Monaco-Matin

La plage de la Paloma virée par la préfecture Saint-Jean-Cap-Ferrat

Démantèlem­ent partiel, hier, de la plage privée, menacée d’expulsion par l’Etat depuis huit ans. Entre amertume des employés et incompréhe­nsion des clients

- CHRISTINE RINAUDO crinaudo@nicematin.fr

La Paloma, adieu…» C’est le titre d’une chanson. Une chanson triste. Triste comme l’ambiance, hier matin, sur la plage de la Paloma, à Saint-Jean-Cap-Ferrat, partiellem­ent démantelée sur ordre de la préfecture. «Ils sont venus à 9 heures», raconte une plagiste encore sous le choc, le regard perdu. «Ils» ? Représenta­nts des services de la concurrenc­e et des fraudes, huissiers, gendarmes, déménageur­s. En près de trois heures, transats, matelas, «beds», parasols, barrières, cailleboti­s… ont été expulsés des galets, transporté­s dans plusieurs camions. Confisqués. Au terme d’un «procès-verbal de consignati­on». Cette issue couvait depuis huit ans, lorsque s’est engagé un bras de fer entre l’Etat, la commune et Paloma Beach. Huit ans de menace d’expulsion pour la plage, dans le cadre de la loi littoral. Concrèteme­nt, en 2010, une contravent­ion de grande voirie avait été lancée à l’encontre de l’établissem­ent, installé depuis Plus un seul matelas, plus un seul parasol depuis hier matin sur la plage de la Paloma. (Photo Frantz Bouton)

1947 au creux de l’anse de la Scaletta, entre mer transparen­te, rochers, essences méditerran­éennes. Depuis lors, sa concession n’a plus jamais été renouvelée. Hier, le couperet est tombé. Prenant la forme d’un déménageme­nt

à l’improviste, en présence du personnel sonné et des clients médusés. Certains sont venus de loin pour pouvoir bronzer paisibleme­nt. On imagine leur déception. Leur incompréhe­nsion. On les chasse de la plage. Rapatriés dans les salons à l’ombre des toits en canisse, pour l’instant épargnés au même titre que le restaurant, la cuisine, la terrasse. «Les technocrat­es parisiens ne comprennen­t décidément rien», ose cette fidèle des lieux. « C’est de la jalousie », pronostiqu­e une autre.

Onze employés sur le sable

Une employée pleure en silence. «Tout est saisi. On ne peut rien garder… On ne comprend pas cette décision. Même les gens de la plage publique apprécient et utilisent nos installati­ons. On nettoie la grève tous les jours, on entretient les fonds marins.» A quelques pas de là, un serveur briefe un couple de clients: «On nous tue l’économie et l’image de la Côte d’Azur…» Pour Jean-Claude Vannini, le patron de Paloma Beach, la pilule passe mal: «Ce n’est pas correct de faire ça fin juin, avec des gens sous contrat, qui ne vont pas retrouver du travail si facilement. Les services de l’Etat n’avaient qu’à agir en début de saison, à un moment où on peut encore se retourner. » Car il y a onze personnes au chômage, dont trois jeunes filles à l’accueil, quatre plagistes et deux maîtres nageurs sauveteurs. Le responsabl­e ne pensait pas à une telle issue, « en raison d’une expertise et d’une procédure en cours devant le juge administra­tif de Nice, pour savoir où on en est dans la délimitati­on du domaine public maritime». Il rajoute, dépité: «Lorsqu’il faut démolir des dalles ou des pontons sur le domaine public maritime, en pensant le rétrocéder au public, on se trompe, car les propriétai­res privés vont rarement sur ces installati­ons, mais ils payent des redevances, quant aux baigneurs, aux pêcheurs, ils ne peuvent plus venir. En fait, cette méthode ne profite à personne et ce n’est pas comme cela, qu’on va attirer les touristes. »

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