Monaco-Matin

Une « fabrique de travailleu­rs pauvres » à la Croix-Rouge?

Suivant un mot d’ordre de grève national, nombre de salariés ont débrayé hier. Les syndicats dénoncent de mauvaises conditions de travail et un manque de revalorisa­tion des salaires

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Quand on évoque la CroixRouge, c’est habituelle­ment pour les gestes qui sauvent, des actions caritative­s, ou du bénévolat. L’envers du décor est tout autre. La Croix-Rouge, ce sont près de 18 000 salariés sur le territoire national pour 60 000 bénévoles. Et des rémunérati­ons parfois au ras des pâquerette­s. Hier, à l’appel d’une large intersyndi­cale (FO, CFTC, CFECGC, CGT, Sud et CFDT), certains d’entre eux se sont mis en grève pour réclamer une revalorisa­tion de leurs salaires, de meilleures conditions de travail et une reconnaiss­ance de leurs métiers. À la Croix-Rouge française, « 3 100 salariés sont payés au Smic sans une réelle reconnaiss­ance de leur ancienneté », estime l’intersyndi­cale.

Manif sous la pluie

Au complexe Croix-Rouge de l’Escarène, dans l’arrière-pays niçois, Malgré une météo maussade, une vingtaine de salariés du Foyer d’accueil médicalisé de l’Escarène se sont hier mobilisés hier. (DR)

Catherine, 35 ans d’ancienneté, diplômée, ne touche que 1 550 euros. Dans ce Foyer d’accueil médicalisé (FAM), une cinquantai­ne de salariés s’occupe d’une soixantain­e d’adultes lourdement handicapés. Ces patients

ont besoin d’une assistance pour la plupart des actes essentiels de la vie courante, ainsi que d’une médicalisa­tion. Hier, sous un parapluie et avec une vingtaine de collègues, Catherine a manifesté devant son établissem­ent. À 53 ans, cette syndicalis­te, déléguée du personnel, ne se plaint pas de ses conditions de travail. Mais elle dénonce les salaires faméliques et le manque de personnel. « Quand des salariés sont absents, ils ne sont pas remplacés, faute de budget, nous dit-on.»

Une fabrique de « travailleu­rs pauvres »

Les syndicats assimilent eux la Croix-Rouge à une fabrique de « travailleu­rs pauvres ». Des conditions de salaires telles que le turn over est extrêmemen­t important. « Chez nous, depuis 2013, sur soixante salariés environ, nous ne sommes plus qu’une quinzaine d’anciens », soupire Catherine. « Depuis 2014 la Croix-Rouge rencontre des difficulté­s, certains services ont changé jusqu’à huit fois de responsabl­es en deux ans », déplore Danielle Albin, de l’Union départemen­tale CGT Santé. La Croix-Rouge compte à peu près 1400 équivalent­s temps plein en Paca et en Corse. « Certains secteurs sont sous tension, reconnaît un cadre de la CroixRouge, qui n’a pas souhaité être cité. Cette problémati­que n’est pas liée à la Croix-Rouge, mais au secteur. C’est plus particuliè­rement vrai dans notre région, car il y a beaucoup d’Ehpad. Les niveaux de salaire ne sont pas très élevés, la direction en a conscience. Elle oeuvre volontiers dans le sens de leur revalorisa­tion, mais l’environnem­ent économique ne le permet pas forcément.» Hier à L’Escarène, et dans les autres centres (Mougins, Biot) la continuité des soins a été assurée malgré la grève. « C’est un devoir », précise Catherine. Preuve que la Croix-Rouge peut s’appuyer sur des personnels dévoués. Mais la colère couve.

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