Marseille: quand l’Aquarius pourra-t-il reprendre la mer?
En escale technique de routine, après une quarantième mission jugée éprouvante, l’équipage du navire de SOS Méditerranée est dans l’incertitude sur la date et les conditions de son prochain départ
L’équipage de l’Aquarius est fatigué, mais surtout révolté. Fatigué par une quarantième mission de sauvetage en Méditerranée centrale «particulièrement compliquée et éprouvante », selon Francis Vallat, le président de l’association SOS Méditerranée qui affrète l’Aquarius. Révolté par les incertitudes qui pèsent désormais sur la capacité du bateau à renouveler ces missions, après que le Conseil européen a réaffirmé sa volonté de renforcer les capacités d’intervention des garde-côtes libyens. Garde-côtes qui, selon les marins de l’Aquarius, « ne font pas de sauvetage, mais de l’interception, pour ramener les naufragés vers leurs côtes ».
Loin de son port
« Nous sommes bien loin de notre port d’attache qui est Catane, et de Malte, a indiqué hier à Marseille Frédéric Penard, le directeur des opérations. Loin aussi de notre zone d’intervention habituelle, ce qui nous contraint à cinq jours de navigation supplémentaires. » L’Aquarius est à quai depuis vendredi, pour une de ses escales techniques visant à changer d’équipage et renouveler ses équipements. Ses marins ont été les témoins, dimanche dernier, de départ massifs de migrants des côtes libyennes, « six à sept embarcations emportant plus de 1 000 personnes », et d’interventions des garde-côtes libyens « avec retour vers leurs côtes ». « Il nous a été impossible de leur porter assistance. Nous sommes témoins d’un blocage qui semble s’organiser vis-à-vis des organisations non gouvernementales. Le Conseil européen soutient ces garde-côtes, et l’Organisation maritime internationale a officialisé un centre de coordination des sauvetages en Libye. »
Le droit de la mer
Pour l’équipage de l’Aquarius, cette nouvelle organisation des secours, encore floue, vise à intercepter davantage de personne en mer, pour leur fermer les portes de l’Europe, au mépris de la loi de la mer. «Depuis deux ans, nous avons secouru 29 319 personnes, et 280000 autres l’ont été par d’autres bateaux. Nous ne comprenons pas que nous soyons les seuls à rappeler que le droit maritime et humanitaire doit s’appliquer en Méditerranée. Il faut que tout le monde maritime se mobilise. » Quand repartira l’Aquarius ? « Pas demain, c’est sûr, a indiqué Sophie Beau, directrice générale de SOS Méditerranée. Nous devons prendre le temps de comprendre ce qui se passe. Mais nous restons opérationnels, et notre objectif est de repartir au plus vite.