Ligne Nice-Cuneo-Vintimille: «On rend une copie propre»
Directeur d’opérations chez SNCF Réseau, Cheikh Ndiaye revient sur dix mois de chantier de modernisation et de sécurisation, alors que les trains circuleront de nouveau demain
Après dix mois (dont deux en supplément) de longue attente, les travaux de sécurisation de la ligne Nice-Cuneo-Vintimille – entrepris sur le tronçon entre Breil et Limone – arrivent à leur terme. Des trains pourront de nouveau circuler sur l’ensemble du tracé dès demain matin. On fait le point sur la situation avec Cheikh Ndiaye, directeur d’opérations chez SNCF Réseau (le maître d’ouvrage).
Pourquoi un tel retard ? Plusieurs facteurs nous ont obligés à prendre cette décision. Nous avons rencontré divers soucis sur la voie. Colas Rail n’est pas entièrement responsable pour autant : une faille géologique a été découverte au-dessus de Breil, fin novembre. Les trains du chantier n’ont pas pu quitter la gare tant qu’elle n’était pas comblée. Nous avons aussi subi des aléas d’ordre climatique avec deux semaines de neige à la mijanvier. Quant à la falaise tombée à l’Escarène, elle a également eu un impact vu que l’entreprise Colas devait acheminer des matériaux à ce moment-là. Autre problème : des pannes radio. Or nous étions obligés d’avoir des liaisons avec la société Sferis, pour des raisons de sécurité.
Des usagers se sont montrés agacés que le report soit mis sur le dos des cheminots… Les mouvements de grève ont contribué mais essentiellement parce que le train qui mesure la géométrie n’a pas pu circuler les et mars comme prévu. Alors qu’il est indispensable. Si ce train avait pu passer, nous aurions pu rouvrir la ligne sans que l’ensemble des travaux ne soit fini. La décision du report a été prise le avril, quand nous n’avions plus le choix. L’engin devant être réservé entre trois et six mois en avance, on a obtenu une nouvelle date début juillet.
Les rumeurs disaient que l’Italie avait proposé d’en prêter un… Sauf que c’est tout à fait impossible. La mesure doit absolument être faite par un train français. Pour la simple raison que les paramètres mesurés sont différents d’un pays à un autre.
Le système de sécurité italien a-til pu être installé, au final ? Les travaux sous la responsabilité de RFI (Réseau ferroviaire italien) ont accusé beaucoup de retard. Entre autres, parce que les balises ne sont arrivées que le avril. Aujourd’hui, le système de freinage d’urgence en cas de franchissement d’un signal fermé (SCMT) n’est donc pas encore mis en service. Mais il n’a jamais conditionné la réouverture de la ligne.
Quand sera-t-il fonctionnel ? Vers mars . Les travaux sont terminés sur la partie qui était fermée. Il reste à les finaliser entre Breil et Vintimille. Il faut par ailleurs attendre les autorisations de l’EPSF (l’autorité française de sécurité ferroviaire). C’est le seul organisme qui peut se prononcer sur la compatibilité d’un système complètement étranger. Mais ces délais, pour le coup, on ne les maîtrise pas.
Quels trains circuleront dès demain matin ? Il y aura deux allers retours des trains italiens et quatre allers retours français. Nous prendrons pour notre part le deuxième train, celui avec un guide à bord. On organisera aussi une cérémonie officielle avec les Italiens. Reste à fixer une date.
Quid de la convention de ? C’est un sujet que l’on n’a pas encore résolu. Ça avance, mais pour l’heure, rien n’est signé. Or cette convention de gestion doit statuer sur qui finance quoi. Aujourd’hui, la France exploite et l’Italie assure la maintenance. Mais si on veut la pérennité de la ligne, cette question devra être au coeur des débats. D’autant que la région Piémont s’engage à investir dans une deuxième phase de travaux à condition que la convention soit révisée. C’est une question gérée par les États. Nous, on milite pour que les deux gestionnaires et les deux régions concernées aient aussi leur mot à dire.
Quand est-ce que ces travaux pourraient démarrer ? Pas avant . Il nous faut boucler les budgets. La France s’est engagée à verser millions, l’Italie . Pour le moment, on n’aurait que ça. Il faut se remettre autour d’une table avec tous les partenaires pour savoir quelle fonctionnalité donner à ces millions. Pour la première phase, il s’agissait de sécurisation. On pourrait, pour la déterminer que la priorité est de rehausser la vitesse sur la section entre Breil et Saint-Dalmas-de-Tende. On pourrait ainsi gagner quelques minutes sur le temps de trajet.
Quelles sont les particularités de cette ligne ? Son principal atout, c’est qu’elle n’est pas concernée par l’hypothèse d’une fermeture vu
qu’elle est transfrontalière. Elle ira dans le sens de la pérennisation. L’inconvénient, c’est qu’elle est très utile surtout entre mai et fin septembre. Et il s’agit d’une ligne de montagne, avec des reliefs, des tunnels, peu d’accès. Forcément, les coûts de maintenance sont donc très élevés. D’autant qu’on vient de rajouter des installations avec les filets de protection, etc. Mais bonne nouvelle : on va acheter un engin spécifique – une sorte de nacelle élévatrice – qui sera dédié à la ligne.
Des riverains sont venus vous voir durant les travaux ? Oui, pour des questions d’ordre général: réouverture, vitesse, pérennité. On les a rassurés sur le fait qu’il serait illogique de faire
des travaux d’une telle ampleur si l’enjeu était de fermer la ligne. Ils voulaient aussi une garantie par rapport au respect du planning. On leur a confirmé que la réouverture aurait bien lieu le juillet. Quand le tunnel de Tende a été fermé, on nous a demandés s’il était possible de rétablir une liaison entre Limone et Vievola. On aurait certes rendu un service immédiat, mais ça aurait impliqué un arrêt des travaux… et donc davantage de retard. Ce qu’on veut dire aujourd’hui, c’est que tous les travaux sous la responsabilité de SNCF Réseau sont terminés. On rend une copie intégrale propre.