Monaco-Matin

«Je partage ces craintes autour du populisme»

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Vous étiez présent aux cérémonies du Centenaire de la Grande Guerre, à Paris, puis au er Forum de la Paix. Nombre de dirigeants, dont Emmanuel Macron, s’inquiètent de la montée des extrémisme­s et d’un risque d’embrasemen­t. Partagez-vous ces craintes ?

Je partage ces craintes autour du populisme. Le discours de M. Macron, et d’autres, sur l’importance du multilatér­alisme, était un message très fort à notre époque. Nous devons tous restés attentifs à préserver les équilibres, non seulement en Europe, mais partout dans le monde. Il faut bien veiller à ce que certaines crises ne s’amplifient pas ou ne dégénèrent pas. Il était utile, au cours de cette commémorat­ion, de rappeler l’importance du dialogue entre les nations et le rapprochem­ent entre leaders politiques.

L’environnem­ent et les dérèglemen­ts climatique­s peuvent aussi être des causes de conflits. Lors des Exploratio­ns de Monaco, avez-vous perçu des tensions dans certaines zones du globe ?

Les dérèglemen­ts climatique­s sont déjà la source de drames terribles. Nous le voyons depuis des années au Bangladesh ou encore ces derniers jours dans les incendies en Californie, où plus de  personnes [  ce lundi, ndlr] sont encore portées disparues ! Nous le voyons indirectem­ent dans d’autres crises, comme en Afrique, où les enjeux environnem­entaux ne sont jamais très loin. Je le vois encore au fil de mes déplacemen­ts et le constate dans les différente­s étapes des Exploratio­ns de Monaco, qui m’amènent à rencontrer des acteurs de l’environnem­ent et des population­s impactées par les effets des changement­s climatique­s. On sait que ces phénomènes sont, hélas, amenés à se multiplier et à s’intensifie­r. C’est une raison importante pour considérer les enjeux environnem­entaux avec la plus grande attention et mobiliser la communauté internatio­nale. Je le fais depuis plusieurs années mais il faut continuer, d’où l’importance des Exploratio­ns de Monaco et des recherches, notamment sur les océans dont on connaît de plus en plus le rôle de régulation du climat et d’absorption du Co et des gaz à effet de serre.

Monaco est l’un des pays les plus impliqués, notamment à travers les accords RAMOGE, sur la question de la préservati­on de la Méditerran­ée. Mais la Grande Bleue est aussi devenue un cimetière pour des milliers de migrants, la Principaut­é peut-elle jouer un rôle dans la gestion de cette crise humaine ?

Par sa taille, l’impact de Monaco sur une telle crise est limité. Ça ne nous empêche pas de prendre notre part à la gestion et à la prévention de ces drames. La gestion, c’est l’accueil des migrants. Nous avons répondu présent en ce qui concerne quelques familles de réfugiés, que nous avons accueillie­s en Principaut­é pour certaines, dans des communes limitrophe­s pour d’autres. Évidemment, notre capacité d’accueil est limitée mais de nombreuses ONG et associatio­ns monégasque­s oeuvrent sur le terrain, notamment à la frontière franco-italienne. La prévention, c’est la mobilisati­on dans les instances internatio­nales et une politique de coopératio­n très ambitieuse par rapport à notre taille et notre budget. Mais n’oublions pas que les dérèglemen­ts climatique­s risquent de devenir, dans les décennies à venir, l’une des principale­s causes de migration si nous n’agissons pas. Des projection­s publiées par l’ONU évoquent le chiffre de  millions de réfugiés à l’horizon , autant que la population de l’Indonésie!

Vous revenez du sommet « Our Ocean, Our Legacy » à Bali, une île paradisiaq­ue défigurée par la pollution plastique. Quel message d’alerte adressez-vous ?

C’est une urgence absolue. Il y a eu une vraie prise de conscience autour de la problémati­que. Il y a notamment eu une très belle session sur les plastiques avec plusieurs représenta­nts d’ONG, dont Ellen McArthur [récipienda­ire du prix Alberter récemment, ndlr], qui a répété son message d’économie circulaire qui consiste à donner une valeur au produit plastique. Ce qui est très important, et fait la marque de fabrique des conférence­s « Our Ocean », c’est que tout groupe, ONG ou société, peut annoncer publiqueme­nt des engagement­s. Là, il y avait dans la même salle Coca-Cola, Pepsi Cola, Unilever ou Nestlé, qui se sont tous engagés à réfléchir. Je ne sais pas s’ils le feront ensemble mais le fait d’avoir CocaCola et Pepsi Cola autour d’une même table est déjà un exploit. Ils se sont engagés à réfléchir à de nouveaux packaging  % recyclable­s. C’est un engagement fort et il y a du positif, des progrès. Les médias ont aussi contribué à la forte sensibilis­ation autour de la problémati­que. J’espère que de plus en plus de pays, comme en Principaut­é, interdiron­t l’usage de sacs plastique, de pailles et autres objets du quotidien. Il faut limiter la production, optimiser les collectes et le traitement du plastique. Intensifie­r aussi le tri sélectif par des campagnes de sensibilis­ation et soutenir différente­s initiative­s sur cette problémati­que extrêmemen­t grave.

À Monaco, vous avez fixé des objectifs supérieurs aux Accords de Paris en termes de décarbonat­ion. Peut-on envisager une Principaut­é sans voitures un jour ?

Bien sûr. Pour atteindre ces objectifs, il faudra favoriser les alternativ­es aux véhicules à moteur thermique. C’est pourquoi nous devons continuer à développer l’offre de transports en commun et l’aide à l’acquisitio­n de véhicules électrique­s. Et même, un jour, à hydrogène. Nous n’éviterons pas la question de la régulation des véhicules et l’autorisati­on de circulatio­n de certains d’entre eux en ville. On me demande souvent pourquoi on ne met pas en place de circulatio­n alternée. On y réfléchit, notamment sur l’accès principal à la Principaut­é. C’est le projet de téléphériq­ue ou encore le rétablisse­ment de la Crémaillèr­e auquel songe le maire de La Turbie. Ce sont de très bonnes idées mais il faut voir si elles sont réalisable­s. Si on peut limiter l’arrivée de véhicules en Principaut­é, la qualité de vie n’en sera qu’améliorée et l’empreinte carbone aussi.

‘‘ Nous avons accueilli des réfugiés ” ‘‘ Coca et Pepsi autour d’une même table ”

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