La commune en rade de logements sociaux
Aujourd’hui, la ville ne compte que 5,74 % d’HLM. Elle est donc carencée. Pour y remédier, le maire réhabilite des habitations déjà occupées et crée des places en Ehpad
C’est une question soulevée dans tous les conseils municipaux. Pourtant, la faible part de logements sociaux à Villefranche-sur-Mer (5,74 %) a fait parler d’elle, dernièrement, avec la publication d’un article du Monde et d’un reportage de « l’Oeil du 20 h »
sur France 2. Ces deux enquêtes se sont intéressées aux « astuces » du maire LR, Christophe Trojani, pour « échapper aux HLM ». À savoir : la création de places en Ehpad pour « accroître le quota de logements sociaux » afin de s’approcher des 25 % imposés par la loi solidarités et renouvellement urbains (SRU). Une loi applicable à toutes les communes de plus de 3 500 habitants, comprises dans la Métropole Nice-Côte d’Azur. Contacté par téléphone, le maire s’amuse de l’intérêt soudain accordé aux appartements HLM de sa commune. « Je suis très heureux que Le Monde et France 2 s’intéressent à Villefranche-sur-Mer qui est l’une des plus belles villes de France.» Et d’ajouter, ironique : « Les mêmes qui faisaient peur aux Villefranchois en disant que j’allais transformer Villefranche en cité HLM me reprochent aujourd’hui le contraire. » Et par les mêmes, autant ne pas tenir compte du pluriel. Le premier magistrat vise, évidemment, Jean-Pierre Mangiapan, conseiller municipal d’opposition. Un élu (qui se revendique LR mais ne paye plus ses cotisations) de l’ancienne équipe de Gérard Grosgogeat qui souligne « l’incompétence » du maire. «Sous le mandat de Gérard Grosgogeat, on était la seule commune à ne pas être carencée, avance Jean-Pierre Mangiapan. 70 % des logements sociaux étaient gérés par le maire et 30 % par le préfet, ce qui permettait une intégration des demandeurs de Villefranche et du département. Aujourd’hui, il n’y a pas de mixité sociale et on ne maîtrise plus le logement, puisque l’attribution est réservée à 100 % au préfet. »
« Il y en aura % »
L’élu d’opposition critique également la décision de la municipalité de modifier le plan local d’urbanisme (PLU) adopté en 2013. Actée en 2015, cette correction prévoyait de réserver 30 % de la surface aux logements sociaux pour une construction supérieure à 500 m2 (sauf pour les zones destinées à l’habitat individuel), contre 1000 m2 dans l’ancien PLU. Une modification dont se félicite Christophe Trojani qui assure qu’« au début, il n’y avait que 5 % de logement sociaux, à la fin de [sa] mandature, il y en aura 15 % ». Dans ce pourcentage, il comprend : l’immeuble Gambetta (12), la résidence Le Rochambeau (54) et les fameux Ehpad, la Sofieta (42) et l’Escalinada (102), visés par les deux reportages du Monde et de « l’Oeil du 20 h ». « Je m’honore du projet de requalification de ces Ehpad, en créant des chambres de 22 m2, avec douche, qui comptent pour un logement social dans la loi SRU», se délecte le maire. Et d’ajouter : « Les personnes âgées ont autant le droit au bienêtre que les jeunes. » « Le projet d’Ehpad ne sera pas livré avant cinq à six ans. C’est bidon», tranche Jean-Pierre Mangiapan. Et de pointer: «Il n’y a pas de production de logements pour les actifs ou les gens dans le besoin. » Effectivement, tous les programmes de la municipalité consistent à transformer des logements déjà habités, ou alors, à créer des places en maison de retraite. La raison? « Pour des promesses électorales, le maire a refusé de construire des logements sociaux», affirme l’élu d’opposition. Et de poursuivre : « Il avait le devoir de préempter les terrains du 9, avenue Sadi-Carnot, (l’ancienne Poste et l’hôtel Riviera) et de la Villa César (avenue de Grande-Bretagne). Mais, les deux immeubles ont été rachetés par des marchands de bien pour être transformés en appartements de luxe. Si la Ville et la Métropole avaient saisi le service des Domaines, ils auraient pu faire baisser le prix du marché de moitié et créer des logements sociaux. » 1. Article « Villefranche-sur-Mer : les astuces d’un maire pour échapper aux HLM », paru le 30 avril, Christophe Trojani a porté plainte pour diffamation. 2. Le reportage a été diffusé le 30 mai sur France 2. Il est disponible en replay sur le site Francetvinfo.fr