Cancer du sein : jamais seules
Le Pr Emmanuel Barranger du centre anti cancer Antoine Lacassagne à Nice a lancé une appli pour les patientes opérées du cancer du sein ou gynécologique. L’objectif : faciliter la transition hôpital domicile
Quand les patientes rentrent chez elles, après une opération du cancer du sein ou gynécologique, elles sont angoissées de ne pas avoir un lien facile avec l’équipe médicale,» pose le Pr Emmanuel Barranger. Des rougeurs, une douleur ? Elles ont besoin d’avoir des réponses à leurs questions. « Si elles sortent de l’hôpital c’est que pour nous tout va bien, poursuit le chef du pôle de chirurgie oncologique générale, gynécologique et sénologique du centre Antoine Lacassagne. Mais, elles peuvent néanmoins ressentir des douleurs, et, l’exprimer ça rassure.» En consultation, elles sont nombreuses à lui faire part de leur difficulté à joindre l’hôpital, à entrer en relation avec un professionnel de santé. Alors, Emmanuel Barranger a cherché comment améliorer l’information et le suivi des quelque 800 patientes qui subissent chaque année une opération du cancer du sein et gynécologique.
Suivi de rendez-vous, consignes de jeûne
Pour faciliter cette transition entre l’hôpital et le domicile, il a eu l’idée de créer une application. Simple d’utilisation et entièrement sécurisée. « CAL & you » – pour « Centre Antoine Lacassagne et vous » – est un outil interactif entre la patiente et l’équipe médicale. L’application est proposée lors du rendez-vous qui fixe la date d’opération «Il lui suffit de scanner le code-barres qu’on lui donne, et elle reçoit par sms son code d’accès. Elle télécharge l’appli gratuitement sur son smartphone.» CAL&You l’accompagne ensuite dans son parcours. Suivi des rendez-vous, plan, diaporama du service, consignes de jeûne, «check-list»... sont proposés pour les aider à ne rien oublier avant le jour J. « Cet outil permet aux patientes d’être actrices de leur prise en charge, et un malade qui participe activement vit mieux sa maladie.» Une fois de retour à la maison elles sont connectées via l’appli aux professionnels qui les ont prises en charge. Ils peuvent ainsi suivre leur état de santé. « A J+1, elles répondent à un questionnaire qui renseigne l’équipe médicale », poursuit le Pr Barranger. Il fait défiler les questions sur son smartphone: « Ressentez-vous des douleurs? » « Oui ou Non ». « Si c’est le cas, elles en précisent l’intensité avec ce curseur. »
Envoyer une photo... sur l’écran de l’infirmière
Une rougeur ? Une cicatrice tendue ? « La patiente peut prendre la photo et l’envoyer via l’application, ça évite de la faire venir à l’hôpital pour rien ou qu’elle dérange le médecin traitant. Mais ce n’est pas une téléconsultation, on garde le lien. » Ces informations arrivent sur l’écran de l’infirmière chargée du suivi, dans un bureau qui donne sur le hall du 4e étage. « En rouge, figurent les patientes qu’il faut rappeler, explique le Pr Emmanuel Barranger. Alors que ce ne sera pas nécessaire pour celles qui signalent que tout va bien. « L’infirmière a moins de personnes à contacter et elle consacre ainsi plus de temps à celles qui en ont besoin. »
Pour demain, des objets connectés
« Dans l’avenir, on pourra brancher sur l’application des objets connectés: par exemple pour savoir combien de pas par jour la patiente effectue, c’est un élément important car l’activité physique réduit le risque de récidive. On sera mieux renseigné sur l’état de santé des malades. » L’appli pourra aussi, par exemple, être utilisée pour les guider sur leur alimentation. « C’est aussi une forme de traitement qui participe à la baisse du risque de récidive. » De plus, cet outil devrait s’étendre à d’autres types d’opérations. Et ainsi améliorer le suivi médical. « L’objectif national c’est de passer à 60 % des interventions chirurgicales en ambulatoire, commente Emmanuel Barranger. C’est à dire qu’on entre le matin, et qu’on ressort le soir. Avec une appli on pourra améliorer la qualité de la prise en charge des patients, en dehors de l’hôpital. Qu’ils ne se sentent pas abandonnés à leur triste sort.»
1- Cinquante-quatre patientes ont déjà bénéficié de cette nouvelle appli.