MONACO Affaire Rybolovlev : la Cour d’appel rejette les recours P
Inculpés après une plainte de Tania Rappo pour atteinte à la vie privée, Dmitry Rybolovlev et Tetiana Bersheda avaient déposé plusieurs requêtes en nullité. La cour vient de statuer
C’est une décision judiciaire importante que vient de prendre la Cour d’appel de Monaco dans l’affaire qui oppose Dmitry Rybolovlev et Tetiana Bersheda d’une part, et Yves Bouvier et Tania Rappo d’autre part. La juridiction vient de statuer et rejette toutes les demandes de l’ex-oligarque russe et de son conseil. Des requêtes qu’ils avaient tous deux déposées, estimant que les investigations menées par le juge d’instruction étaient entachées de nullité. Flash-back. Après la plainte déposée le 9 janvier 2015 par deux sociétés de la famille de Dmitry Rybolovlev contre le marchand d’art Yves Bouvier, ce dernier est placé en garde à vue le 25 février 2015 et inculpé pour escroquerie et complicité de blanchiment.
SMS
Six mois plus tard, Tania Rappo, présumée complice du marchand d’art suisse et également inculpée pour blanchiment, dépose une plainte pour atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale contre Dmitry Rybolovlev et son conseil Tetiana Bersheda. En cause : un enregistrement audio réalisé par Tetiana Bersheda avec son iPhone, à l’insu de Tania Rappo, lors d’une soirée le 23 février 2015, chez le milliardaire russe. Le juge d’instruction Édouard Levrault est chargé d’instruire le dossier. Dmitry Rybolovlev et Tetiana Bersheda sont à leur tour inculpés. Le téléphone portable ayant servi à l’enregistrement est mis sous scellés, puis expertisé. En juillet 2017, un rapport d’expertise arrive sur le bureau du juge d’instruction. L’expert a reconstitué des fragments de données qui avaient été supprimées, dont 8 900 SMS émis ou reçus sur la période du 20 juillet 2013 au 17 novembre 2015.
Des textos qui ont suscité beaucoup d’intérêt sur les échanges entretenus entre Tetiana Bersheda et plusieurs représentants des autorités monégasques…
« Une justice frappée du sceau de l’indépendance»
Maître Denis Fayolle, avocat de Tania Rappo, se réjouit aujourd’hui de la décision de la Cour d’appel. « C’est une décision extrêmement importante car elle valide le travail du juge d’instruction; travail accompli dans des conditions délicates. La Cour a retenu notre argumentation et a rejeté toutes les requêtes en annulation. Il est remarquable, par ailleurs, de constater que ceux qui invoquaient de grands principes avaient totalement piétiné ces principes-là pour permettre à l’origine la mise en cause de Mme Rappo.» Après une longue période où il fut question, dans la presse, de « Monacogate », dans le cadre des révélations liées notamment à ces échanges de SMS, c’est, pour Me Fayolle, la preuve que l’institution judiciaire reste l’un des piliers de l’État de droit en Principauté. « Je considère que c’est une décision de justice
frappée du sceau de l’indépendance. Mme Rappo, pour sa part, se réjouit de cette décision qui démontre que la justice s’attache désormais, en toute indépendance, à mettre en lumière les conditions troublantes qui ont entouré son implication à l’origine de cette affaire. »
« Contraire à toutes les règles »
Les avocats de Dmitry Rybolovlev et Tetiana Bersheda n’ont évidemment pas la même analyse. Pour Maître Hervé Temime, avocat de Dmitry Rybolovlev, « cette décision fera bien évidemment l’objet d’un pourvoi. Selon moi, elle est contraire à toutes les règles qui protègent l’équilibre de la procédure pénale, les droits de la défense et le secret professionnel de l’avocat. Ces règles sont protégées par des textes nationaux et européens et je me battrai jusqu’au bout pour leur respect. Cette décision s’inscrit malheureusement dans un contexte médiatique délétère auquel les juridictions qui seront appelées à statuer dans cette affaire devront résister. » Maître Thomas Giaccardi, qui défend les intérêts de Tetiana Bersheda, est sur la même ligne que Me Temine et confirme vouloir aller « jusqu’à la Cour européenne des Droits de l’Homme s’il le faut pour défendre les droits de sa cliente ». On est très loin de voir l’issue de cette affaire judiciaire.