La chirurgie de l’épaule progresse au bénéfice des patients Soins
Autour du Pr Pascal Boileau, quelque 1 000 chirurgiens du monde entier se sont réunis à Nice pour s’informer des dernières avancées dans la chirurgie de l’épaule. Mise au point
Il y a 25 ans encore, les médecins décourageaient leurs patients qui se plaignaient de douleurs à l’épaule de recourir à la chirurgie, au motif que ça ne marchait pas. « Et ils avaient raison ! », commente l’un des meilleurs spécialistes au monde de cette chirurgie, le Pr Pascal Boileau, chef de l’Institut universitaire locomoteur et du sport (IULS) du CHU de Nice. « À cette époque, on ne connaissait pas bien les pathologies de l’épaule, les techniques étaient peu développées. Comme il s’agit d’une articulation fragile, on préférait ne pas prendre de risque », développe le spécialiste. Les temps ont résolument changé. Avec la progression des connaissances, l’évolution des techniques, la chirurgie de l’épaule a pris son envol. « L’avènement il y a une vingtaine d’années de l’arthroscopie [technique permettant d’effectuer des gestes chirurgicaux sans ouvrir l’épaule, Ndlr], a marqué un tournant ; moins de douleurs, de rançon cicatricielle (esthétique), etc. Les avantages sont multiples. Aujourd’hui, à l’exception près – avec quelques nuances – de l’implantation de prothèses et du traitement des fractures, on peut réaliser la plupart des interventions sous arthroscopie. » Les « candidats » à cette chirurgie sont eux aussi de plus en plus nombreux. Leur obsession: ne plus avoir mal. « D’origine à la fois mécaniques et inflammatoires, les douleurs à l’épaule sont très invalidantes : les patients se plaignent de ne plus dormir, d’être très fatigués, ils n’arrivent plus à lever le bras et ils ont donc beaucoup de difficultés à se servir de leur main… » Ces douleurs sont souvent associées à une pathologie tendineuse fréquente, la rupture de la coiffe des rotateurs, nom donné aux tendons qui s’insèrent autour de la tête de l’humérus et participent aux mouvements d’élévation du bras et de rotation de l’épaule .«Il s’agit essentiellement d’une ‘‘pathologie d’usure tendineuse’’ qui atteint les hommes d’âge mûrs, et en particulier ceux qui ont longtemps travaillé, bras en l’air ou qui ont réalisé des travaux répétitifs.» Plus rarement, cette pathologie trouve son origine dans des traumatismes de l’épaule. La réparation de la coiffe consiste à amarrer le(s) tendon(s) rompu(s) au niveau de son (leur) emplacement naturel autour de la tête de l’humérus. «Ce geste est réalisé sous arthroscopie, c’est-à-dire sans ouvrir l’articulation de l’épaule. On respecte ainsi toutes les structures anatomiques et on accède à l’articulation sans agresser les muscles. »
Quand la prothèse est la seule solution
L’autre grande cause de douleur (et de raideur) est associée à l’usure prématurée du cartilage (arthrose) pour des motifs divers : susceptibilité génétique, maladie inflammatoire telle qu’une polyarthrite rhumatoïde, séquelles de fractures ou de luxations mal prises en charge… « Chez ces patients souffrant d’arthrose, l’épaule, en plus d’être raide et douloureuse, peut devenir quasi paralytique. Ils n’arrivent plus à utiliser ni la main, ni le bras. Tous les gestes de la vie courante représentent un véritable défi ! » Pour ces personnes très sévèrement atteintes, la prothèse s’avère parfois la seule solution. « Cette intervention a commencé à être réalisée il y a une vingtaine d’années. Parmi les patients implantés, beaucoup de personnes encore jeunes, en activité, souvent sportifs… Nous avons voulu savoir comment les (Photos DR/Sylvain Teissier) prothèses qu’on avait placées avaient subi l’épreuve du temps.» C’est ainsi que l’équipe du Pr Boileau a lancé une étude multicentrique auprès de 1 500 personnes souffrant d’arthrose et traitées par une prothèse d’épaule au cours des 20 dernières années.
Étude multicentrique
«Tous ces patients ont été revus avec 2 à 20 ans de recul. Il s’est agi, grâce à l’imagerie, de vérifier que la prothèse était toujours en place, qu’elle ne s’était pas descellée ni usée. On a aussi évalué les résultats cliniques, soit la mobilité de l’épaule. » Les résultats n’étant pas encore publiés, le Pr Boileau est contraint au silence. Il accepte néanmoins de nous confier dans un grand sourire : « Les patients vont bien ! » Une conclusion qui ne signe pas l’arrêt des recherches pour développer des prothèses toujours moins volumineuses. « On tend aujourd’hui