Le monde mystérieux et envoûtant d’«Abstract»
Tel est le titre du long ballet de Jean-Christophe Maillot, donné en création mondiale
Un monde sorti du chaos originel où vont, dans l’obscurité, des individus mi-hommes mi insectes. Ce monde obscur a un chef. Ou plutôt une chef – car le chef est une femme. Des accouplements se font, des groupes s’organisent, la danse explose. Quelle histoire Jean-Christophe Maillot veut-il nous raconter dans son ballet « Abstact », qui a été créé jeudi au Grimaldi Forum ? Ce qu’il nous donne à voir, qui est servi par une troupe de splendides danseurs, est en tout cas impressionnant. Il y a dans cette célébration d’un monde primitif quelque chose du « Sacre du Printemps ». « Abstact » serait-il le « Sacre du Printemps » de Maillot ? Il y a une vraie force dans ce ballet. Un réel suspens. Et puis, soudain, l’intérêt retombe. Ce ballet de quelque cinquante minutes est trop long d’un quart d’heure. Avec quinze minutes de moins, on serait sorti totalement conquis.
Blocs sonores riches et denses
Dans ce spectacle, la musique est, elle aussi, donnée en création mondiale. Elle a été commandée par le Printemps des arts, partenaire de l’opération, au compositeur Bruno Mantovani, qui n’est autre que le directeur du conservatoire de Paris. Il s’agit d’un concerto pour violoncelle et orchestre – pas si concertant que ça puisque violoncelle et orchestre s’expriment presque toujours séparément, l’orchestre étant dans la fosse et le violoncelle sur scène. L’oeuvre est superbe au niveau de l’orchestration. Ses blocs sonores riches et denses génèrent des atmosphères mystérieuses et miroitantes. Le violoncelle, lui, a tendance à s’acharner sur des notes répétées, qui montent souvent par demi-tons. Jeudi, au moment des saluts, Jean-Christophe Maillot s’est agenouillé devant ce maître violoncelliste qu’est Marc Coppey. Le Philharmonique, trop sonorisé pour paraître « naturel », était, lui, fermement dirigé par Pascal Rophé. En première partie du spectacle, on a droit au « Concerto » de Balanchine, dans lequel violon de Liza Kerob participe à la grâce générale des danseurs du Ballet de MonteCarlo. Là, rien à dire : un chef d’oeuvre ! (Photos Alice Blangero-Ballets de Monte Carlo)