santé sans frontières?
«On va mettre les moyens pour passer d’une situation de retard à une situation d’avance»
« Aujourd’hui, on n’invente rien. On veut prendre ce qui a marché ailleurs, notamment dans les pays du Nord de l’Europe comme l’Estonie, et l’adapter à la Principauté. » Mardi matin, à l’auditorium du Lycée technique et hôtelier, Frédéric Genta s’exprimait devant une petite cinquantaine de médecins de Monaco pour expliquer la mise en place toute prochaine des premiers services numériques pour tous. Dans six à huit mois, ce devrait être la prise de rendez-vous médical, depuis un ordinateur ou via une application sur smartphone, avec un médecin de ville ou du Centre hospitalier PrincesseGrace. Un premier pas car cette application permettra, à terme, d’accéder à «une trentaine de services », explique Karim Hatem, senior partner Santé et Sciences du vivant de la société parisienne Ylios, qui a signé un contrat avec le gouvernement pour le déploiement du système. C’est une petite révolution tant sur le fond que sur la forme. Avec cette prochaine mise en place, tout le monde est sollicité, tout le monde peut participer, tout le monde est écouté. Et Frédéric Genta lance aux médecins : « Ditesnous, aidez-nous ! Je suis très preneur ; je ne suis pas médecin. »
Parler, échanger, partager
Une méthode de travail qui bouscule quelque peu les habitudes de fonctionnement de l’administration. « Nous voulons aller de l’avant de manière volontariste, explique Didier Gamerdinger. Les médecins sont associés au fur et à mesure. Il faut absolument qu’ils s’y retrouvent. » Et le conseiller de gouvernement-ministre des Affaires sociales et de la Santé
prend le micro : « Parlezvous, échangez. Il est important d’avoir une réflexion conjointe avec des outils que nous partagerons. Le cadre juridique sera tracé évidemment. Nous ne fonctionnons pas en vase clos. Comment ça va se passer avec la France ? Nous avons commencé à parler avec la CPAM qui a la même vision que la nôtre. Il est inconcevable que nous ne puissions pas trouver des solutions nouvelles. Il faut trouver les bonnes réponses juridiques pour qu’il y ait de la fluidité. Au niveau local, les esprits sont prêts. Il s’agit de se revoir à intervales réguliers. Nous pensons créer un forum de discussions sur lequel nous pourrions réagir. »
Un dossier médical numérique en
Une culture nouvelle pour un monde nouveau bien planifié avec une « feuille
de route » précise. Premier semestre 2019 : déploiement du cloud souverain, une entité numérique régalienne. L’outil permettra rapidement la prise de rendez-vous et la téléconsultation. Mais l’objectif est bien plus ambitieux.
« Le cloud sera dépositaire du dossier médical du patient, explique Didier Gamerdinger. Avec un identifiant numérique et un code secret (déployés le premier semestre 2020 selon Frédéric Genta, NDLR),
n’importe qui pourra confier ses données liées à sa santé au médecin qu’il consulte, ici comme ailleurs. Ce cloud a un coût pour l’État, c’est évident. Mais ce seront des économies significatives sur les examens redondants par exemple. Ce dossier médical numérisé permettra de mettre de l’intelligence dans la relation. » Avec son regard neuf, Karim Hatem souligne :
« La stratégie est ambitieuse et le potentiel est très grand. Ce qui est difficile, c’est que la santé touche de multiples acteurs. Par sa taille, Monaco a l’agilité pour lui. » À terme, le cloud
pourra contenir « des données génomiques ou aider la population vieillissante depuis son domicile par exemple. Nous pourrons faire de la santé prédictive ou des analyses en terme de santé publique. » Pour l’heure, il s’agit de franchir la première étape.
« La chance que l’on a, c’est la forte volonté de tous,
note Didier Gamerdinger.
L’État mettra les moyens. Nous avons la possibilité de passer d’une situation de retard à une situation d’avance. » Un vent nouveau souffle donc sur le Rocher…