Monaco-Matin

Rond-point Saint-Isidore: «Ça ne suffit pas!»

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

D’un côté du rond-point de Saint-Isidore à Nice, dans la fumée des feux de bois allumés entre les canapés, il y a ceux qui ne veulent pas écouter Macron. «Ilnevapas annoncer sa démission. Donc aucun intérêt », souffle Jean. « Ça va servir à quoi ? On sait ce qu’il va dire ! Rien. S’il croit tuer le mouvement en parlant, il se met le doigt dans l’oeil. Et ça fait cinquante ans qu’on nous la fait », renchérit un autre « gilet jaune ».

« À moins d’un  degrés »

Pas de grand-messe devant Jupiter au programme, hier soir, mais des

idées et des conviction­s : « Avant son élection, j’avais déjà une peur bleue de lui. Et je théorisais sur un soulèvemen­t populaire. On y est. Je l’attendais car je ne me satisfais pas de comment le monde tourne »,

commente Caroline, 28 ans. «Je veux une société solidaire, un espoir. Une répartitio­n plus équitable des richesses », dit-elle encore.

L’écouter ? « Ce que j’attends est tellement à l’opposé de ma politique. Alors à moins qu’il ne fasse un 360 degrés, je n’ai rien à attendre. » De l’autre côté du rond-point, quelques irréductib­les qui écouteront. D’une oreille. Et qui, eux aussi, ont déjà livré la sentence avant même

l’allocution : « On n’attend rien de ce gars-là. On sait très bien que ça ne suffira pas. »

Et effectivem­ent, ça n’a pas suffi. Déjà, le timing est mauvais, disentils. « Depuis le 17 novembre, on est dans la rue et il parle seulement aujourd’hui ; c’est du mépris»,

s’agace Jean-Yves, retraité de La Poste.

« On dirait un enfant blessé dans les jupes de maman »

Un peu avant 20 heures, on met le son. « Le son seulement, on ne veut pas voir sa tête », rigole un « gilet jaune » en colère. Macron se lance. Les « gilets jaunes » niçois aussi. Récalcitra­nts épidermiqu­es. « Même sa voix, en fait, je ne la supporte pas»,

s’échauffe Robin, à fleur de peau.

« Ma fille travaille dans un Ehpad, je l’ai en pleurs au téléphone. Mon père qui a travaillé toute sa vie et élevé sept enfants, ne peut pas se chauffer, je lui fais le mazout.

Tiens ! Ça me fiche les larmes aux yeux. C’est pour eux que je suis un “gilet jaune” », lance le Catalan. Les débuts de la prise de parole du

Président leur « filent de l’urticaire ». « On dirait un enfant blessé qui va pleurer dans les jupes de sa maman», crachote Jean-Yves. « Mais on n’est pas sa mère, on est le peuple ! et on lui montre qu’on est là », s’enflamme Patrick, SDF, père de deux enfants.

Macron trop doucereux…. «Ilcaresse les gens dans le sens du poil maintenant, mais il nous a tous manqué de respect, c’est pas la peine », commente Jean-Yves. Non sans dérouler un chapelet de noms d’oiseaux… « Comment ça, il paie pour 40 ans de malaise ?»,

tranche soudain Gaëtan, employé de La Poste, qui goûte peu la formule. « Il remet ça sur les autres en plus», ajoute-t-il, remonté comme un coucou. « Assume ! », peste Jean-Claude, routier.

« Baisser le prix des fluides »

Le concret. On y arrive. Cent euros de plus pour le SMIC dès le 1er janvier. « Ça va dans le bon sens mais ça ne suffit pas»,

réagit Gaëtan pour qui la revendicat­ion du pouvoir d’achat est importante.

Henri hausse les épaules : « Il faut qu’il baisse le prix des fluides, carburant, eau, électricit­é, ce que les gens consomment. Et les taxes locales aussi. » Et de poursuivre : «Et les 100 €, il faudra bien les trouver quelque part. Il faudra bien les prendre à quelqu’un. À moi, par exemple qui gagne 1 500 €. Il faut redonner du pouvoir d’achat mais le prendre à personne. » « Eh bien voilà, il nous a encore plus énervés », conclut Robin.

 ?? (Photo Cyril Dodergny) ?? Emmanuel Macron n’a pas convaincu. Sur le rond-point de Saint-Isidore, les « gilets jaunes » ne lèveront pas le camp.
(Photo Cyril Dodergny) Emmanuel Macron n’a pas convaincu. Sur le rond-point de Saint-Isidore, les « gilets jaunes » ne lèveront pas le camp.

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