CÔTE D’AZUR MERCANTOUR ( AU JUIN, ÉDITION) « Puiser au plus profond »
Les Azuréens Gilles Frediani, vainqueur l’an passé, et Sébastien Camus, grand favori de l’épreuve, s’élancent cet après-midi pour 145 km et plus de 24 heures d’efforts. Un sacré défi !
G.F. Adversaires tout court, car je suis loin d’avoir son niveau. Je vais me battre avec mon chrono, lui avec le sien. Je ne vais pas me calquer sur lui, car ce serait le meilleur moyen de me griller. S.C. Sur ce type d’épreuves, on est surtout à gérer le parcours et soi-même. La concurrence, on s’y intéresse uniquement dans les derniers kilomètres. Il ne faut pas s’amuser à se caler sur les autres, car c’est trop long et trop exigeant.
Gilles, vous avez quand même l’expérience de la victoire l’an passé ? G.F. Je ne l’ai gagné qu’une fois. Je connais le parcours, mais Sébastien en a gagné bien plus. Disons qu’il y avait moins de monde et que j’étais en forme, c’est pour cela que j’ai gagné.
Qui seront vos adversaires pour les premières places ? G.F. Son frère (Sylvain). Je pense que les deux frangins sont bien au-dessus des autres coureurs. Ils font des courses internationales que je ne fais pas. S.C. Ce qui est bien en Ultra, c’est que rien n’est joué d’avance. Je ne regarde jamais les start-listes avant le départ. Il y a une hiérarchie qui se fait sur le terrain, mais sur une épreuve comme celle-ci, tant qu’on n’a pas passé la ligne d’arrivée, ce n’est pas gagné. Vous pouvez avoir h d’avance à km de l’arrivée et vous effondrer. C’est ce qui est intéressant et donne les opportunités à chacun de faire une performance. Ça m’a souri quelques fois, mais ça peut aller dans les deux sens. Il faut rester humble et focalisé sur son objectif. G.F. Il ne faut penser qu’à sa course. L’an passé, j’ai commencé à y croire dans les derniers km.
Quelle est la clé pour gagner cet Ultra ? S.C. La gestion de l’effort est primordiale. Après, il y a une technicité des sentiers dans les A-M qui est un peu particulière. Il faut avoir le pied alpin, montagnard, pour enchaîner les descentes et ne pas perdre trop Gilles Frediani (à g.), vainqueur l’an passé, et Sébastien Camus, favori de cette édition, joueront les premiers rôles sur le km. (Photo R.L.) d’énergie dans ces parties-là.
Vous connaissez très bien le parcours, vous l’avez repéré ? S.C. Gilles le connaît très bien, car il a passé pas mal d’heures dessus l’an passé (rires). Moi je connais des secteurs, mais je vais le découvrir en intégralité.
Où est-ce qu’on le gagne, où est-ce qu’on le perd ? G.F. La course commence après Roquebillière (km ). Il ne faut pas avoir trop puisé dans ses réserves avant. S.C. On le perd avant si on part trop vite et on le gagne après si on a su gérer la première partie. G.F. L’an passé, il y a un traileur qui était parti très vite, que j’ai récupéré à Roquebillière et qui a fini très loin. Il ne connaissait pas assez et a subi la fin de parcours, avec des descentes techniques qui font très mal.
Quelle sera la vitesse moyenne ? G.F. Pas beaucoup. L’an passé, j’étais à environ km/h. S.C. Oui, ce sera entre et km/h. Il y a un endroit particulièrement redouté ? S.C. Il y en a plein, des cailloux à l’envers, des sommets à passer... G.F. Le piège, c’est surtout de partir trop vite.
La météo capricieuse des dernières semaines peut être ce piège ? S.C. Non, on est habitué à courir sous toutes les conditions. On peut partir sous la pluie et finir sous un gros cagnard. Ça dure tellement longtemps, plus de h, donc on n’aura pas le même temps sur toute la durée, surtout la nuit. On sera en altitude, on pourra avoir des modifications de températures rapides, qu’il faudra bien gérer. Sinon, ça peut être fatidique. G.F. La course ne va pas se jouer là. S’il pleut, ça va engendrer de la boue, des glissades, mais on est équipé pour.
Vous ne dormez jamais pendant la course ? S.C. Non, on n’a pas le temps. G.F. Sur les dix premiers, personne ne dort sur ce genre de course. h, on pense que c’est long, mais en fait ça passe très vite quand on court.
La fatigue est extrême ? S.C. Oui. On passe déjà h sans dormir, en partant à h. On va aller puiser au plus profond de nousmême. On va dépenser, en terme de calories, l’équivalent d’une semaine d’un sédentaire. Le métabolisme est extrêmement sollicité. Derrière, cela entraîne une grosse fatigue.
Comment se prépare-t-on à ça ? En faisant des entraînements très longs, en décalant le sommeil ? G.F. Le sommeil non, car il faut arriver reposé. Je fais quelques entraînements de nuit pour me réhabituer à la lampe et au contact avec le sol. S.C. Je fais de petites adaptations. Il faut arriver le plus reposé possible. Ma petite astuce, sur ce genre de départ, c’est de faire une grosse sieste en début d’après-midi pour reculer au maximum l’arrivée de la fatigue nocturne. Après, l’excitation fait qu’on tient toute la nuit.
Votre sortie la plus longue pour préparer ce km ? G.F. Je ne fais pas beaucoup de très longue distance. Ma plus longue course cette année, c’était km. Mais j’en ai fait beaucoup. Pour passer de km à km, ça se jouera beaucoup au mental. S.C. J’ai déjà couru à Madère, sur une course du circuit mondial, un km fin avril. Mais je n’ai pas les mêmes contraintes que Gilles, ou qu’avant, quand je travaillais. Je suis athlète professionnel et je peux m’entraîner tous les jours.
Comment se passe votre après-course ? Beaucoup de sommeil ? S.C. C’est déjà un gros plongeon au Vésubia (Vésubia Park à SaintMartin-Vésubie). La nuit qui suit, je vais dormir h-h. G.F. Comme les jambes sont toujours sur le rythme course, elles bougent encore la nuit. Alors je dors très peu celle qui suit. Après, ça s’arrange.
Vous avez le temps de penser la nuit, seul au milieu de la montagne ? S.C. Je suis dans une approche où je suis très concentré sur moi, ma course. Ça fait partie de la préparation mentale qui se fait en amont. On parle beaucoup de la prépa physique, mais cette prépa mentale est très importante. G.F. Je pense déjà à l’endroit où je vais poser les pieds, surtout la nuit. Mais je peux réfléchir à autres choses. Ça dépend si on est seul et de notre état de fraîcheur.
Où peut-on placer, en terme de difficultés, cette course par rapport aux autres grands Ultras nationaux ? S.C. Je cours sur le circuit international et je peux dire que ça fait partie des épreuves les plus difficiles. Il ne faut rien négliger. Nice, ans, enseignant et pompier volontaire. Club : Vésubie trail club. Vainqueur l’an passé en h’’’. Marié, un enfant (Théo, ans).