Deux policiers municipaux escrocs sans… réserve
Des brigadiers avaient fait croire à la mairie de Nice qu’ils étaient en mission pour la réserve de la gendarmerie. En réalité, ils bricolaient chez eux… tout en étant rémunérés
Sébastien et Rachid, 40 ans, sont amis, policiers municipaux (PM) à Nice depuis 2010, et gendarmes réservistes. Malgré des états de service plutôt flatteurs, les deux brigadiers se sont retrouvés hier matin au tribunal correctionnel pour escroquerie, faux et usage de faux. Ils ont été condamnés à un an de prison avec sursis et doivent rembourser la mairie les sommes indûment perçues : 1 900 euros pour l’un, 1300 pour l’autre. Leur demande de non-inscription de la condamnation sur leur casier judiciaire a été rejetée par le tribunal correctionnel. Autant dire que leurs jours au sein de la PM sont comptés.
Convocations falsifiées
En 2016 et 2017, les deux hommes ont présenté à leur employeur – la Ville de Nice – des convocations de la gendarmerie dont les dates avaient été grossièrement modifiées. Grâce à une convention, les agents municipaux gardent leur traitement quand ils viennent renforcer le groupement de gendarmerie des Alpes-Maritimes. Les deux policiers municipaux ont donc bénéficié de congés payés (quatre semaines pour l’un, trois pour l’autre), mais plutôt que d’être au service de la gendarmerie, ils bricolaient à leur domicile ! Le pot aux roses a été découvert l’an passé lors de l’arrivée du nouveau directeur de la police municipale. Les deux agents peu scrupuleux ont été placés sous contrôle judiciaire, suspendus avec traitement par leur administration dans l’attente du procès. À la barre, les deux prévenus reconnaissent les faits mais tentent de se justifier : « Si on n’était pas assez actifs dans la gendarmerie, on risquait d’être radié », invoque Sébastien. « La police municipale exigeait un préavis de quinze jours, or la gendarmerie nous contactait parfois deux jours avant », argue Rachid. (Photo François Vignola)
« Je ne réalisais pas la gravité des faits »
Catherine Bonnici, la présidente du tribunal s’étonne : « Vous essayez de justifier la fraude ! C’est inquiétant… À aucun moment vous avez saisi votre hiérarchie d’une quelconque difficulté. Comment envisagez-vous l’avenir ? » Rachid retrouve sa lucidité : « Je ne réalisais pas la gravité des faits. J’aime profondément mon métier. J’ai trente ans dans la réserve opérationnelle, j’ai commis une énorme faute, je m’en remets à vous. » À son tour, Sébastien bat sa coulpe : «Le service d’ordre, je ne sais faire que ça. On a fait n’importe quoi. » Me Guillaume Duchon-Doris, conseil de la Ville, réclame le remboursement des sommes indûment versées : « Leur fonction est de faire respecter la loi or ils trahissent leur insigne, à double titre. Ce n’est pas un instant de faiblesse mais des tromperies répétées. » Le procureur Joëlle Casanova requiert une peine d’amende de 2 000 euros et deux ans d’interdiction d’exercer leur profession. En défense, Me Hervé Gerbi, rappelle que ses clients « ont tout expliqué lors de leur garde à vue devant la section de recherche de la gendarmerie. Ils sont là pour tout assumer. Ils sont déjà sanctionnés par l’infamie d’une suspension. » À cette suspension administrative s’ajoute désormais une condamnation pénale.