«On nous demande d’être des exemples à  ans»

Olivier Dacourt, ancien international français et consultant sur Canal+

Il ressort de ce documentaire un lien de confiance brisé entre ces joueurs et les journalistes…

On voit qu’ils ne sont pas prophètes en leur pays. En France, Poulidor est plus connu qu’Anquetil… On n’aime pas ceux qui réussissent et on ne leur pardonne rien. On a l’impression que les joueurs sont des enfants gâtés parce qu’ils jouent au foot et gagnent de l’argent. Alors qu’à  ans, on est un gamin. On nous demande d’être des exemples alors qu’on n’est pas programmé pour. Si on ne fait pas de bêtises à  ans, quand les fera-t-on?

Un journaliste aurait-il pu recueillir ces confidences ?

Non. Franck (Ribéry) m’a dit: “Si ce n’est pas toi, je ne parle pas.”

La pression médiatique semble pourtant bien plus forte à l’étranger qu’en France, où le quotidien L’Équipe jouit d’un monopole…

Je vais prendre l’exemple de l’Italie parce que je connais bien. Le retourné de Cristiano Ronaldo [en demi-finale aller de Ligue des Champions à Turin, NDLR], s’il le met au Parc (des Princes), je ne suis pas sûr que les spectateurs applaudissent. En Italie, ce sont des connaisseurs de football parce qu’ils ont les radios, les journaux… En France, il y a L’Équipe et basta. En Italie, il y a une pression, alors qu’en France c’est nouveau tout ça. Il y a le PSG et Monaco, qui a eu un parcours exceptionnel en Ligue des Champions, mais sinon on n’aime pas le foot.

Le Français est plus spectateur que supporter, et donc dans le jugement permanent…

Nos immenses sportifs, comme Pérec ou Karabatic, on les a montés très haut, pour mieux les descendre. Thierry Henry, il a une statue à l’Emirates et en France, quand on pense à lui, on pense encore à la main contre l’Irlande… Alors que c’est encore le meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France! La main, en Argentine, c’est la main de Dieu. Il nous a qualifiés pour la Coupe du monde et on l’a massacré.

Vous pointez aussi du doigt la pression exercée par l’entourage des joueurs…

Oui mais la vérité, c’est le terrain. Quand t’es bon, t’es jugé sur tes performances. Que les gens te sifflent ou pas, tu t’en fous. T’es conditionné. Depuis que tu as - ans, c’est la jungle dans ta tête. Mais tes parents, non, c’est dur pour eux.

Avez-vous une suite en tête et avec quels joueurs ?

J’aurais pu mettre Balotelli, parce qu’être noir en Italie et adopté, et y arriver, c’est fort. Mais est-ce qu’il est prêt à en parler? Il pourrait y avoir une suite en tout cas, on y travaille.