Une manifestation devant l’Inspection du Travail
Représentants du personnel et responsables syndicaux ont voulu rappeler, hier, à l’institution «son rôle protecteur envers tous les salariés du pays». En toile de fond, un conflit interne à la CAM
On lâche rien ». Devant l’Inspection du Travail, les baffles surpuissantes crachent ce refrain d’une musique populaire. Les manifestants débordent un poil sur la rue Grimaldi. Des sifflets couvrent le brouhaha ambiant. Des pancartes aux slogans aiguisés sont dégainées. « Délégué du personnel attaqué = défense des salariés empêchée et droit de revendiquer entravée », peut-on lire ici et là. À l’appel de l’Union des syndicats de Monaco (USM), représentants du personnel et responsables syndicaux ont lancé, hier, «une alerte aux employeurs et aux pouvoirs publics ». En toile de fond de cette grogne, un conflit interne à la Compagnie des autobus de Monaco (CAM). Dans une missive datée du 13 novembre, son directeur d’exploitation, Roland de Rechniewski, annonçait à huit délégués du personnel du 1er collège (1), titulaires et adjoints, « la cessation de [leur] mandat pour cause de révocation ». La raison de cette décision ? Des salariés de la CAM ont réuni 68 signatures sur les 115 électeurs du 1er collège pour les destituer. Soit la majorité nécessaire, comme le prévoit l’article 10 de la loi 459 du 19 juillet 1947 (2). Sollicités par l’intermédiaire de la direction et d’une source interne, ces derniers n’ont pas donné suite mais il semblerait que cette défiance fasse suite à la longue grève de cet été chez les chauffeurs, laquelle avait sérieusement divisé en interne. Dans ce dossier, ils ont sollicité un rendez-vous à la Direction du Travail qui a accepté de les recevoir ce lundi. « Ce document prend la forme d’une pétition. Ils ont été entendus par nos services et ont expliqué les raisons ayant poussé une majorité du personnel du 1er collège à solliciter la révocation. Ce dossier traduit un désaccord interne profond entre les salariés de la CAM », confirme Pascale Pallanca, directeur du Travail. Du côté de l’USM et des délégués du personnel révoqués, c’est la méthode qui leur reste en travers de la gorge. « On ne sait même pas qui a signé. Est-ce que cela a été fait sous la contrainte physique ou morale ? Personne n’a demandé aux grévistes de cet été de signer. C’est un mépris de la démocratie. Tout cela va favoriser l’employeur. La Direction du Travail n’a pas souhaité nous communiquer la liste et on lui a demandé de faire une investigation. », peste Christophe Glasser, secrétaire général de l’USM. « On n’a aucune preuve matérielle et nous contestons cette destitution, surenchérissent Marie-PauleGardy-Lavogez et Yann Leveugle, deux des huit délégués du personnel concernés. On a été élu par un vote, on aurait dû être défait par un vote. » Problème, l’article 10 de la loi de 1947 sur le statut des délégués du personnel ne précise pas les modalités de révocation. Christophe Glasser, lui, invoque la convention collective nationale de travail du 5 novembre 1945, signée entre la Fédération patronale et l’Union des syndicats. « Le point 4 de l’article 2 dit que les délégués sont révocables à tout moment par un vote à scrutin secret à la majorité des électeurs intéressés. » Qui, toutefois, ne prévaut pas sur la loi.
Le juge de paix saisi
Toujours est-il que les principaux (Photos Jean-François Ottonello)
concernés par cette révocation ont donc envoyé une lettre au juge de paix, datée du 15 novembre, où il « demande de constater l’irrégularité de cette révocation émanant de l’employeur et en l’absence d’organisation de toute élection, ainsi que l’annulation de la lettre de notification de l’employeur car ce dernier n’a pas le pouvoir de prononcer ma révocation. » Affaire à suivre.
Chauffeurs-receveurs et personnel du dépôt. « Tout délégué du personnel peut être révoqué en cours de mandat par la majorité du collège électoral auquel il appartient. »