Ces passionnés ont remis à flot des navires à l’abandon
Jusqu’à ce soir, la baie de Garavan accueille la 6e édition des rencontres nautiques. L’occasion pour le public d’embarquer sur des voiles latines traditionnelles et restaurées par des amoureux de la mer
Pointus, yoles ou nacelles ondulent fièrement dans le vieux-port de Menton. Visibles d’entre tous par leurs coques fines et arrondies, prêtes à fendre paisiblement les flots... Hier, une vingtaine de voiles latines a jeté l’ancre en face de l’esplanade des Sablettes. À l’occasion de la 6e édition des rencontres nautiques – qui se poursuit jusqu’à ce soir (lire par ailleurs) – les visiteurs ont pu monter gratuitement à bord de ces navires historiques et ainsi prendre le large quelques instants. «L’idée est de faire découvrir au public des bateaux millénaires et très emblématiques de la navigation en Méditerranée. Les voiles latines se font de plus en plus rares et doivent leur survie à une poignée de passionnés qui prennent de leur temps pour les restaurer », souligne Serge Giacomazzi, président du club nautique de Menton, association à l’initiative de l’événement (1).
De belles histoires nées dans le port de Menton
Et certains passionnés de voiles latines se réjouissent tout particulièrement de faire escale à Menton ce week-end. Car, pour certains, la cité représente le port d’attache qui a vu naître le début d’une histoire... maritime. « C’est ici que je l’ai vu pour la première fois !, s’exclame l’Italien Edo Repetto tout en resserrant les noeuds de son embarcation ligure que l’on appelle aussi le «leudo». Il y avait une coque de bateau abandonnée à Garavan. J’ai décidé de la récupérer pour créer mon propre voilier.» Durant plus de deux ans, Le Génois a rassemblé – pièce par pièce – les éléments qui constituent le «leudo», la voile traditionnelle de Ligurie qui était utilisée pour le transport de marchandises jusqu’au 20e siècle. « Pour moi, c’était une façon de transmettre un héritage maritime. Pour ne pas qu’il tombe dans l’oubli.» Pour le Niçois Olympe Pellegrino, Garavan est également le point d’ancrage de son histoire avec le «Moby Dick». Un jour, il repère une balancelle génoise de 1920 à Menton. Huit ans plus tard, il la retrouve totalement délabrée à Antibes ! Il se lance dans un sauvetage compliqué. « J’ai passé deux ans à retaper ce voilier. Et avec lui, j’ai vécu de nombreuses aventures...» Brûlé mais aussi en partie coulé... Il faut dire que le «Moby Dick» a eu une vie plutôt houleuse aux côtés de son capitaine niçois. Mais jamais de naufrage. Même au creux de la vague. Sauver la voile latine pour sa valeur sentimentale et patrimoniale... deux raisons qui animent Michel Natoli. Depuis quinze ans, le Gaudois est propriétaire d’un pointu datant de 1960. « Je suis né en Tunisie et j’ai vécu toute mon enfance à côté d’un port. J’ai voulu ressusciter le voilier de mon enfance...» Un jour, le passionné a décidé de restaurer une épave qui était vouée à disparaître. « J’ai passé trois ans à raison de six heures par jour pour lui redonner une âme...» La voile latine mouille dans le port de Garavan depuis huit ans. « C’est une belle aventure mais c’est aussi un investissement financier immense. Je sais que je perdais beaucoup d’argent si je devais revendre mon bateau. Mais, ça n’a pas d’importance.» Un amour inconditionnel qui a de quoi déboussoler. Vous avez encore toute la matinée pour découvrir les voiles latines et voguer en compagnie de « sauveteurs » en mer atypiques.
1. Manifestation organisée en collaboration avec la section Voiles latines en Riviera, la Société publique locale des ports de Menton, la Ville de Menton et son Centre nautique, la SNSM et l’association A Ciocoula.