusieurs mois par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, qui incarne la ligne dure de l’exécutif, plus d’un millier d’amendements ont été déposés, dont deux cents de la part des députés La République en marche (LREM). Les contestataires au sein de la majorité pourraient se voir exclus s’ils ne votent pas en faveur du texte, a prévenu le président du groupe, Richard Ferrand. Parmi les points sensibles figurent notamment les divers amendements prévoyant d’ouvrir le marché du travail aux demandeurs d’asile, dans le sillage du rapport d’Aurélien Taché (LREM) préconisant un délai de six mois après le dépôt de la demande (contre neuf actuellement), et également la réécriture du « délit de solidarité » pour certaines personnes venant en aide aux migrants. Du côté de l’opposition, les socialistes jugent que le texte «tourne le dos à nos principes constitutionnels» , et la gauche de la gauche est vent debout contre un projet de loi «inutile et dangereux», surfant «sur la logique de la peur». Les Insoumis ont appelé les autres groupes politiques à un «sursaut de convergence républicaine et humaniste».
Trop timoré pour la droite
La droite, elle, dénonce «ambitions bien modestes» et «laxisme». Elle souhaite pouvoir fixer des quotas d’accueil annuels, limiter le regroupement familial, et éloigner plus facilement les étrangers représentant une menace. Les élus UAI (UDI, Agir et Indépendants) indiquent de leur côté vouloir «équilibrer» les mesures du texte. Enfin, la présidente du FN et députée du Pas-de-Calais Marine Le Pen devrait s’impliquer particulièrement sur ce texte qui va, selon elle, «accélérer» l’immigration. L’Assemblée se prononcera à l’issue des échanges, vendredi, sur l’ensemble du texte, mais sans vote solennel en raison de la pause de deux semaines qui s’ensuit dans les travaux parlementaires.