Rond-point Saint-Isidore: «Ça ne suffit pas!»
D’un côté du rond-point de Saint-Isidore à Nice, dans la fumée des feux de bois allumés entre les canapés, il y a ceux qui ne veulent pas écouter Macron. «Ilnevapas annoncer sa démission. Donc aucun intérêt », souffle Jean. « Ça va servir à quoi ? On sait ce qu’il va dire ! Rien. S’il croit tuer le mouvement en parlant, il se met le doigt dans l’oeil. Et ça fait cinquante ans qu’on nous la fait », renchérit un autre « gilet jaune ».
« À moins d’un degrés »
Pas de grand-messe devant Jupiter au programme, hier soir, mais des
idées et des convictions : « Avant son élection, j’avais déjà une peur bleue de lui. Et je théorisais sur un soulèvement populaire. On y est. Je l’attendais car je ne me satisfais pas de comment le monde tourne »,
commente Caroline, 28 ans. «Je veux une société solidaire, un espoir. Une répartition plus équitable des richesses », dit-elle encore.
L’écouter ? « Ce que j’attends est tellement à l’opposé de ma politique. Alors à moins qu’il ne fasse un 360 degrés, je n’ai rien à attendre. » De l’autre côté du rond-point, quelques irréductibles qui écouteront. D’une oreille. Et qui, eux aussi, ont déjà livré la sentence avant même
l’allocution : « On n’attend rien de ce gars-là. On sait très bien que ça ne suffira pas. »
Et effectivement, ça n’a pas suffi. Déjà, le timing est mauvais, disentils. « Depuis le 17 novembre, on est dans la rue et il parle seulement aujourd’hui ; c’est du mépris»,
s’agace Jean-Yves, retraité de La Poste.
« On dirait un enfant blessé dans les jupes de maman »
Un peu avant 20 heures, on met le son. « Le son seulement, on ne veut pas voir sa tête », rigole un « gilet jaune » en colère. Macron se lance. Les « gilets jaunes » niçois aussi. Récalcitrants épidermiques. « Même sa voix, en fait, je ne la supporte pas»,
s’échauffe Robin, à fleur de peau.
« Ma fille travaille dans un Ehpad, je l’ai en pleurs au téléphone. Mon père qui a travaillé toute sa vie et élevé sept enfants, ne peut pas se chauffer, je lui fais le mazout.
Tiens ! Ça me fiche les larmes aux yeux. C’est pour eux que je suis un “gilet jaune” », lance le Catalan. Les débuts de la prise de parole du
Président leur « filent de l’urticaire ». « On dirait un enfant blessé qui va pleurer dans les jupes de sa maman», crachote Jean-Yves. « Mais on n’est pas sa mère, on est le peuple ! et on lui montre qu’on est là », s’enflamme Patrick, SDF, père de deux enfants.
Macron trop doucereux…. «Ilcaresse les gens dans le sens du poil maintenant, mais il nous a tous manqué de respect, c’est pas la peine », commente Jean-Yves. Non sans dérouler un chapelet de noms d’oiseaux… « Comment ça, il paie pour 40 ans de malaise ?»,
tranche soudain Gaëtan, employé de La Poste, qui goûte peu la formule. « Il remet ça sur les autres en plus», ajoute-t-il, remonté comme un coucou. « Assume ! », peste Jean-Claude, routier.
« Baisser le prix des fluides »
Le concret. On y arrive. Cent euros de plus pour le SMIC dès le 1er janvier. « Ça va dans le bon sens mais ça ne suffit pas»,
réagit Gaëtan pour qui la revendication du pouvoir d’achat est importante.
Henri hausse les épaules : « Il faut qu’il baisse le prix des fluides, carburant, eau, électricité, ce que les gens consomment. Et les taxes locales aussi. » Et de poursuivre : «Et les 100 €, il faudra bien les trouver quelque part. Il faudra bien les prendre à quelqu’un. À moi, par exemple qui gagne 1 500 €. Il faut redonner du pouvoir d’achat mais le prendre à personne. » « Eh bien voilà, il nous a encore plus énervés », conclut Robin.